COURRIER « QUE LES MÉDECINS RESPECTENT LE CHOIX DES MOURANTS »

Oui

Respect

Quel beau plaidoyer pour le respect et la dignité humaine fait par le Dr Naud. J’espère, si besoin est, avoir à mes côtés un médecin tel que vous pour m’assister en fin de vie. Mes respects.

— Diane Bélanger

Je partage votre opinion

Je voudrais simplement vous dire que je partage entièrement cette opinion. J’ai œuvré en soins palliatifs pendant 20 ans et mon expérience personnelle est en accord avec cette vision.

— Gilles Lalonde, médecin, Laval

Éviter une fin de vie atroce

C’est beau de dire que l’aide médicale à mourir (AMM) est disponible au Québec. J’ai vécu avec un proche une situation qui m’a laissé croire que l’opinion, les croyances ou tout simplement la non-volonté du médecin sont plus importantes que la volonté du malade.

Quand tu es atteint d’un cancer incurable à 83 ans et condamné à mourir dans un lit de soins palliatifs, l’AMM devrait être accessible avec un minimum de règles. Pourtant, mon beau-père est demeuré tout près de quatre mois dans une maison de soins palliatifs sans qu’on lui accorde l’AMM. Une fin de vie atroce. Après sa mort, j’ai conclu que la religion imprégnée dans la maison de soins palliatifs avait conditionné les choix des soignants. Est-ce normal en 2017 ?

— Yves Bolduc

Sensé et empathique

Quel réconfort de constater que s’élèvent des voix de médecins sensés et empathiques comme le Dr Naud !

La gestion des dernières années de la vie comporte suffisamment de défis de toute nature sans y ajouter le stress pour le mourant de ne pas être certain de pouvoir compter sur le corps médical pour une décision de fin de vie prise de façon éclairée.

— Jean Tousignant, Gatineau

Seul face à la mort

Vous avez raison. Je ne donne le droit à personne de décider comment et quand je vais mourir. Je serai seul face à la mort et personne n’a le droit de m’imposer ses convictions.

— François Colbert

Tirer sa révérence dans la dignité

J’aimerais que l’AMM soit aussi offerte à toute personne âgée qui souhaite mettre fin à ses jours simplement parce qu’elle n’a plus de qualité de vie. J’aimerais bien que la portée soit élargie dans le futur, car je vois ma mère âgée de 93 ans, assise dans son fauteuil toute la journée, qui a besoin d’aide pour son hygiène, les toilettes, les repas, etc. Ce n’est plus une vie, ça ! Elle aimerait bien mourir, mais elle n’est pas malade. J’espère avoir le choix de tirer ma révérence en toute dignité si je me retrouve ainsi dans plusieurs années.

— Christiane Marcotte

Que faire ?

Ayant eu déjà deux cancers, je sais que le troisième sera fatal. Mon choix est fait pour l’AMM, mais, comme patiente hospitalisée, comment pourrai-je savoir que le médecin qui est responsable de moi est contre l’AMM ? Et comment mon mari pourra faire pour que j’aie la possibilité d’avoir un médecin qui répond à ma demande ? Je suis certaine que je ne suis pas la seule à me poser la question.

— Marianne Leclere Leblanc

Le libre choix

Tout à fait d’accord avec le Dr Alain Naud. Pendant cinq ans, j’ai fait de l’accompagnement en oncologie à l’hôpital Notre-Dame et j’ai vu la souffrance et le dilemme qui touchaient tant les patients que leurs proches. Aujourd’hui, heureusement, l’AMM donne l’occasion d’arrêter de souffrir à ceux qui souhaitent y avoir accès. Si la situation se présente, je serai, en toute lucidité, volontaire tout en étant conscient de l’inévitable peine que je causerai à mes proches. Les biens-pensants ne sont pas concernés. Donc le libre-choix revient à celui qui peut avoir accès à cette aide. Trop facile de donner des opinions lorsque l’on n’est pas concerné.

— Jean-Marie Dumesnil, 73 ans

Des situations déplorables

À deux reprises, j’ai vu un proche agoniser misérablement en mourant de faim et de soif pendant trois semaines. Ce n’était pas moins qu’un acte létal plutôt lâche, mais qui n’était que la seule option médicalement acceptée à l’époque. Heureusement pour eux, ils avaient prévu un testament biologique leur évitant le gavage et un acharnement thérapeutique aussi long et pénible qu’inutile.

Mais dans un autre cas, on a dû menacer d’aller en cour avec le testament pour éviter l’acharnement thérapeutique dans un hôpital universitaire où les traitements pour garder en vie (seulement un peu plus longtemps) cette personne âgée lourdement handicapée, très malade depuis plusieurs années et souffrante, nous semblaient plus expérimentaux que palliatifs. Paraîtrait que si elle ne mangeait plus (après un ACV, d’innombrables affections, maladies incurables et fractures dorsales), c’est qu’en plus, elle souffrait d’une dépression sévère. Je vous laisse deviner ce que je pense de ce dernier diagnostic.

— Micheline Renaud

L’aptitude du patient à consentir

Je suis parfaitement d’accord. Tous les patients qui demandent l’AMM ont la même structure de pensée et veulent pouvoir garder le contrôle des soins qu’ils reçoivent et refusent de partir dans des conditions qu’ils jugent non tolérables ou dégradantes. La question de l’aptitude du patient à consentir à ce soin jusqu’avant l’injection est primordiale, cependant, et doit rester dans les exigences à pouvoir recevoir ce soin. La règle des 10 jours fait actuellement souffrir les patients plus longtemps et ne devrait pas limiter l’accès à ce soin. La clinique devrait être primordiale dans tous ces cas.

