À ma manière

Comment je libère des mains

Chaque semaine, une personnalité du milieu des affaires nous raconte dans ses mots une page de son histoire.

Qui ? : Samuel Bouchard est président de Robotiq et auteur du livre Lean Robotics : A guide to making robots work in your factory. L’entreprise fondée en 2008 conçoit des robots collaboratifs. Elle vient de lancer le logiciel Insights pour mesurer et optimiser l’efficacité des robots.

Quand les gens voient une pelle mécanique, personne ne dit : « Ah, merde ! On pourrait avoir 20 gars qui pellettent à la place ! » Mais avec l’intelligence artificielle et la robotique, la réaction est différente. Comme c’est proche de notre nature, les gens disent : « Oh… ça remplace un humain… »

Pourtant, l’humain n’est pas fait pour exécuter des tâches répétitives à longueur de journée. J’en sais quelque chose ! J’en ai moi-même fait l’expérience dans mes emplois d’étudiant. C’est peut-être pour ça que j’ai fait un doctorat en génie et que je suis en robotique.

Les robots peuvent faire les tâches répétitives et les employés peuvent contribuer à l’entreprise différemment. À certains endroits, ils programment le robot, font du contrôle de qualité et même de la vente.

Pour les postes non pourvus

Actuellement, le défi des entreprises manufacturières, c’est bien sûr de diminuer les coûts, mais c’est surtout de réussir à avoir de la main-d’œuvre. Trouver des machinistes, c’est difficile.

Le robot collaboratif n’est pas comme les premiers robots industriels qui ont été faits pour l’industrie automobile. Le robot n’est pas dans une cage. Il côtoie sans danger les employés et devient un outil pour eux.

De plus, on peut maintenant savoir quelle est la productivité du robot. Il y a quelques mois, c’était encore impossible. Si tu n’étais pas à côté lui, tu arrivais en faisant : « Ah non ! Ça fait une heure que mon robot ne travaille pas ! » On vient de lancer le logiciel Insights, connecté au robot, qui montre en temps réel sa productivité. Ça permet de mesurer le retour sur ton investissement et de comprendre comment améliorer les performances du robot.

95 % de ce qu’on fait, ici, chez Robotiq, on l’exporte. On se tape sur les cuisses et on est contents ! Sauf que ce qu’on exporte, c’est de la productivité ! Aujourd’hui, le plus gros acheteur de robots au monde, c’est la Chine. Ils ont compris que si tu es capable d’automatiser tes tâches, la composante main-d’œuvre de ton coût de fabrication disparaît. Et, à ce moment-là, qu’est-ce qui devient important ? La qualité et la proximité des clients.

Je constate que les entreprises québécoises et canadiennes sont frileuses d’aller chercher cette expertise-là.

les mêmes questions

Depuis la création de l’entreprise en 2008, j’entre dans les usines et je me questionne : « Quel produit pourrait-on faire qui serait utile dans toutes les usines ? » J’en suis arrivé à la conclusion que toutes les usines sont différentes, mais qu’on me pose toujours les mêmes questions, que ce soit le fabricant de brocheuses ou celui de satellites. « Est-ce que je peux mettre un robot là ? Comment est-ce que je peux mettre un robot là ? Combien ça coûte ? »

J’ai décidé d’écrire un livre dans lequel j’explique comment passer de l’idée d’avoir un robot dans l’usine à « Ça marche ! J’en ai un qui fonctionne ! » Le but, c’est que les entreprises soient capables de déployer de la robotique par elles-mêmes sans être dépendantes d’un intégrateur qui doit se déplacer chaque fois qu’il y a un petit changement dans la production.

De notre côté, on travaille à simplifier la technologie. On n’est pas encore rendu à ce que le robot soit aussi simple à programmer qu’un téléphone intelligent, mais on s’en va dans cette direction-là. Dans cinq ans, nos robots vont avoir une utilisation intuitive.

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