QUÉBEC

L’extrême droite est « extrêmement » active, prévient le centre anti radicalisation

Les Québécois devraient cesser de se préoccuper exclusivement de l’islamisme et réaliser que d’autres formes d’extrémisme peuvent menacer leur sécurité, soutient le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence, de Montréal, au lendemain des révélations de La Presse sur la visibilité croissante d’une nébuleuse d’extrême droite.

Le groupe de chercheurs prépare d’ailleurs un rapport sur cette mouvance, dont la publication devrait survenir dans les prochains mois, avons-nous appris.

« Il y a un décalage entre l’attention qui est focalisée sur tout ce qui est islamisme radical, départ de jeunes Québécois vers la Syrie », alors qu’un certain nombre de groupes d’extrême droite « sont extrêmement actifs au Québec », estime Benjamin Ducol. Le politologue est responsable de l’équipe de recherche au sein du Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence.

Le centre a « autant d’intérêt » pour les deux sujets, dit-il.

« Si on s’intéresse juste à cette forme de radicalisation qu’est l’islamisme radical, on passe à côté d’autres formes de radicalisation qui existent dans la société québécoise et sur lesquelles il faut se pencher », a continué M. Ducol, en entrevue téléphonique.

« On a des jeunes qui se joignent à ces groupes-là. […] Certains peuvent arriver très, très près de commettre des actions extrêmement violentes. »

UNE NÉBULEUSE IDENTITAIRE

Hier, La Presse levait le voile sur les sorties de plus en plus visibles d’un groupe d’extrême droite de la Capitale-Nationale baptisé Atalante Québec. Le collectif – dont le rayonnement est difficile à mesurer mais qui semble réunir au moins quelques dizaines de personnes, selon des images – a filmé ses défilés dans les rues de Québec, une cérémonie religieuse sur les plaines d’Abraham et une distribution de denrées aux démunis (« les nôtres », pas « les étrangers »).

Le groupe a notamment passé un nœud coulant autour du cou d’un buste de Gandhi, sur la Grande Allée, avec une affiche clamant qu’« un pays de plusieurs cultures est un pays infirme », selon une photo.

La police de Québec dit « ouvrir l’œil » à ce sujet. « On a une unité de renseignements criminels qui fait de la collecte de données », a indiqué vendredi le porte-parole Étienne Doyon. « On est toujours à l’affût. »

Atalante Québec fait partie d’une nébuleuse identitaire qui réunit aussi le groupe skinhead Légitime Violence (qui reprend des chansons néonazies), la Fédération des Québécois de souche, ainsi que le groupe montréalais La Bannière noire.

Même si peu de crimes ont été associés à la mouvance d’extrême droite au Québec au cours des dernières années, « on a des actions qui peuvent être haineuses », selon Benjamin Ducol. Des évènements « qui ont un impact sur un certain nombre de nos concitoyens qui se sentent peut-être moins en sécurité ou qui se sentent ciblés ».

Reste que le rôle du Centre n’est pas de lutter directement contre ces groupes en amassant des informations précises concernant leurs membres ou leurs actions à venir, précise Benjamin Ducol.

« On n’est pas dans une logique de renseignement. On ne collecte pas le nom des personnes qui font partie des groupes : c’est un travail de policiers, c’est un travail de renseignement, a-t-il dit. Nous, ce qu’on fait, c’est suivre les tendances : quels sont les groupes présents au Québec ? Quels sont leurs discours ? Quel est leur modus operandi ? »

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