Opinion

Veillons au développement des CPE

Ils permettent le développement optimal des tout-petits et contribuent à l’économie du Québec

L’Association québécoise des centres de la petite enfance présente aujourd’hui un mémoire devant la Commission des finances publiques sur les conséquences de la modulation des tarifs de garde.

Sur la seule base des coûts du système et d’une vision à court terme, certains seraient prêts à mettre en péril ce qui a pris des années à construire. Ils affirment que le Québec n’a plus les moyens de se payer tous ces programmes sociaux. Nous leur répondons que le Québec n’a surtout pas les moyens de ne pas investir dans un programme socialement et économiquement rentable pour tous les Québécois.

Les services de garde éducatifs à la petite enfance sont le premier maillon de notre système éducatif. Des études démontrent que ces services, lorsqu’ils sont de qualité, ont des impacts majeurs et durables sur le développement de nos enfants, particulièrement pour ceux provenant d’un milieu défavorisé. Certains experts, dont le Nobel d’économie James Heckman, affirment que les investissements dans des services de garde éducatifs de qualité rapportent entre 7 % et 10 %, un rendement très enviable qui découle des économies faites ultérieurement dans les services comme la santé, l’éducation et les services correctionnels.

Au Québec, ce sont les CPE, des entreprises sans but lucratif administrées par les parents, qui offrent le plus haut niveau de qualité et permettent le développement optimal des tout-petits, comme en témoigne une étude publiée en novembre 2014 de la Direction de santé publique (DSP) de l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal. Dans toutes les régions du Québec, nos enfants en CPE ont accès à un personnel des plus compétents, possédant les qualifications requises pour mettre en application un programme éducatif rigoureux, dans un environnement sécuritaire qui valorise l’implication des parents.

En plus de faire ses frais, le programme québécois de garde à tarif réduit est rentable pour le Québec. Le taux d’activité des femmes de 25 à 44 ans a bondi de 63 % à 75 % au Québec de 2004 à 2014 et il se situe encore au-dessus de la moyenne canadienne. Conséquence directe de cette contribution des femmes à notre économie, le PIB du Québec a grimpé de 1,7 %, ce qui représente plus de 5 milliards par année.

Faisant fi de ces données et reniant ses promesses, le gouvernement a imposé une taxe inéquitable aux seuls parents qui, par souci de qualité, choisissent de confier leur enfant à un service de garde éducatif subventionné. Et les parents ne sauront qu’en 2016 ce qu’il leur en coûtera. Cette hausse tarifaire, jointe aux compressions massives dans le réseau – un demi-milliard de dollars depuis 2006 —, menace fortement la qualité des services.

Chercher à freiner à tout prix l’investissement public en éducation préscolaire et augmenter sensiblement la contribution financière des jeunes familles de la classe moyenne est une terrible façon de préparer l’avenir de nos enfants.

Nous ne comprenons pas la stratégie gouvernementale qui consiste à pousser plus de jeunes familles vers les garderies commerciales non subventionnées qui n’arrivent pas à appliquer les mêmes normes de qualité que les CPE.

Les CPE, quoique perfectibles, ont fait leurs preuves. C’est pourquoi nous demandons au gouvernement d’accepter la main tendue du réseau des CPE et des services de garde subventionnés afin de mettre en place des solutions visant à optimiser leur financement et à permettre à plus d’enfants issus de milieux défavorisés d’y avoir accès. Nous souhaitons ainsi le développement de ces services de qualité qui permettent à la société de se développer dans une perspective d’égalité des chances, pour nous et pour nos enfants.

* Cette lettre est cosignée par les personnes suivantes (en ordre alphabétique) : Michèle Audette, militante autochtone, Nathalie Bigras et les chercheurs de l’équipe Qualité éducative des services de garde et petite enfance de l’UQAM, Camil Bouchard, psychologue, homme politique et blogueur, François Chagnon, professeur à l’UQAM, Marie-Ève Clément, PhD, professeure titulaire, Chaire de recherche du Canada sur la violence faite aux enfants de l’Université du Québec en Outaouais, Léa Clermont-Dion, co-initiatrice de la Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée, Gordon Cleveland, professeur d’économie à l’Université de Toronto, François Delorme, économiste et chargé de cours à l’Université de Sherbrooke, Martine Desjardins, consultante, conférencière et blogueuse, Gilles Fortin, pédiatre, professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et membre de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, Pierre Fortin, économiste, professeur émérite à l’UQAM et chroniqueur, Martha Friendly, directrice exécutive au Childcare Resource and Research Unit, Marie-Hélène Gagné, Ph. D., professeure titulaire à l’École de psychologie de l’Université Laval, Christa Japel, professeure à l’UQAM, Jane Jenson, professeure, titulaire de la Chaire de recherche en citoyenneté et gouvernance de l’Université de Montréal, Marie-Noëlle Hamelin, présidente fondatrice de BICOM Communications, Carl Lacharité, professeur titulaire en psychologie à l’Université du Québec à Rimouski, Aurélie Lanctôt, blogueuse et chroniqueuse, Catherine M. Lee, PhD, professeur à l’École de psychologie de l’Université d’Ottawa, Elsie Lefebvre, conseillère municipale, Ariane Moffatt, auteure, compositrice et interprète, Florence Marcil-Deneault, psychologue, Alain Noël, professeur titulaire en science politique à l’Université de Montréal, Yann Perreau, auteur, compositeur et interprète, Marie-Pier Veilleux, Geneviève Pettersen, écrivaine et chroniqueuse, ainsi que Louis Senécal, président-directeur général de l’Association québécoise des centres de la petite enfance.

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