La femme aux cartes postales

Des nouvelles de Jean-Paul Eid !

Jérôme Bigras peut se reposer tranquillement dans sa banlieue. Le bédéiste Jean-Paul Eid prend une pause de son célèbre antihéros pour faire une virée en ville ! Ces jours-ci, il lance son premier roman graphique : La femme aux cartes postales, qui nous plonge dans le Montréal des années 50 et ses clubs de jazz. Un livre publié aux éditions La Pastèque, qui sera en librairie le 12 avril.

La femme aux cartes postales

La genèse

Dix ans. C’est le temps qu’ont mis Jean-Paul Eid et le scénariste Claude Paiement pour accoucher de ce premier roman graphique. Le duo qui a créé la série Le naufragé de Memoria voulait explorer le thème de l’identité, mais aussi la part de hasard dans ce qui semble parfois être écrit d’avance. « Au départ, il était question d’une maison qui recèle des secrets », nous disent les auteurs de La femme aux cartes postales. Le tandem a visité la maison Brunet du Cap-Saint-Jacques, qui leur a servi de modèle pour représenter la maison de la famille Grenier en Gaspésie. Après avoir détaillé les personnages principaux du roman graphique, auxquels s’ajoutent des figures connues du showbizz québécois comme Claude Blanchard, Léo Rivest ou le travesti Jean Guilda, l’histoire en deux temps a pris forme.

La femme aux cartes postales

Les clubs de jazz

Pas question d’improviser pour représenter les clubs de jazz des années 50. Jean-Paul Eid et Claude Paiement ont multiplié les recherches pour être le plus près de la réalité. Casa Loma, Hot Jazz, Maroon, Rockheads, Midway sont tous représentés. Rose Grenier, qui prend le nom de scène de Rosie Rainbow, formera un trio avec son ami Roméo (surnommé Lefty) et le trompettiste Art McPhee, qui épousera Rose. Ils iront même chanter à Cuba, à la fin du règne de Batista. C’est là que le drame de La Femme aux cartes postales se jouera. Jean-Paul Eid avoue être « tombé amoureux » de son sujet. « Pendant que je dessinais, j’écoutais Chet Baker, Miles Davis, tout le cool jazz de cette époque-là. Ça m’a permis de créer les atmosphères que je voulais. »

La femme aux cartes postales

Prochaine étape : le film ?

Dès le début de ce projet, Jean-Paul Eid et Claude Paiement ont imaginé l’histoire de La femme aux cartes postales à la manière d’un scénario de film. La bande dessinée est en fait le story-board du film à venir, espèrent-ils. Évidemment, rien n’a encore été prévu, mais tous les espoirs sont permis. « Cette bédé a été conçue de manière très cinématographique, indique Jean-Paul Eid. On a imaginé des mouvements de caméras, des éclairages, une mise en scène… Il y a aussi des pages silencieuses, où la caméra se promène pour ainsi dire. À partir du moment où tu installes ce rythme-là, le roman graphique s’épaissit et l’histoire s’enrichit d’émotions. Donc oui, j’espère que ce sera adapté au grand écran. »

La femme aux cartes postales

Montréal au centre

Le Montréal des années 50 est abondamment représenté dans La femme aux cartes postales. Outre les clubs de jazz de l’époque, on peut y voir le réputé restaurant de smoked meat Ben’s, le magasin Dupuis et frères et même les tramways de l’époque. « Les scènes se sont construites autour de photos d’archives, nous dit Jean-Paul Eid. C’est comme si mes personnages rentraient dans ces photos d’époque. » La vie nocturne montréalaise y est également bien documentée. « Il y avait des spectacles de variétés, qui étaient plus francophones, et les clubs de jazz, qui étaient plus anglophones, nous dit le bédéiste. D’imaginer que dans cette même ville, Miles David, qui se produisait dans ces clubs, aurait pu croiser La Poune dans l’escalier, c’est quand même inspirant. »

La femme aux cartes postales

La trame sonore

Au lieu d’inventer les paroles des chansons entonnées par le personnage de Rosie Rainbow, Jean-Paul Eid a demandé à l’auteur-compositeur-interprète Thomas Hellman d’écrire une chanson. C’est ainsi que la pièce Two Little Birds a vu le jour. Une pièce chantée par Fanny Bloom qui sera disponible sur un 45-tours en vinyle ! « Entendre chanter le personnage principal de sa bédé, c’est quand même magique », lance Jean-Paul Eid. Sur la face B du disque publié par Dare to Care, Fanny Bloom interprétera un classique du jazz de cette époque : Lullaby of Birdland, de George Shearing. La pochette de l’album, elle, a été illustrée par Pascal Blanchet.

La femme aux cartes postales

Une double intrigue

Deux intrigues s’entrelacent dans cette histoire que nous racontent Jean-Paul Eid et Claude Paiement. D’abord celle de Rose Grenier qui, dans les années 50, quitte son village de Sainte-Émilie de Caplan pour chanter dans les clubs de jazz de Montréal. La jeune femme y rejoint un ami de son village natal, Roméo, pianiste doué parti quelques années plus tôt vivre à Montréal. Puis celle de Victor Weiss, réputé anthropologue né de parents inconnus, qui découvre l’existence d’un frère jumeau mort dans l’effondrement des tours jumelles le 11 septembre 2001. Les deux histoires se superposent jusqu’à ce que le hasard fasse qu’elles se rejoignent. Deux histoires marquées par des fins de cycle, dont la fin de l’âge d’or des clubs de jazz.

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