Reconstruction mammaire
Trois femmes, trois parcours
La Presse
Reconstruction mammaire tardive
« Vous êtes beaucoup trop jeune pour continuer à vivre avec un seul sein. » Quand le chirurgien-plasticien Joseph Bou-Merhi lui a fait cette remarque, Sylvie Poirier avait 51 ans. Elle vivait depuis près de deux ans avec un seul sein et hésitait à se faire reconstruire son sein manquant. « J’en avais vraiment assez de tout ce qui était traitement, chirurgie, rendez-vous dans les hôpitaux », dit celle qui avait subi, en plus de sa mastectomie, 4 traitements de chimiothérapie, 25 traitements de radiothérapie et 2 tumorectomies.
Mais après sa rencontre avec le plasticien, l’idée de retrouver sa poitrine a commencé à faire son chemin, raconte Sylvie Poirier, qui trouvait désagréable de vivre avec un seul sein. « Mon sein gauche était quand même de bon volume et j’avais l’impression d’être débalancée tout le temps, d’avoir mal dans le dos », dit-elle. En mars 2014, le D
Bou-Merhi a reconstruit son sein droit grâce à un lambeau de peau et de graisse prélevé sur son abdomen. La différence entre l’avant et l’après ?« C’est simple : je suis normale, je suis une femme. Le temps que j’ai eu un seul sein, j’étais une patiente, j’étais une mère de famille, mais je n’étais plus une femme. »
— Sylvie Poirier
« Être bien dans sa peau, ça n’existait plus. » « Je ne regrette pas, mais pas du tout, du tout, poursuit-elle. C’est sûr que les journées qui ont suivi la reconstruction, c’était douloureux, mais ça vaut le coup. Trois semaines plus tard, tu as tout oublié et tu apprécies vraiment. »
Reconstruction mammaire immédiate par prothèse d’expansion
Quand Majoly Dion a eu la confirmation qu’elle souffrait d’un cancer du sein, au début de 2013, elle a fureté sur l’internet pour s’informer sur la mastectomie. Ce qu’elle a trouvé ne l’a pas rassurée. Au contraire. « Je me voyais charcutée. Je me disais : "Ça ne se peut pas, je ne vais pas avoir l’air de ça" », se souvient-elle. Productrice-réalisatrice, Majoly Dion s’est donné une mission : faire un documentaire à partir de sa propre expérience, de la mastectomie jusqu’à la reconstruction de ses seins.
Pour donner un sens à ce qu’elle allait vivre, pour aider les femmes qui auront elles aussi à passer par là.
« Le documentaire touche à tout ce qu’on n’a jamais vu à l’écran et va pouvoir aider les femmes à comprendre. »
— Majoly Dion
« C’est mon expérience, mais je suis allée chercher aussi d’autres femmes qui ont vécu l’après-cancer. » Une chaîne spécialisée s’est montrée intéressée par l’achat du documentaire, mais Majoly Dion a préféré lancer sa propre chaîne télé internet pour l’offrir gratuitement et atteindre le plus de femmes possible, « 24 heures sur 24 ».
Son expérience a été haute en émotions (elle a dû faire changer ses implants 18 mois après la première intervention parce qu’ils s’étaient déplacés et qu’elle était en souffrance chronique), mais elle en valait la peine. « Aujourd’hui, je recommence à réintégrer mon identité de femme », dit-elle en souriant.
On pourra voir son documentaire
dès le 25 octobre.Mastectomie sans reconstruction mammaire
Lise Favreau a subi une double mastectomie il y a près de deux mois. On lui a proposé la reconstruction, mais elle n’en a pas voulu. Elle dit qu’il y a plusieurs raisons.
« La première, c’est que je suis écœurée de me faire taponner, de me faire couper, de tout ça. À 67 ans, je voulais donner la paix à mon corps et à ma tête. »
La mère de Lise Favreau a été emportée par le cancer du sein, et la sœur de Lise, par un cancer des ovaires.
Lise, elle, n’a jamais eu le cancer, mais elle a appris en 2001 qu’elle était porteuse d’une mutation du gène BRCA1, ce qui augmente ses risques d’avoir un cancer du sein ou de l’ovaire. À l’époque, sa gynécologue lui avait proposé trois options : ne rien se faire enlever, se faire enlever les ovaires ou se faire enlever les ovaires et les seins.
Lise Favreau a subi une hystérectomie, mais elle ne se sentait pas prête, à l’époque, à subir une mastectomie. Pendant les 15 années qui ont suivi, Lise Favreau a dû passer des tests tous les six mois pour s’assurer qu’elle n’avait pas le cancer du sein, avec tout le stress que cela engendre.
Puis, un jour, Lise a abordé le sujet de la mastectomie avec sa conjointe des 13 dernières années. « Elle m’a dit : "Écoute, je ne suis pas tombée en amour avec toi pour tes seins." Ç’a été mon passeport pour la liberté. » Lise était émotive avant de se faire enlever ses pansements, après sa mastectomie, mais elle était contente. « On aurait dit que je les avais pris en aversion, mes seins, dit-elle. C’est un fardeau qu’on m’enlevait. »