Football  Sasha Ghavami

Vingt-trois ans et agent de joueurs

Les exemples qui démontrent que le football québécois poursuit son ascension sont nombreux. Le succès des Carabins de l’Université de Montréal et du Rouge et Or de l’Université Laval au football universitaire et la forte représentation du Québec dans la Ligue canadienne en sont deux. La présence de jeunes joueurs comme Laurent Duvernay-Tardif et David Foucault dans la NFL en est un autre.

On voit de plus en plus de joueurs et même quelques entraîneurs issus de la province au football professionnel. Il y a maintenant un jeune homme qui est en train de se forger une place dans un autre aspect du sport, celui de la représentation de joueurs.

Sasha Ghavami est entré dans le monde du football par l’entremise de Duvernay-Tardif, son meilleur ami qui lui a demandé d’être son agent en juin 2013. Étudiant en droit, Ghavami a accepté. La représentation de joueurs l’intéressait depuis longtemps puisqu’il est un mordu de sport depuis l’enfance.

« Lorsque j’étais âgé de 9 ou 10 ans, je regardais les bulletins de sports en boucle. Même si j’avais déjà vu les faits saillants quatre ou cinq fois, je ne me tannais pas de les revoir. Tous les sports me passionnent », a raconté Ghavami, la semaine dernière.

« La majorité des agents sont des avocats de formation. Mais ce n’était pas nécessairement dans l’optique de devenir un agent que j’ai étudié en droit. J’aimais le métier et je savais que ça cadrait bien avec les choses que je voulais faire. » 

« Mon plan de carrière était d’être avocat, et je savais que ça m’aiderait si l’occasion d’être un agent se présentait. »

L’occasion s’est présentée plus tôt que ne le prévoyait celui qui est aujourd’hui âgé de 23 ans. « J’étais réaliste et je savais que c’est un milieu qui est très difficile à percer. Jamais je n’aurais cru être un agent à 22 ans. »

Puisque Duvernay-Tardif espérait obtenir une chance dans la NFL et que les agents qui représentent des joueurs dans la puissante ligue doivent détenir une maîtrise ou être avocat, Ghavami a cependant dû trouver un partenaire au sud de la frontière.

« Lorsque Laurent m’a engagé, je lui ai dit qu’on devait lui trouver un agent aux États-Unis. Il fallait trouver le moyen de le faire connaître auprès des gens de la NFL, et je n’avais pas encore de contacts dans ce milieu. J’ai alors communiqué avec l’agence A3 Athletics, qui avait déjà représenté l’ancien joueur canadien Vaughn Martin. Dès que je leur ai dit que Laurent jouait au Canada, j’ai senti qu’il y avait moins d’intérêt à l’autre bout du fil. Mais lorsque je leur ai donné les résultats de ses tests individuels, l’un des dirigeants de l’agence m’a rappelé trois minutes plus tard. »

DES CLIENTS AMÉRICAINS

A3 Athletics représente toutes sortes de joueurs, autant d’anciens premiers choix comme C.J. Spiller et Eric Berry que des joueurs beaucoup moins connus. Certains de ces joueurs pour qui ça ne fonctionne pas dans la NFL se tournent vers la LCF. Dans ces cas, l’agence demande à Ghavami de les représenter au Canada.

« Mon travail, c’est de leur trouver un contrat dans la LCF. Les exigences sont généralement moins grandes pour les joueurs américains car ils ne passent pas par le processus du repêchage », a expliqué Ghavami, qui représente une poignée de joueurs américains dans la LCF.

Au total, l’ancien étudiant de l’Université de Montréal a déjà plus d’une dizaine de joueurs dans son écurie, dont six Québécois qui espèrent être sélectionnés à l’occasion du repêchage de la Ligue canadienne, le 12 mai. Anthony Coady, Mikhaïl Davidson et Jean-Samuel Blanc, tous des Carabins, font partie du groupe. Jean-Christophe Beaulieu, des Alouettes, est également représenté par Ghavami.

Pour l’instant, sa clientèle ne provient que du football. Le hockey étant roi et maître au Québec, le jeune agent n’aimerait toutefois rien de mieux que de mettre un pied dans la porte de la LNH, ce qui n’est toutefois pas si simple.

« J’adore le hockey et j’aimerais obtenir une opportunité, mais c’est difficile. Les ligues professionnelles sont des milieux très fermés. » 

« Dans la LNH, il faut déjà avoir un joueur dans la ligue qui est prêt à signer avec toi afin d’être reconnu comme un agent. C’est un cercle vicieux, car il est évidemment très difficile de convaincre un joueur lorsqu’on n’a aucun autre client dans la ligue. »

Lorsque je lui ai demandé si son rêve était de devenir le prochain Pat Brisson, Ghavami n’a pas caché toute l’admiration qu’il a pour le célèbre agent. « J’adorerais pouvoir discuter avec lui ne serait-ce que pendant quelques minutes. J’ai toujours suivi sa carrière de près et j’ai énormément de respect pour lui. »

LA LCF, PAS UN TREMPLIN

Les salaires dans la LCF étant ce qu’ils sont, il va sans dire que Ghavami aimerait représenter des joueurs d’autres ligues professionnelles. Ayant terminé son barreau, il a d’ailleurs effectué sa demande officielle auprès de la NFL afin d’être un agent certifié. Cela dit, Ghavami assure que la LCF n’est pas qu’un simple tremplin.

« Je vais toujours représenter des joueurs de la Ligue canadienne. Il y a quelque chose de très honorable de voir des jeunes qui étudient à temps plein, qui doivent souvent travailler afin de soutenir leurs études et qui veulent jouer professionnellement pour des salaires qui sont généralement modestes. Je trouve ça impressionnant et valorisant. »

Ghavami ne peut prédire s’il fera carrière au Québec ou aux États-Unis. Il ne sait pas plus si l’essentiel de son travail sera le droit – il a ouvert un cabinet d’avocats avec un partenaire à L’Île-des-Sœurs il y a quelques mois – ou même les affaires. Il sait cependant une chose.

« Je ne veux pas faire un travail de 9 à 5 et je veux avoir plusieurs projets diversifiés. J’ai un ami qui est vétérinaire, et on parle d’ouvrir une clinique ensemble depuis des années. Je ne suis pas vétérinaire, mais je veux investir dans sa clinique », a donné comme exemple ce fils d’un père iranien et d’une mère égyptienne qui se sont rencontrés à l’Université McGill.

CHANGER L’IMAGE DES AGENTS

Après y avoir réfléchi pendant quelques secondes, Ghavami croit qu’il est plus jeune que tous les joueurs dont il est l’agent. « Ça devrait changer l’année prochaine », a-t-il cependant pris soin de souligner.

Malgré son jeune âge, Ghavami montre une maturité étonnante et ses valeurs sont bien définies. Après avoir discuté avec lui à quelques reprises au cours de la dernière année, il est assez clair que ce jeune homme connaîtra beaucoup de succès professionnellement.

Où se voit-il dans 10 ou 15 ans ?

« J’aimerais devenir une référence dans le monde des agents, du moins dans mon domaine, qui est actuellement le football. Mais j’aimerais également changer un peu l’image de ce métier. La réputation des agents n’est pas toujours bonne, et il y a sûrement certains acteurs qui y ont contribué. Pour ma part, je travaille toujours d’une façon honnête et intègre. Le succès et l’argent changent certaines personnes, mais je veux m’assurer que ce ne soit pas mon cas. »

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