OPINION MOUVEMENT DESJARDINS

La gouvernance des Caisses manque de transparence

Les quelque 4 millions de membres des 300 Caisses populaires Desjardins du Québec reçoivent, ces jours-ci, une invitation pour assister le mois prochain à l’assemblée annuelle de leur Caisse.

Cette convocation n’est accompagnée d’aucune information sur les résultats de 2016, la liste des candidats à élire, etc. Au moment de l’assemblée, « les membres pourront prendre connaissance du rapport annuel », mentionne le formulaire standard préparé par la haute direction du Mouvement.

On invite les sociétaires à une période de questions avec les administrateurs et le conseil de surveillance sans fournir aucune information sur les résultats de 2016. L’assemblée déterminera la partie des excédents virée en ristournes, mais les membres n’ont aucune idée de la rentabilité des opérations.

Les personnes intéressées à siéger au conseil ont jusqu’à deux semaines avant l’assemblée pour soumettre leur candidature, mais seuls les membres du conseil auront la liste des candidats intéressés. Rappelons que la démocratie ne s’exerce pas que dans le geste de voter, mais dans l’information fournie avant l’assemblée et les débats et échanges antérieurs au vote.

Cette façon de faire ne va pas du tout dans le sens de la transparence des bonnes pratiques de gouvernance.

À notre connaissance, aucune autre institution financière en Amérique du Nord ne convoque ses actionnaires ou sociétaires sans auparavant mettre les états financiers et le rapport de la direction à leur disposition par la poste ou maintenant par l’internet.

Un appel au service des communications nous a amené une série d’arguments tarabiscotés pour expliquer cette situation incongrue : délais d’impression, réunion tardive du conseil pour approbation du bilan, etc. Or, Desjardins a publié le 27 février les résultats d’ensemble du Mouvement pour 2016 ; les chiffres des Caisses individuelles sont bel et bien disponibles.

Dans ce contexte, je n’assisterai pas à l’assemblée de la Caisse Pierre-Boucher à Longueuil.

J’aurais aimé soulever deux questions en m’inspirant des données de 2015 : 

1- Les frais élevés de gestion

Les activités de prêts et de dépôts reçus ont rapporté 17 millions, mais il en coûte plus de 20 millions pour la gestion de la Caisse. Il faut donc que les 99 employés poussent (peut-être comme à la TD) pour aller chercher des « autres revenus » (7 millions en 2015). On le sait, Desjardins fait face a un sérieux problème de frais d’exploitation pour améliorer sa compétitivité ; avec ses trois gros centres de services plein béton, la Caisse de Longueuil n’est pas le modèle d’une opération mince.

2 – Le faible niveau de ristourne et de retour à la communauté

L’excédent d’exploitation a presque touché les 10 millions en 2015, mais les sociétaires n’ont reçu que 395 000 $ en ristournes. Ajoutons un maigre 160 000 $ versé à la communauté, et on arrive à 555 000 $ retournés aux membres en 2015 (à peine 5,8 % des excédents).

À titre indicatif, les banques ne sont peut-être pas le modèle à suivre, mais leurs dividendes oscillent entre 40 et 50 % des profits. Les sociétaires se demandent pourquoi doit-on distraire plus de 9 millions vers les réserves déjà très élevées ? Desjardins a un ratio de réserves de plus de 60 % plus élevé que les banques ; pourquoi faut-il encore l’accroître ?

C’est ce type de questions que les sociétaires auraient voulu soulever le 10 avril prochain à Longueuil. Mais la Caisse ne donne pas aux sociétaires les outils pour exercer leur devoir coopératif. Dorimène et Alphonse ne seraient probablement pas d’accord avec cette façon de faire.

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