Hockey

Partir gagner en France

OLIVIER LABELLE

Le 26 mars dernier, les Dragons de Rouen ont conclu une saison quasi parfaite en remportant les séries en France. Parmi les sept Québécois de l’équipe, Olivier Labelle a pu soulever la Coupe Magnus. Gagner, c’est gagner, même loin de la Ligue nationale.

Alors qu’il grandissait à Saint-Eustache, Olivier Labelle rêvait de jouer pour le Canadien. La couronne nord de Montréal est un territoire bleu-blanc-rouge de bord en bord. « Je pense que j’avais un mononcle qui prenait pour les Nordiques, mais c’était vraiment une exception. »

Olivier Labelle a tout fait pour réaliser son rêve. Il a joué quatre saisons dans la LHJMQ. Lors de ses deux premières, à 17 et 18 ans, il a gagné deux fois la Coupe du Président avec les Olympiques de Gatineau. Sous les ordres de Benoît Groulx, il apprenait à savourer la victoire. Il ne savait pas qu’il ne gagnerait plus de championnat pendant plus de 10 ans après.

« Quand tu gagnes à 17 ans, tu finis par penser que c’est facile et que ça va souvent arriver dans ta carrière. Mais finalement, après 10 années pro, je n’avais rien gagné », raconte Labelle, joint en France.

Ce n’était pas la seule déception à venir pour lui. L’ailier droit n’a pas été repêché dans la Ligue nationale. En 2006 ont commencé six années dans les ligues mineures nord-américaines, à tenter de se faire un nom, à prendre des autocars entre les villes de l’ECHL, à espérer se faire une place dans la Ligue américaine, à attendre un appel « d’en haut »… L’appel n’est finalement jamais venu.

« J’ai toujours été persévérant. J’ai fait tout ce que je pouvais pour atteindre mon but, la Ligue nationale. Je restais confiant, raconte Olivier Labelle. Je voyais des gars monter et je me disais : pourquoi lui et pas moi ? Mais en même temps, il faut réaliser que ce n’est pas arrivé et que ça n’arrivera pas. »

Quand il a compris que son rêve d’enfance n’allait pas se réaliser, Labelle a décidé de partir en Europe, en Autriche d’abord. Puis cette saison, il a abouti chez les Dragons de Rouen, l’une des meilleures équipes du championnat français.

Il a trouvé à Rouen une ville où le hockey est bien vivant.

« L’aréna de 3000 places est souvent [bondé], ou sinon, pas bien loin. Ça chante, ça crie dans les gradins. »

— Olivier Labelle

Il a aussi trouvé une petite bande d’expatriés du hockey, dont six autres Québécois : le gardien Dany Sabourin, les défenseurs Patrick Coulombe et Olivier Dame-Malka et les attaquants François-Pierre Guénette, Joël Perrault et Marc-André Thinel.

« J’étais avec une bonne gang de gars et une chance parce que j’aurais trouvé le temps long. Ma blonde, qui est Américaine, ne m’a pas suivi cette année. Il y avait pas mal de Québécois, d’étrangers et pas mal de gars avec une expérience de la LNH. »

PAS DE REGRET

Sa saison à Rouen a été presque parfaite. Les Dragons ont presque tout gagné ce qu’il y a à gagner en France. Lors des séries finales, ils ont éliminé les Ducs d’Angers en quatre matchs. Lors du dernier, Labelle a marqué deux buts et été nommé joueur du match.

À 30 ans, après des années dans les mineures sans rien gagner, Labelle a retrouvé le sentiment qu’il avait eu à 17 ans. Au bout du fil, il parle de sa saison avec passion. Maintenant sans contrat, il espère s’entendre de nouveau avec Rouen pour une ou plusieurs saisons de plus.

« L’année prochaine, on a accès à la Champion’s League, dont ça va être le fun. J’espère qu’ils vont essayer de garder notre noyau de joueurs intact. J’ai hâte de voir comment on se compare à la Suisse, à la Suède, à l’Allemagne… »

« Je trouve que la réputation de la ligue française n’est pas à la hauteur de la réalité. Même moi, avant de venir ici, j’étais sceptique. Mais il y a du très beau hockey qui se joue ici. »

— Olivier Labelle

En rétrospective, regrette-t-il d’être resté aussi longtemps dans l’ECHL ? « Avec le recul, c’est facile de dire que j’aurais pu partir en Europe plus tôt. Mais quand tu évolues dans ce monde-là, tu ne penses qu’à une chose, te rendre à la Ligue nationale et vivre ton rêve. Je n’ai pas de regret. »

« Je n’ai pas joué dans la Ligue nationale, c’est sûr. Mais j’ai 30 ans et je joue au hockey dans la vie, je ne suis pas à plaindre. Ça va durer le temps que ça va durer. Je ne me verrais pas faire autre chose tant que mon corps va me le permettre. Je joue à un jeu dans la vie, c’est un beau métier. »

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