Société

Pédaler à l’école

À l’école primaire Les Trois-Soleils de Laval, un local était libre. Rien de luxueux : une petite pièce attenante au gymnase, au sous-sol. Au lieu d’y entreposer des ballons, l’école a décidé d’y cultiver un grand projet, un coup de pédale à la fois.

Une douzaine de vélos stationnaires y ont été installés. Quand You Never Can Tell de Chuck Berry résonne dans les haut-parleurs et que l’enseignante Marie-Ève Lavertu encourage les enfants à pédaler, on en oublie (presque) les murs en panneaux bleu poudre.

« C’est cool, hein ? », s’exclame Marie-Ève Lavertu, encore essoufflée par l’entraînement. Avec l’autre enseignante de 6e année, elle anime trois séances de cardiovélo par semaine, le midi, depuis janvier.

« Comme on a une longue période de dîner qui dure 1 h 20 min, les élèves ont le temps de s’entraîner, puis de manger. »

— François Durand, directeur de l’école

Les 62 jeunes de 6e année – sans exception – y participent, en alternance. Les cyclistes cassent ensuite la croûte avec leur enseignante, en classe.

Défi : parcourir 106,5 km

« C’est bien, parce que c’est sportif et que ça nous garde en forme, témoigne Émilie Hubert, 11 ans. Ça nous encourage à faire notre 106,5 km de vélo. C’est quand même beaucoup… »

Qu’est-ce que ces 106,5 km de vélo ? C’est ce que pédaleront les élèves de 6e année des Trois-Soleils, le 17 mai, lors de la 5e édition du Défi vélo persévérance, encadré par de nombreux bénévoles. « On part de la gare de Labelle et on prend la piste du P’tit train du Nord jusqu’à la vieille gare de Saint-Jérôme », explique François Durand.

Encore là, tous les élèves prennent part à l’événement. « Cette année, nous avons deux élèves avec un TSA [trouble du spectre de l’autisme] et un élève diabétique qui font le Défi », souligne le directeur. Par le passé, un enfant l’a fait en vélo-girafe tiré par un adulte ; d’autres qui ne savaient pas rouler ont eu droit (au préalable !) à des cours d’initiation au vélo donnés par le personnel de l’école.

« On y arrive ensemble »

Déjà, l’automne dernier, les finissants des Trois-Soleils sont tous partis en randonnée jusqu’au sommet du mont Tremblant.

« On leur montre que même si c’est dur des bouts, on y arrive ensemble. »

— Marie-Ève Lavertu, enseignante

Si tout cela est possible, c’est notamment grâce à une subvention de la Fondation du Grand défi Pierre Lavoie. Les 12 vélos stationnaires – qui s’imbriquent les uns dans les autres, puisque le local utilisé sert aussi à des ateliers multimédias – ont coûté environ 9000 $.

L’appui des familles est aussi primordial. « Les parents participent, ils veulent que leur enfant réussisse, souligne Céline Blanchette, commissaire scolaire du quartier Sainte-Dorothée. Ça crée une belle chimie familiale. »

« Une des meilleures stratégies »

Le Défi vélo de l’école Les Trois-Soleils, « c’est une initiative qu’il faut encourager et mettre à l’avant-plan au Québec », estime Sylvain Turcotte, titulaire de la nouvelle Chaire de recherche Kino-Québec sur l’adoption d’un mode de vie physiquement actif en contexte scolaire. « Si on veut créer un environnement actif et que l’ensemble des intervenants participent en complémentarité avec l’éducateur physique, je pense que les enfants vont y gagner », observe-t-il. La vraie bonne idée de l’école de Laval est de préparer les élèves au Défi tout au long de l’année. « C’est une des meilleures stratégies », note Sylvain Turcotte, qui est professeur à la faculté des sciences de l’activité physique de l’Université de Sherbrooke. « On veut développer des habitudes de vie. »

Autre atout : l’accent est mis sur la distance à parcourir en groupe, pas sur les prouesses individuelles. « Si on propose des activités où on démocratise la pratique de l’activité physique, on ne se trompe pas, tranche l’expert. Ça risque d’avoir un effet beaucoup plus grand sur l’estime de soi et la motivation des jeunes qu’un défi trop compétitif. »

Des vélos à la bibliothèque

Qui dit bibliothèque dit calme. Tout un défi pour les jeunes qui ont besoin de bouger. Jusqu’à ce qu’arrivent les vélos-pupitres, des postes de lecture munis d’un pédalier silencieux. « L’utilisation du vélo-pupitre favorise la concentration durant la lecture, notamment chez les jeunes et les adultes qui souffrent d’un trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH), indique Linda Boutin, relationniste à la Ville de Montréal. C’est un service très populaire dans nos bibliothèques. » Aujourd’hui, 33 bibliothèques de Montréal offrent un total d’une soixantaine de vélos-pupitres. Deux modèles sont offerts : un petit pour les enfants de 3 à 7 ans et un plus grand pour les jeunes de 7 à 77 ans (comme les lecteurs de Tintin). Gros avantage : le casque n’est pas requis. À moins d’être vraiment grouillant…

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