Du lait maternel en souvenir

L’idée est d’emblée surprenante, voire choquante pour certains, mais elle suscite énormément d’intérêt et de curiosité. Cette pratique inusitée, qui consiste à créer des bijoux à partir d’échantillons de lait maternel, a connu une popularité grandissante au cours des dernières années. Si les États-Unis et l’Australie ont été les pionniers dans le domaine, certains de ces bijoux sont maintenant fabriqués chez nous, depuis qu’une Québécoise établie en Colombie-Britannique a sauté dans le train.

Karine Lajoie fabriquait déjà toutes sortes de bijoux qu’elle vendait sur son site internet, La joie en rose. Mais un beau jour, en surfant sur les réseaux sociaux, elle a eu vent de ces bijoux fabriqués avec du lait maternel, et cela a piqué sa curiosité.

« Ça m’a tout de suite interpellée et j’ai décidé de faire des recherches », lance la jeune femme, jointe au téléphone en Colombie-Britannique où elle vit avec son mari depuis quelques années. J’ai passé des mois à développer mon processus. Chaque créateur a sa recette spéciale. »

Au début de l’année 2017, Karine Lajoie était prête à lancer son site. Immédiatement, elle a reçu une avalanche de commentaires. « Ce n’était pas très connu au Québec, souligne celle qui est originaire de Sept-Îles. Donc, ça a fait un raz-de-marée de curiosité, d’étonnement et j’ai reçu des centaines de messages. »

Un processus chimique

Comment figer du lait maternel en un bijou ? La substance doit d’abord passer à travers différents processus : solidification (ébullition et ajout de solvants), préservation et enfin, séchage. Karine Lajoie est ensuite prête à travailler la matière nouvellement solide en y ajoutant de la résine. « La résine va solidifier davantage le bijou, pour qu’il se garde encore plus longtemps », note-t-elle. Une fois terminée, la perle de lait est prête à être installée sur le support précédemment choisi par la cliente : bague, pendentif, paire de boucles d’oreilles…

L’opération ne demande qu’une petite quantité de lait (pas plus de 1 oz). Les mamans québécoises peuvent faire parvenir leur échantillon en toute sécurité à l’autre bout du pays, assure Karine Lajoie, puisqu’elle fournit une enveloppe prépayée et préadressée, ainsi que les sacs de lait maternel pour le transport.

« Avec les sacs de lait maternel, il n’y a aucun risque que ça se brise par la poste, contrairement aux sacs Ziploc ou aux petits pots de pilules qui peuvent se fissurer avec la condensation », soutient Mme Lajoie. Également, elle précise que le lait ne se perdra pas, pas plus qu’il ne tournera, grâce simplement à ses propriétés naturelles. « Et puisqu’il n’est pas destiné à la consommation, il n’y a pas d’inquiétude à avoir. »

Pourquoi vouloir garder un « morceau » d’allaitement ? « Ça donne un souvenir tangible du lien qui s’est créé entre la mère et l’enfant, avance Karine Lajoie. Pour certaines mamans, l’expérience d’allaitement peut avoir été soit difficile, soit merveilleuse… Dans chaque cas, le bijou va vraiment rappeler le moment passé à allaiter. »

C’est le cas de Cynthia Pouliot, qui a récemment fait faire un bijou de lait maternel par l’entremise de La joie en rose. « Ça m’a aidée à faire le « deuil » de mon allaitement, car j’en garde une petite partie avec moi tout le temps », estime-t-elle.

Ailleurs dans le monde, certaines entreprises proposent même des ensembles de DIY (Do It Yourself) pour que les mères fabriquent elles-mêmes leurs bijoux avec leur lait. D’autres artisans conçoivent également des bijoux avec des cheveux, du placenta et des cordons ombilicaux. Et, bien que l’idée parte de la naissance, elle se rend aussi à l’opposé du cycle de la vie : on peut également faire fabriquer un bijou avec les cendres de l’être aimé.

Ailleurs dans le monde

Voici quelques-unes des entreprises qui fabriquent des bijoux avec du lait maternel (et autres échantillons d’ADN…).

Sacred Legacy Arts (États-Unis)

JoBri Milk Charms (États-Unis)

Beyond The Willow Tree (Australie)

Warm Vibess (Conception Bay South, Terre-Neuve)