Chronique

Sept pistes pour dégonfler l’impôt sur votre chalet

Gino a un beau problème. Il a mis son chalet à vendre cet été, chalet que son père lui avait vendu pour 10 000 $ il y a de cela 20 ans et qui vaut maintenant 100 000 $. Voilà un gain appréciable de 90 000 $. Évidemment, Gino voudrait payer le moins d’impôt possible.

Pour compliquer un peu les choses, Gino a acheté en 2011 une autre maison avec sa conjointe. Auparavant, ni l’un ni l’autre n’avaient été propriétaires d’une résidence.

– Est-ce qu’il est possible de déclarer que le chalet était notre résidence principale jusqu’en 2011 et ne payer de l’impôt que sur la différence entre la valeur du chalet en 2011 et le prix de vente ? me demande-t-il.

Non, désolée, ça ne fonctionne pas tout à fait comme cela !

– Alors, comment s’y prendre ? Qui consulter ? Un fiscaliste ou un autre professionnel ?

Un comptable ou planificateur financier aguerri devrait pouvoir répondre à ce genre de questions. Et ça vaut la peine de consulter un spécialiste qui s’y connaît, car il existe plusieurs astuces pour réduire la facture fiscale lorsqu’on vend son chalet ou qu’on le laisse à ses enfants. Ne lésinez pas, car une simple décision peut vous faire économiser plusieurs milliers de dollars.

Voyons voir de quoi il en retourne avec l’aide de Sylvain Chartier, expert-conseil à la Banque Nationale Gestion privée 1859.

1- L’EXEMPTION POUR RÉSIDENCE PRINCIPALE

Tout d’abord, il faut savoir que la résidence principale est à l’abri du fisc. Chaque famille a droit à une seule « résidence principale » exempte d’impôt. Il peut s’agir d’une maison en ville, d’un chalet, de la partie d’un plex habitée par les propriétaires ou même d’un condo en Floride. L’important, c’est que la famille y ait vécu une partie de l’année, ne serait-ce qu’une semaine.

Un bémol : dans certaines circonstances, la location du chalet peut empêcher de le désigner comme résidence principale.

Donc, si Gino et sa conjointe n’avaient pas d’autre résidence jusqu’en 2011, le couple pourrait certainement désigner le chalet comme résidence principale pour toutes ces années. Mais il y a peut-être mieux à faire.

2- LA RÈGLE DE 1982

Avant 1982, la loi permettait d’avoir une résidence principale par personne, plutôt qu’une seule par famille. Elles sont de plus en plus rares, mais les familles qui possèdent deux maisons depuis plus de 35 ans pourraient donc se prévaloir de cette règle. Si les conjoints possédaient chacun leur maison, ils pourraient utiliser l’exemption de résidence principale sur chacune des maisons pour les années antérieures à 1982.

Si les deux maisons étaient au nom du même conjoint, il y a moyen de s’en sortir en transférant l’une des résidences à l’autre conjoint… en suivant les conseils d’un bon fiscaliste.

3- LE CHOIX DE 1994

En 1994, le gouvernement a aboli l’exemption pour gain en capital de 100 000 $ à vie dont bénéficiait chaque Canadien. Par équité envers ceux qui ne l’avaient pas encore utilisée, on a permis aux propriétaires de cristalliser une partie du gain accumulé sur leur résidence secondaire, afin de mettre à l’abri de l’impôt jusqu’à 100 000 $ de gain.

Avez-vous fait ce choix ? À vérifier absolument. Vous pourriez économiser jusqu’à 25 000 $ d’impôts.

4- DÉDUIRE LES RÉNOVATIONS

Vous faites des rénovations ? Sachez que les frais (agrandissement, piscine, cabanon, etc.) permettent de réduire le gain en capital imposable, tout comme les frais de transaction (droit de mutation, frais de notaire, commission versée au courtier, etc.). Malheureusement, les gens qui construisent eux-mêmes ne peuvent pas inclure leur temps dans le calcul du coût.

Gardez précieusement vos factures, sinon vous allez payer de l’impôt sur le prix des travaux que vous avez réalisés.

Conservez toutes vos preuves, même s’il s’agit de votre résidence principale, même si vous n’avez qu’une seule maison. On ne sait jamais, vous pourriez en acheter une autre un jour. Puis les revendre. Et vous ne pouvez pas savoir d’avance laquelle de vos propriétés il sera le plus avantageux de désigner comme résidence principale.

5- CHOISIR LA « BONNE » RÉSIDENCE PRINCIPALE

La désignation de la résidence principale se fait dans sa déclaration de revenus l’année de la vente. Si vous possédez deux résidences, laquelle exempter ?

Pour trouver la réponse, il faut calculer le gain moyen par année de possession sur chacune des maisons. Attention, chaque année civile compte. Donc, pour Gino qui a été propriétaire du chalet de 1994 à 2014 (21 ans), il faut diviser le gain de 90 000 $ par 21, ce qui donne 4286 $.

Si le gain annuel moyen sur la maison qu’il a achetée en 2011 est beaucoup plus faible, il pourrait être judicieux d’utiliser l’exemption de résidence principale sur son chalet jusqu’en 2014. Ainsi, Gino ne paierait pas du tout d’impôt à la vente de son chalet. Par contre, si la maison s’est beaucoup appréciée depuis 2011, Gino pourrait garder une partie de l’exemption (2011-2014) pour l’utiliser lors de la vente de sa maison.

6- LA RÈGLE DU + 1

Mais il y a un petit truc pour étendre son exemption fiscale. Le fisc vous donne une année d’exemption en cadeau pour chaque maison. C’est la règle du + 1.

Pour établir le pourcentage du gain qu’on peut exempter d’impôt, il faut calculer le nombre d’années que la maison sera désignée comme résidence principale, ajouter un an, puis diviser le résultat par le nombre d’années de détention de la maison.

Pour exempter 100 % de son chalet, Gino pourrait donc le désigner comme résidence principale de 1994 à 2013, soit 20 ans. (20 + 1)/21 ans de détention = 100 % d’exemption.

La beauté de l’affaire, c’est que Gino pourrait ensuite exempter la moitié du gain sur sa maison en la désignant comme résidence principale pour 2014 : (1 an de désignation + 1)/4 ans de détention = 50 % du gain d’exempté. Magique !

Un bon planificateur pourra faire des simulations pour déterminer le nombre d’années de détention optimal.

7- LEGS OU DON AUX ENFANTS : GARE AU PIÈGE !

Certains parents veulent vendre le chalet familial à leurs enfants à prix d’aubaine. Ce faisant, ils risquent de payer l’impôt en double. Voici pourquoi.

Disons que vous voulez vendre 120 000 $ à vos enfants un chalet qui en vaut 200 000 $. Aux yeux du fisc, vous serez réputé en avoir disposé à sa juste valeur marchande (200 000 $) et vous devrez payer l’impôt sur le gain en capital (80 000 $).

Mais lorsque vos enfants vendront le chalet à leur tour, leur gain sera calculé en fonction du coût d’achat de 120 000 $. Autrement dit, la famille paiera l’impôt deux fois !

Si vous donnez le chalet à vos enfants, il n’y a pas de double imposition. La transaction se fera à la juste valeur marchande pour vous et pour eux. Vous seul paierez l’impôt sur le gain en capital.

Mais si vous n’avez pas l’argent pour payer cet impôt, il existe une solution mitoyenne : vendre une partie du chalet et donner l’autre partie.

Mais ce genre de stratégie comporte plusieurs défis. Notamment, il faut deux contrats notariés. Pour ne pas vous mettre les pieds dans le plat, demandez conseil à un fiscaliste.

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