YANNICK NÉZET-SÉGUIN À LA TÊTE DU METROPOLITAN OPERA

« Un grand rêve qui devient réalité »

Le Metropolitan Opera de New York a confirmé hier que Yannick Nézet-Séguin deviendra son troisième directeur musical en 133 ans d’histoire.

Le chef montréalais de 41 ans étant déjà un homme très occupé à Philadelphie, à Rotterdam ainsi qu’à Montréal, où il dirige l’Orchestre Métropolitain depuis l’an 2000, il n’entrera officiellement en fonction au Met que pour la saison 2020-2021, mais il en sera le directeur musical désigné à partir de 2017-2018, et collaborera à ce titre à l’élaboration de sa programmation.

À compter de septembre 2017, Yannick Nézet-Séguin dirigera deux opéras par année au Met, puis il passera à cinq productions annuelles à l’automne 2020.

« Il n’y a pas eu un jour où j’ai été aussi heureux, aussi honoré et aussi reconnaissant », a lancé le jeune maestro en conférence de presse en duplex de sa chambre d’hôtel au Japon, où il est actuellement en tournée avec l’Orchestre de Philadelphie. « C’est un grand rêve qui devient réalité, a-t-il poursuivi. Je suis extrêmement enthousiaste d’entreprendre dès maintenant mon travail, qui sera d’abord et avant tout de maintenir le niveau d’excellence de cette maison, qui est sans aucun doute une des plus grandes au monde et dont le chœur, l’orchestre et les chanteurs sont tout simplement extraordinaires. Mais surtout, je souhaite mettre toute ma passion à démontrer aux gens du monde entier à quel point l’opéra occupe une place importante dans leur vie. J’ai vraiment hâte de commencer ! »

UNE COLLABORATION FRUCTUEUSE

Il était écrit dans le ciel que Yannick Nézet-Séguin serait un jour nommé directeur musical du Metropolitan Opera qui a eu le flair de se l’attacher pour cinq opéras en autant d’années en 2009. D’autres productions se sont ajoutées en cours de route, si bien qu’il avait déjà du travail au Met jusqu’en 2020 avant l’annonce d’hier.

À la mi-septembre 2015, le chef montréalais a ouvert la saison du Met avec l’Otello de Verdi, et le magazine The New Yorker a relancé le scénario faisant de lui le successeur du directeur musical James Levine, titulaire depuis 40 ans mais dont les problèmes de santé récurrents étaient bien connus. Une hypothèse d’autant plus vraisemblable que Nézet-Séguin venait d’annoncer, en mai, qu’il abandonnerait la direction de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam après 10 ans, en 2018.

D’autres institutions prestigieuses lui faisaient de l’œil : son nom avait été évoqué parmi les successeurs potentiels de Simon Rattle à la tête de l’Orchestre philharmonique de Berlin. Plus encore, le prestigieux magazine Musical America en a fait son artiste de l’année 2016.

« Non, on n’est pas rendus là », a répondu le chef en novembre dernier quand nous lui avons demandé s’il avait discuté sérieusement de la possibilité de succéder à James Levine à la direction de l’orchestre du Met. Mais son intérêt pour le poste était indéniable. Il nous disait « sans hésiter » que le Met était la plus grande maison d’opéra du monde et que les orchestres de Philadelphie – qu’il dirige depuis 2012 – et du Met étaient les deux meilleurs en Amérique du Nord.

Les rumeurs se sont intensifiées à la mi-avril quand le Met a annoncé le départ du maestro Levine.

PAR LA GRANDE PORTE

Yannick Nézet-Séguin n’avait que 34 ans quand il est entré par la grande porte au Metropolitan Opera en y dirigeant Carmen de Bizet le 31 décembre 2009. « Je pense que nous avons fait un bon pari », avait alors dit à La Presse le directeur général du Met, Peter Gelb, qui venait de confier cinq opéras – cinq nouvelles productions de surcroît – à un chef qui n’avait pas encore dirigé au Met, du jamais-vu. Un risque calculé, nous avait dit Gelb, tellement la concurrence est vive entre les grandes maisons d’opéra.

En poste depuis 2005, le directeur général du Met avait recruté Nézet-Séguin pour Carmen sans l’avoir entendu, sur la recommandation pressante de son équipe artistique. Puis il est allé le voir à l’œuvre à Salzbourg, en Autriche, où il faisait ses débuts dans Roméo et Juliette de Gounod à l’été 2008 : « J’ai assisté à la générale et je l’ai trouvé formidable. »

Par la suite, Nézet-Séguin a dirigé l’orchestre du Met dans Don Carlo, Faust, La Traviata et Rusalka et l’institution new-yorkaise a retenu ses services jusqu’en 2020. La perspective de s’attaquer à un opéra allemand – Le vaisseau fantôme, son premier Wagner, en avril 2017 – le réjouissait au plus haut point, nous avait-il dit l’automne dernier.

Hier, après avoir évoqué le long règne de James Levine, Peter Gelb a ajouté qu’il souhaitait que la lune de miel de Yannick Nézet-Séguin avec l’orchestre du Met dure également 40 ans.

L’Orchestre de Philadelphie – l’un des Big Five américains – a profité lui aussi de la journée d’hier pour annoncer qu’il prolongeait le contrat le liant à Nézet-Séguin jusqu’en 2025-2026. La proximité entre New York et Philadelphie facilitera la tâche du maestro et les deux orchestres exploreront même des possibilités de collaboration artistique, a fait savoir le Metropolitan Opera dans un communiqué.

La nouvelle d’hier a également été bien accueillie à l’Orchestre Métropolitain auquel Yannick Nézet-Séguin est lié jusqu’en 2021.

« Il se rapproche de Montréal et c’est un avantage pour nous ! a dit à La Presse le président-directeur général de l’OM, Jean R. Dupré. Il a toujours été loyal envers l’OM et l’a amené à un niveau inégalé au cours des dernières années. »

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