Arkansas

Pas d’avortement sans l’autorisation du géniteur

L’État américain de l’Arkansas a introduit une réforme concernant les avortements. Dès la fin du mois, les femmes désirant se faire avorter pourraient avoir besoin de l’autorisation du père du fœtus pour procéder. Des organisations de défense des droits de la personne ont déposé une poursuite pour empêcher l'État d'aller de l'avant.

Les femmes qui souhaitent obtenir un avortement en Arkansas risquent bientôt de ne plus pouvoir le faire sans l’autorisation de l’homme à l’origine de leur grossesse.

Les législateurs républicains de cet État conservateur ont introduit une réforme qui change la manière dont les restes fœtaux seront pris en charge.

Les cliniques pratiquant des avortements devaient traditionnellement s’entendre avec la patiente sur la manière de les traiter. Elles devront à partir de la fin du mois obtenir aussi le consentement du géniteur à ce sujet avant de procéder à l’interruption de la grossesse.

L’un des instigateurs de la réforme, Kim Hammer, maintient qu’il est nécessaire de permettre à l’individu concerné de jouer un rôle central sur ce plan. « Il était là au moment de la conception, alors il devrait être là à travers l’ensemble du processus », a-t-il déclaré.

« Si la loi entre en vigueur comme prévu, elle restreindra de manière marquée l’accès à l’avortement puisqu’elle donnera potentiellement un pouvoir de veto » au géniteur sur l’avortement lui-même, relève Elizabeth Nash, chercheuse du Guttmacher Institute, qui suit de près les initiatives législatives dans ce domaine.

Une poursuite déposée

Son inquiétude est partagée par l’American Civil Liberties Union (ACLU), qui décrit la mesure proposée comme une attaque « grotesque » contre les femmes et leur capacité de décider seule des suites à donner à une grossesse.

L’organisation de défense des droits de la personne, de concert avec le Center for Reproductive Rights et Planned Parenthood, a déposé une poursuite qui vise à empêcher l’État d’aller de l’avant.

La requête, qui doit être débattue aujourd’hui en cour, souligne que les délais nécessaires pour obtenir le consentement du géniteur vont entraîner des délais importants pour les femmes désirant un avortement. Et que la nécessité de le solliciter risque de convaincre nombre d’entre elles de renoncer à l’intervention.

Les groupes pro-choix tentent également de contester d’autres dispositions législatives récemment introduites par l’État, dont une mesure qui force les cliniques d’avortement à alerter la police pour toute intervention pratiquée sur des patientes de 17 ans et moins. Elle doit s’appliquer dans tous les cas, y compris ceux où le consentement parental a été accordé et où il n’y a aucune indication de crime ou d’abus.

Mme Nash, du Guttmacher Institute, relève que l’Arkansas est l’un des États qui a été le plus actif au cours des dernières années pour restreindre l’accès à l’avortement. Il est désormais considéré comme l’un des plus « hostiles » à cette pratique, avec le Texas et le Mississippi, note la chercheuse.

Beaucoup de propositions législatives

Talcott Camp, qui chapeaute la cause initiée par l’ACLU contre l’Arkansas, déplore qu’une décision de la Cour suprême ayant invalidé l’été dernier une loi texane visant à restreindre de manière draconienne l’accès à l’avortement par des moyens indirects n’ait pas suffi à calmer les efforts des législateurs pro-vie du pays.

Durant les trois premiers mois de l’année, plus de 400 propositions législatives visant à limiter l’accès à l’avortement ont été avancées à l’échelle des États-Unis, relève Mme Camp, qui s’inquiète notamment du « programme extrême » de la Maison-Blanche à ce sujet.

La nomination par le président Donald Trump d’un juge conservateur fait notamment espérer dans le camp pro-vie que le jugement historique Roe vs Wade protégeant le droit à l’avortement pourra à terme être infirmé.

Mme Nash note que les derniers développements politiques ont aussi amené plusieurs États à légiférer pour mieux protéger l’accès à l’avortement. « Il y a de l’action de part et d’autre », souligne-t-elle.

Nombre d’États américains balisant l’accès à l’avortement par des lois restrictives

43 limitent l’avortement au-delà d’un certain nombre de semaines de gestation

42 permettent à des établissements de santé de refuser d’offrir des avortements

11 interdisent aux compagnies d’assurances privées de couvrir les frais liés à un avortement

16 imposent que les femmes désirant un avortement soient informées, avant l’intervention, de son impact sur le fœtus et sur leur propre santé

Source : Guttmacher Institute

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.