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TVA prévoit perdre 32 millions en quatre ans

En raison d’une baisse de revenus de 9 %, la chaîne généraliste TVA prévoit perdre 32,4 millions de dollars au cours des quatre prochaines années, selon les documents soumis par le Groupe TVA au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) dans le cadre de son renouvellement de licences.

TVA a généré des profits de 4,3 millions en 2016-2017. Depuis 10 ans, la chaîne généraliste a perdu de l’argent durant une seule année : des pertes avant impôts et intérêts de 3,4 millions en 2014-2015. En 2012-2013, TVA faisait des bénéfices avant impôts et intérêts de 25,3 millions, selon les données du CRTC.

La chaîne généraliste prévoit tomber dans le rouge en 2018-2019, et les pertes prévues augmenteront jusqu’à 12,7 millions en 2021-2022. Les pertes prévues sont essentiellement attribuables à la baisse prévue des revenus, qui diminueraient de 220,2 millions en 2017-2018 à 201,0 millions en 2021-2022, soit une baisse de 9 % en quatre ans.

Dans ce contexte déficitaire, la chaîne généraliste du Groupe TVA entend tout de même conserver son niveau de dépenses en contenu original canadien, qui passerait de 106,5 millions en 2016-2017 à 107,1 millions en 2021-2022.

L’ancien vice-président du CRTC Michel Arpin doute toutefois que le Groupe TVA laisse sa chaîne généraliste tomber dans le rouge de façon prononcée. « Les revenus de la chaîne généraliste TVA ont [déjà] diminué d’environ 40 millions depuis quatre ans. Quand on comparera ces projections avec les données réelles [dans quelques années], on constatera sûrement qu’ils vont diminuer les dépenses. Éventuellement, ils vont être obligés de le faire », dit M. Arpin, qui prenait toujours les prévisions des entreprises avec un grain de sel quand il siégeait au CRTC. 

« Je n’ai jamais eu confiance dans ces prévisions. C’est extrêmement difficile de faire des prévisions sur cinq ans. »

— Michel Arpin, ancien vice-président du CRTC

M. Arpin rappelle aussi que les entreprises n’ont pas intérêt à faire des prévisions trop optimistes de façon à ce que le CRTC durcisse leurs conditions de licences. À titre d’exemple, lors du renouvellement précédent des licences en 2010, le Groupe TVA prévoyait des pertes de 4,8 millions pour sa chaîne généraliste TVA en 2016-2017. Au final, la chaîne a généré des profits de 4,3 millions.

À la demande du gouvernement Trudeau, le CRTC doit justement réexaminer sa décision de ne pas imposer de conditions de licence aux télés francophones pour la programmation originale en français (en première diffusion). C’est dans ce contexte que les quatre groupes télé francophones ont soumis au CRTC leurs prévisions financières jusqu’en 2021-2022.

Des chaînes privées de télé, la chaîne généraliste TVA est de loin celle qui dépense le plus en programmation originale de langue française. En 2016-2017, TVA a représenté 48 % des dépenses de l’ensemble des chaînes des groupes privés de télé francophone, soit 106,5 millions sur un total de 221,6 millions.

Par contre, les six chaînes spécialisées du Groupe TVA (à l’exception de TVA Sports, qui est une licence distincte) devraient continuer d’être rentables : les profits prévus passeraient de 9,9 millions en 2016-2017 à 8,3 millions en 2021-2022. Le Groupe TVA compte hausser les dépenses en contenu original francophone de ses chaînes spécialisées de 7,4 millions en 2016-2017 à 8,4 millions en 2021-2022. 

Le Groupe TVA n’a pas répondu aux questions de La Presse sur ses prévisions financières.

V et Bell Média : moins de programmation originale

L’autre chaîne généraliste privée francophone, V, prévoit faire des profits cumulés de 2,4 millions au cours des quatre prochaines années, tout en faisant passer ses dépenses en programmation originale francophone de 25,3 millions en 2016-2017 à 15,0 millions en 2021-2022. Il s’agit d’une baisse de 40 %. La Presse avait fait état en décembre des prévisions sur la programmation originale.

Le Groupe V Média n’a pas commenté ses prévisions financières.

Le portrait est tout autre chez Bell Média : l’entreprise compte faire des profits de 175,7 millions au cours des quatre prochaines années avec ses chaînes spécialisées francophones (en excluant sa chaîne sportive RDS), mais la programmation originale francophone diminuera de 65,7 millions en 2016-2017 à 34,3 millions en 2021-2022. Il s’agit d’une baisse de 48 %. 

« Nos projections représentent un minimum et non un maximum. Personne n’investit plus que Bell Média dans les chaînes spécialisées en programmation originale de langue française », indique par courriel Jules Hébert, porte-parole de Bell Média.

« Ils vont avoir de la difficulté à convaincre le CRTC, dit l’ex-vice-président du CRTC Michel Arpin. Bell Média essaie d’avoir des projections plus défensives. Ils se disent : si le portrait est plus négatif, le CRTC va peut-être viser plus bas. »

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