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Édition du 19 mai 2019,
section ACTUALITÉS, écran 9
20 412
Nombre de gènes humains capables de reproduire des protéines
2058
Nombre maximal de gènes sur un chromosome
842
Nombre de gènes sur le chromosome X
71
Nombre de gènes sur le chromosome Y (masculin)
Source : National Institutes of Health
La race invalidée par la génétique
L’une des conclusions les plus frappantes issues de la génétique moderne est qu’il y a davantage de diversité génétique à l’intérieur d’une race ou d’une population culturelle donnée qu’entre ces groupes. Bref, il y a plus de différences entre deux Blancs ou deux Noirs qu’entre le Blanc et le Noir moyens. « La population la plus homogène de la planète est la tribu amazonienne des Suruì, qui compte 1120 personnes, dit Carl Zimmer. Mais même les Suruì abritent 59 % de la diversité génétique des humains du monde entier. Je suis blanc, mais 83 % de mes 3,5 millions de polymorphismes génétiques se retrouvent aussi chez les Africains et les Asiatiques. »
L’hypertension afro-américaine
Les premiers traitements contre l’hypertension, dans les années 50, ont mené les médecins américains à une constatation consternante : 40 % des Noirs avaient une pression trop élevée, comparativement à seulement 25 % des Blancs. Cette « prédisposition raciale » s’est finalement révélée être attribuable à l’oppression et à l’esclavage, dit Carl Zimmer. « Des études dans les années 90 ont montré que les fermiers dans la campagne du Nigeria et du Cameroun ont des pressions sanguines inférieures aux fermiers blancs américains. Encore une autre preuve : les Finlandais et les Allemands ont une pression sanguine plus élevée que les Afro-Américains. Ç’a été une preuve supplémentaire que le stress social engendre l’hypertension. »
L’épigénétique
Ce stress social a été lié à des mutations génétiques par le généticien Michael Meaney, de l’Université McGill, note M. Zimmer. « Ç’a été la révolution de l’épigénétique. La génétique depuis 150 ans postulait qu’il fallait plusieurs générations pour que des mutations apparaissent. » Au début du XIXe siècle, le naturaliste français Jean-Baptiste de Lamarck postulait que si un animal acquérait une capacité physique, il transmettait cette aptitude à sa descendance. Charles Darwin, à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, a montré que les modifications génétiques des espèces se font à beaucoup plus long terme, grâce à la sélection naturelle. L’agronome soviétique Trofim Lissenko a tenté, dans les années 40, de relancer le lamarckisme pour promouvoir la plantation d’arbres et de céréales septentrionales dans le Nord, alléguant que les mutations génétiques d’adaptation seraient rapides. Depuis 20 ans, l’épigénétique montre que le stress modifie l’ADN d’une personne, et même l’ADN des bébés qu’elle pourrait engendrer. Cette découverte est appelée « néo-lamarckisme ».
Trois parents
L’épigénétique se traduit généralement par une modification de l’ADN de la mitochondrie des cellules plutôt que de l’ADN de leur noyau. La mitochondrie, la centrale énergétique des cellules, constitue un autre front de la recherche en génétique. « On a réussi depuis 20 ans à transférer une partie de l’ADN de l’ovule d’une tierce partie pour créer des enfants avec trois parents, dit M. Zimmer. Maintenant, on vise plutôt le transfert de l’ADN mitochondrial séparément de l’ADN du noyau des cellules, pour le même objectif de trois parents. C’est une révolution sans précédent sur le plan de l’hérédité. »
Chimères
Une autre histoire fascinante que raconte Carl Zimmer concerne les « chimères tétragamétiques ». Il s’agit de femmes dont l’ADN est composé de deux jumeaux qui se sont fusionnés tôt dans la grossesse. Leurs organes ont des ADN différents, et il y a notamment des différences entre les ovules qu’elles produisent. Le livre She Has Her Mother’s Laugh raconte l’histoire de deux femmes qui ont vu des tribunaux nier leur maternité sur des enfants dont, pourtant, la naissance avait été certifiée par plusieurs personnes, notamment un notaire.
La préhistoire
Les recherches génétiques ont également permis de mieux comprendre les mouvements de population préhistoriques et à l’aube de l’histoire. « Avec l’ADN, on a pu voir que voilà 27 000 ans, une population humaine de culture aurignacienne en Europe a été complètement remplacée par la culture gravettienne, qui utilisait des javelots pour chasser le mammouth et des pièges pour le petit gibier, dit M. Zimmer. Après des milliers d’années d’exclusivité gravettienne sur le plan de l’ADN, on voit soudainement, il y a 19 000 ans, resurgir l’ADN aurignacien en Espagne, puis partout en Europe, sous forme d’un métissage aurignacien-gravettien. Six mille ans plus tard, soudainement, on voit de l’ADN du Moyen-Orient apparaître, possiblement avec la fin des glaciations qui empêchaient les mouvements dans les Balkans. Autre migration, il y a 9000 ans, on voit apparaître un autre type d’ADN, probablement des premiers fermiers, qui habitaient la Turquie et le Proche-Orient. Enfin, il y a 2500 ans, une vague d’ADN des steppes russes vient compléter le mélange génétique européen. »
Quelles sont les différences entre l’ADN mitochondrial et l’ADN du noyau de la cellule ?
Le génome mitochondrial
Le génome mitochondrial est une molécule d’ADN circulaire qui comprend environ 16 500 bases sur 37 gènes. Chaque mitochondrie comprend plusieurs copies de son génome.
L’ADN mitochondrial forme une molécule d’ADN circulaire.
Un seul brin d’ADN contient plusieurs gènes et est en forme de double hélice. Des bases relient ces deux hélices.
Chromosome
Un chromosome est un morceau de double hélice d’ADN. Les humains ont 23 paires de chromosomes dans leur noyau. L’ADN nucléaire contient approximativement 3 milliards de bases et plus de 20 000 gènes.
Réponse : L’une des plus importantes études sur le sujet a été publiée en 2009 dans la revue Behavioural Genetics par des chercheurs néerlandais. Ils ont analysé les aptitudes de 1685 paires de jumeaux pour voir s’ils avaient des talents artistiques, intellectuels ou sportifs en commun. Les jumeaux avaient de 12 à 24 ans au moment de l’analyse. Les talents musicaux étaient les plus étroitement liés à la génétique, suivis par les talents mathématiques, puis sportifs. Les aptitudes intellectuelles et artistiques générales étaient à peine influencées par la génétique. Leur définition de qualités artistiques et sportives ne concernait pas que les génies : 2 % des jumeaux étaient jugés très artistiques, 10 % des garçons et 5 % des filles étaient jugés très bons dans les sports.
— Mathieu Perreault, La Presse