Hockey Le Canadien
Mike Condon, derrière le nom
La Presse
Que ce soit de son père, de sa prestigieuse alma mater, du pays de ses ancêtres ou de son long parcours, Mike Condon est un homme fier.
Une simple mention de son nom dans une conversation, dans un tweet engendre toujours son lot de jeux de mots. Un bête exemple : le premier article que votre humble serviteur avait écrit sur Condon, en mai 2014, avait suscité dix commentaires au bas de la page. Sept d’entre eux étaient relatifs à son nom.
« J’ai eu ce nom de famille toute ma vie, donc j’y suis habitué. C’est à une lettre d’un mot tabou. En plus, je suis roux. Quand tu es jeune, dès que tu es un peu différent, tu te fais constamment agacer.
« Mais mon père m’a toujours rappelé que c’est une fierté de porter ce nom irlandais. J’en suis fier. Les gens peuvent faire leurs blagues, je n’y porte pas attention. En fait, ça en dit long sur le degré d’humour de ces gens. J’ai 25 ans, ça fait 23 ans que j’en entends parler ! »
Voilà, c’est dit.
Le père de Mike Condon, Ted, a subi une intervention appelée fusion vertébrale et s’est fait remplacer la hanche à deux reprises. Mike a-t-il hérité d’un mauvais bagage génétique ?
« Tu dois jouer avec les cartes que tu reçois, donc je crois en avoir tiré le maximum ! »
Cela dit, Ted Condon a lui aussi soutiré le maximum de son corps. « Mon père était quart au football, au niveau collégial. Il m’a encouragé à pratiquer le plus de sports possible : hockey, baseball, soccer, football, crosse, aviron. Il aurait vraiment voulu que je joue au football, mais je me blessais à chaque jeu, je n’aimais pas vraiment ça !
« Aujourd’hui, il est sergent pour la police d’État du Massachusetts, pour l’unité d’arrestation des fugitifs violents. Il court après des malfaiteurs chaque jour. Il a eu besoin d’une opération à la colonne vertébrale après avoir pourchassé un fugitif. Son corps est usé. Mais on forme une famille très active. »
Les problèmes du père ne tardent pas à rattraper le fils. Avril 2011, à l’issue de sa deuxième année à l’Université de Princeton, Mike est opéré à la hanche. C’est notamment ce qui explique pourquoi sa carrière tarde à décoller.
« J’étais prêt à jouer six mois plus tard, mais ça a pris beaucoup d’effort et c’était douloureux. Je ne pouvais pas marcher. Les gens tiennent leur corps pour acquis. Mais pendant cinq semaines, je ne pouvais pas mettre de pression sur la jambe gauche, puis cinq semaines sur la jambe droite. J’avais ma propre voiturette de golf pour me déplacer, car le campus de Princeton est vraiment vaste ! C’était une expérience très difficile, mais c’est ce genre d’épreuves qui nous rend plus forts. »
Nous lui avons posé la question suivante : « Quand, à 22 ans, vous avez été opéré à la hanche, vous aviez donc très peu de matchs à votre actif [29 à ses trois premières saisons], et vous évoluiez dans un collège plus réputé pour son volet scolaire que sportif. On ne se bousculait pas aux portes pour vous recruter. »
« Je ne recevais que très peu d’attention, et je n’en méritais pas, car je ne gagnais pas. »
— Mike Condon
La suite commence à être plus connue. Dès qu’il quitte les bancs d’école, au printemps 2013, il gravit les échelons à un rythme fulgurant, pour un gardien. Il ne passe qu’une saison complète en ECHL, une saison qu’il conclut au premier rang des gardiens du circuit pour l’efficacité. L’année suivante, en 2014-2015, c’est dans la Ligue américaine, à Hamilton, qu’il se met en valeur.
Là aussi, il ne fait que passer, puisqu’en septembre dernier, il déloge Dustin Tokarski du poste d’adjoint à Carey Price. « Au hockey, il n’y a que très peu de portes ouvertes, et tu ne sais jamais quand la prochaine s’ouvrira. Les gardiens ont une très petite fenêtre pour se faire voir et tu peux vite être oublié. »
Mike Condon a pleinement profité de la sienne. Le voici aujourd’hui, à titre de 12
joueur de l’histoire de Princeton à atteindre la LNH.« J’en tire beaucoup de fierté. Sur un mur de l’aréna Hobey-Baker, il y a une photo de chaque ancien de Princeton qui a joué dans la LNH. Quand j’étudiais là, je regardais ces photos et je me disais que ça serait tellement
d’avoir la mienne sur ce mur pour toujours. Et [le 11 octobre à Ottawa] a fait en sorte que ça va se produire. Ça signifie beaucoup pour moi. J’adore cette université. »