— Claude Rivard, médecin

COURRIER « QUE LES MÉDECINS RESPECTENT LE CHOIX DES MOURANTS »

Non

Une porte ouverte vers autre chose

J’accompagne des patients en fin de vie depuis 33 ans et je ne n’administrerai pas ce qu’on appelle l’aide médicale à mourir (AMM) par conviction non religieuse. Je ne m’opposerai pas quand un patient va faire cette demande. Je vais le diriger aussitôt vers un confrère ou une consœur. Par contre, je ne me reconnais pas dans le portrait du médecin décrit par Dr Naud. Ce que je fais, c’est tout faire pour que le patient n’ait pas à faire cette demande. L’AMM est une porte ouverte vers autre chose que je crains.

— Gilles Labrecque, médecin

Soins palliatifs

Quand vous dites que les médecins qui sont contre l’AMM sont des médecins qui n’ont pas de contact avec des patients en fin de vie, je vous ferais remarquer que ce sont justement les médecins de soins palliatifs qui se sont prononcés contre l’AMM au Québec.

— Agathe Blanchette

Une croyance et non un savoir

Malgré l’ignorance où nous sommes tous devant la mort, beaucoup croient que donner la mort fait cesser la souffrance. Cette croyance est respectable et le geste est bien intentionné. Cependant, n’oublions pas que nous avons affaire à une croyance ici et non à un savoir.

Si une société valide une croyance, elle doit se garder de l’ériger au-dessus des autres. Les médecins et les patients qui ne partagent pas les croyances du Dr Naud ne méritent pas d’être insultés ou ostracisés.

— Dominique Garrel, médecin

« L’AMM est tout sauf une injection létale »

Cette phrase de Dr Naud est quand même étrange. Je crois qu’il faut respecter le sens commun. Une injection dont le contenu a été spécifiquement concocté pour provoquer la mort d’un individu qui la reçoit dans les cinq minutes qui suivent est nécessairement létale par définition, peu importe les intentions de l’injecteur et de l’injecté.

Les médecins sont des personnes qui peuvent avoir des opinions ou des croyances différentes des croyances des autres, et avoir aussi des attitudes variables dans leur façon d’accompagner leurs patients et de valoriser leur liberté. 

Mais ils ne sont pas des robots ou des idiots : l’AMM provoquera la mort dans les minutes qui suivent. Ce n’est pas rien. Sans devoir revenir sur le bien-fondé de ce geste, sur sa légalité ou sa légitimité, il faut admettre qu’encore aujourd’hui ce n’est pas un geste banal.

Même en Belgique et aux Pays-Bas où des lois permettent l’euthanasie (c’est le terme qu’on utilise là-bas pour ce qu’on nomme ici l’AMM) depuis plus de 20 ans, moins de 5 % des médecins acceptent de participer activement à ce type d’injection. Là-bas comme ici, il reste difficile de trouver des médecins volontaires pour pratiquer l’AMM. Ces milliers de professionnels qui refusent d’effectuer les injections (qui sont bien reconnues par tous là-bas comme létales) ne sont pas des êtres sans cœur, des exaltés religieux ou des ennemis de la liberté. Ce sont des personnes ordinaires, normales, ai-je envie d’ajouter.

Et pour les personnes ordinaires, pratiquer un geste qui fait que la personne devant soi meurt est difficile, très difficile. Faire cesser instantanément la vie d’une personne de cette façon demeurera toujours, malgré toutes nos lois et toutes nos justifications, un geste contre nature.

— Marc Beauchamp, médecin

Un geste grave

Je suis aussi médecin de famille et en soins palliatifs depuis plusieurs années. Mon opinion personnelle sur l’AMM n’a aucune importance dans ma pratique quotidienne. Le Dr Naud soulève des points importants dont il faut tenir compte.

Toutefois, j’aimerais souligner un élément crucial, trop souvent occulté quand on parle d’AMM. Un grand nombre de patients vus en soins palliatifs ont une peur commune : que ces soins palliatifs abrègent leurs jours. Je rassure quotidiennement depuis près de 15 ans des patients et des familles que ce n’est pas le cas.

C’est pourquoi j’ai choisi, comme les membres de mon équipe, de ne pas faire d’AMM dans ma pratique de soins palliatifs, sans jamais abandonner les patients dans leur cheminement. Le cas échéant, j’ai continué à suivre les patients, alors qu’une équipe différente a pris en charge les étapes menant à l’AMM. J’ai aussi assisté à quelques morts par AMM, à la demande de mes patients ou de leur famille. Un jour peut-être, les craintes tomberont et les soins évolueront. Mais, s’il vous plaît, n’oubliez pas tous ces patients, mourants eux aussi, qui ont peur…

Ainsi, je m’insurge encore d’un passage du texte du Dr Naud : « Certains médecins ne possèdent pas les qualités humaines ou les compétences professionnelles requises pour offrir ce soin à leurs malades. »

Dr Naud, il ne s’agit pas seulement de qualités humaines ou de compétences. Vous insultez ainsi nombre de médecins qui, bien au-delà de valeurs morales ou religieuses, ne se sentent tout simplement pas capables de prendre la décision de poser un geste d’AMM et de vivre avec le doute par la suite…

— Anne Bhéreur

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