Mon clin d'œil

« Je préfère les Bleus aux Gilets jaunes. »

— Les Champs-Élysées

Opinion Lettre au premier ministre et au ministre de l'Éducation

Oui, l'éducation doit être une priorité 

Monsieur le premier ministre François Legault,

Monsieur le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge,

La FCCQ se réjouit que vous ayez fait de l’éducation une véritable priorité de votre mandat.

Depuis plusieurs années, nous répétons que l’éducation est le socle du développement économique, social et humain de la collectivité québécoise.

Donner «  priorité à l’éducation  » est un programme vaste et complexe. Pour reprendre en substance ce que vous avez déjà dit, notre succès en matière d’éducation reposera sur des gestes ciblés, systématiques et porteurs, bien davantage que sur quelque spectaculaire réforme.

La FCCQ reconnaît que la modernisation de notre système d’éducation sera exigeante et complexe. À quelques jours du discours inaugural de votre nouveau gouvernement, nous croyons opportun de contribuer à votre cheminement.

1) Trois considérations servent de toile de fond à notre réflexion. L’éducation concerne aujourd’hui non seulement les jeunes, mais toutes les phases de la vie. Il faut donc accorder autant d’importance à la formation des adultes qu’à celle des jeunes.

2) L’éducation peut, et doit, contribuer à pallier la pénurie de main-d’œuvre qui sera notre lot pendant toute une génération. Elle doit donc, pour reprendre l’expression de Montaigne, produire plutôt des «  têtes bien faites  », capables de mobilité professionnelle et d’adaptation au progrès technologique, plutôt que des «  têtes bien pleines » de savoirs susceptibles d’être rapidement datés.

3) L’éducation peut, et doit, contribuer à combler le retard du Québec en matière de productivité. L’accroissement de productivité est la seule source d’enrichissement durable d’une collectivité.

De nouveaux savoirs et savoir-faire

Nous sommes au cœur d’une nouvelle révolution industrielle, à laquelle aucun secteur de l’économie n’échappe : une révolution basée sur les technologies de l’information, la robotisation et l’intelligence artificielle. Porteuse de productivité, cette révolution exige aujourd’hui des travailleurs qu’ils soient mieux qualifiés que jamais. Cette tendance s’accentuera.

Comme les révolutions industrielles passées, l’actuelle va supprimer des emplois, mais aussi en créer de nouveaux qui exigeront des compétences nouvelles et dans des professions et des métiers qui n’existaient même pas voilà 10 ans ou que l’on ne peut imaginer aujourd’hui.

Au-delà de la diplomation, il incombe au système d’éducation de permettre aux travailleurs d’acquérir, avant et après leur entrée sur le marché du travail, ces compétences nouvelles. Il lui incombe également de prévoir des moyens pour toutes et tous, tout au long de leur vie, d’acquérir rapidement de nouvelles compétences pour suivre l’évolution technologique.

acquérir et entretenir des compétences

En matière de compétences, il faut donc intervenir tant chez les jeunes que chez les adultes.

Pour que nos jeunes diplômés aient la tête aussi bien faite que bien pleine, ils doivent acquérir une solide formation fondamentale, notamment la maîtrise des trois piliers de l’apprentissage : la littératie, la numératie et la littératie numérique – y compris des compétences de base en codage informatique.

En cette matière, le temps presse : la FCCQ exhorte votre gouvernement à adapter les programmes de formation de l’école québécoise au plus tard d’ici 2022, soit avant la fin de votre mandat. Plutôt que de débattre sans fin de la réforme «  idéale  », nous recommandons de donner aux établissements d’enseignement primaire et secondaire la liberté d’expérimenter et la responsabilité d’évaluer et de faire connaître les résultats de ces expériences. Ainsi, on pourra rapidement repérer les pratiques et les curriculums les plus porteurs.

Par ailleurs, la distinction entre la formation générale et la formation professionnelle, au niveau secondaire, et la formation préuniversitaire ou technique, au collégial, crée des dédoublements et des obstacles au passage d’une filière à l’autre. Elle contribue à dévaloriser les formations professionnelle et technique et retarde la diplomation. Il importe de faciliter les changements de parcours, de sorte qu’un élève puisse en changer avec un minimum de perte de temps.

Au niveau universitaire, nous reconnaissons pleinement le libre choix d’un étudiant d’étudier dans la discipline de son choix. Il incombe toutefois à la collectivité de prendre les moyens pour combler ses pénuries de compétences. Nous recommandons en conséquence que les programmes d’aide financière soient structurés pour inciter les étudiants à se diriger vers les disciplines prometteuses.

En ce qui a trait à la formation permanente, la « loi du 1 % » destinée à favoriser la formation de la main-d’œuvre n’a malheureusement pas rempli ses promesses. L’objectif de cette mesure doit être maintenu, mais poursuivi autrement. La FCCQ recommande l’instauration d’un régime volontaire d’épargne pour la formation continue, sur des bases semblables à celles du Régime enregistré d’épargne-études. L’employé ou son employeur pourraient ainsi contribuer à un fonds individuel, destiné à financer les frais et le manque à gagner associés à un perfectionnement ou à un retour aux études en cours de carrière.

Soyons clairs : nous ne réduisons pas le rôle de l’éducation à sa seule dimension économique. Tout autant que des compétences, l’école doit développer chez les étudiants les savoirs, savoir-faire et savoir-être qui en feront des citoyens engagés et épanouis. Mais l’acquisition et le maintien de compétences à valeur économique doivent être au cœur de sa mission.

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