Plein air

La glace cède... que faire ?

Cela fait deux nuits que la température chute en bas de - 25 °C. Le lac semble bien gelé. Et pourtant, la glace se disloque sous les skis du jeune homme au moment où il quitte le plan d’eau pour s’engager sur la berge. Heureusement, seul l’arrière des skis fait trempette, et le skieur se réfugie sur la terre ferme. L’incident, même s’il est sans conséquence, fait réfléchir. Que faire si on tombe à l’eau en plein hiver ?

L’important, c’est de ne pas paniquer. C’est plus facile à dire qu’à faire. La bonne nouvelle, c’est qu’on dispose de plusieurs minutes pour se calmer.

« La phase initiale, le choc thermique, dure de trois à quatre minutes », indique le Dr Marc Gosselin, directeur médical chez Sirius Secourisme en régions isolées. « Le corps se met en alerte. » La respiration devient haletante, la personne se met à faire de l’hyperventilation. Les vaisseaux sanguins se contractent, la pression artérielle augmente, le débit cardiaque augmente aussi. 

« Théoriquement, ça peut provoquer des effets graves au niveau cardiaque, mais en général, on ne meurt pas du choc thermique. »

— Le Dr Marc Gosselin

Le réel danger, c’est la noyade. Par exemple, si la respiration haletante entraîne une inhalation d’eau. « Si on ne peut pas affronter de façon calme cette situation, on peut se noyer, note le Dr Gosselin. Le choc thermique est une partie difficile, mais il ne dure pas longtemps. Après trois ou quatre minutes, tout se replace, le corps atteint un état d’équilibre. »

Comment s’en sortir ?

Il faut alors passer à la deuxième phase : se sortir de ce mauvais pas. « On entre alors dans une course contre la montre parce qu’à chaque minute, on perd de l’énergie. »

Le nombre de minutes dont on dispose varie selon divers facteurs. Ce qu’on porte, par exemple. Un habit de motoneige, de grosses bottes lourdes, ça risque de gruger plus d’énergie que des vêtements plus légers ou qui s’imbibent moins. On a quand même plusieurs minutes pour passer à l’action.

« On suggère de revenir vers l’endroit où ça a brisé, indique le Dr Gosselin. Théoriquement, la glace jusqu’à cet endroit était solide parce qu’elle nous a portés. »

Il faut se mettre à l’horizontale et battre des jambes pour se hisser sur la glace. La Société de sauvetage recommande d’utiliser tout objet pointu qu’on peut avoir sous la main, comme des clés ou un stylo. Sinon, il faut simplement mettre les mains et les bras sur la glace et se hisser avec de grands coups de pied dans l’eau.

Une fois sur la glace, il ne faut surtout pas se relever. 

« Il faut rester couché et ramper le plus loin possible, dans une zone sécuritaire. Il faut faire un peu comme un phoque sur la banquise. »

— Le Dr Marc Gosselin

Si on n’arrive pas à sortir de l’eau, il faut quand même se hisser au maximum sur la glace afin de minimiser la perte de chaleur. Les vêtements mouillés pourraient geler sur la glace et ainsi empêcher une victime qui perd conscience de glisser à l’eau.

Si quelqu’un d’autre tombe à l’eau, il ne faut surtout pas jouer au héros et s’avancer sur la glace mince. « Les précautions de secourisme de base sont importantes, rappelle le Dr Gosselin. Il ne faut pas tomber à l’eau à son tour. »

La Société de sauvetage recommande de se placer dans un endroit sûr, de se retenir sur un objet solide et de lancer à la victime une corde en y attachant, si possible, un objet flottant.

Et une fois hors de l’eau ?

Tout danger n’est pas écarté une fois que la personne est sur la terre ferme. Si elle n’a passé que quelques minutes dans l’eau, si elle est alerte et peu engourdie, il faut qu’elle s’active. Si un abri se trouve à moins de 30 minutes, il faut se mettre en marche, recommande la Société de sauvetage. Sinon, il faut mettre des vêtements secs, s’ils sont disponibles, ou enlever les vêtements mouillés, les tordre pour faire sortir le maximum d’eau et les remettre. On peut aussi faire un feu, s’il faut attendre sur place, tout en continuant à bouger, mais sans s’épuiser.

Si la personne a passé plus de temps dans l’eau, qu’elle est hypothermique, il faut faire attention à deux phénomènes, dont la « pince hydrostatique » (hydrostatic squeeze). « Si on sort quelqu’un de l’eau rapidement, ça peut entraîner une baisse de pression rapide : la personne va subitement s’affaisser, indique le Dr Gosselin. Ce n’est pas le temps de l’asseoir et la lever, il faut qu’elle reste couchée. »

L’autre phénomène est l’after drop, soit une aggravation de l’hypothermie. « Si la personne se met à s’activer subitement, ça va rapidement amener le sang froid de la périphérie vers le centre. Paradoxalement, cela va abaisser sa température, note le Dr Gosselin. S’il y a des signes importants d’hypothermie, il faut éviter que la personne ne marche, avant de la mettre dans un environnement où elle peut se réchauffer, comme une ambulance ou un chalet. »

Évidemment, la meilleure façon d’éviter ces problèmes, c’est de faire preuve de prudence sur les cours d’eau. Même s’il fait très froid, il peut y avoir des endroits où la glace est mince : là où il y a du courant, par exemple, ou là où un cours d’eau fait son entrée dans un lac. « C’est toujours important de connaître les plans d’eau où vous embarquez, surtout en début d’hiver et au printemps, indique le Dr Gosselin. Il faut s’informer. »

Vidéo de la semaine

Ski de nuit à Chamonix

Un peu après minuit, des skieurs quittent l’Aiguille du Midi pour descendre à Chamonix.

Chiffre de la semaine

1 tonne métrique

C’est le poids du matériel qu’utilise une équipe de 11 alpinistes polonais qui tente présentement d’accomplir la première ascension hivernale du K2.

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