Hockey  Entrevue avec bob Hartley

Quand les joueurs ont leur mot à dire

À sa première rencontre avec Brad Treliving à la suite de sa nomination au poste de DG des Flames de Calgary, l’entraîneur-chef Bob Hartley l’a fait sursauter.

« Je lui ai dit : “J’espère que tu n’aimes pas trop faire des changements, parce que je ne serais pas surpris si l’on faisait les séries avec cette gang-là” », a raconté Hartley en entrevue avec La Presse.

Alors si plusieurs s’attendaient à ce que les Flames mangent leur pain noir cette saison, ils ont plutôt atteint le deuxième tour des séries éliminatoires avant de s’incliner en cinq matchs devant les Ducks d’Anaheim.

L’écart entre les attentes mitigées et les résultats emballants explique que Hartley soit le favori pour remporter le titre d’entraîneur-chef de l’année – le gagnant sera connu le 24 juin à Las Vegas.

Mais aux yeux du principal intéressé, rien de tout cela ne relève du hasard ou de la surprise.

« Avec la progression de cette gang-là progresser dans la deuxième moitié de la saison précédente, je voyais de bonnes choses arriver, a-t-il expliqué. Avec un capitaine comme Mark Giordano et des jeunes qui travaillent comme des chiens, on ne peut pas faire autrement que de voir une amélioration. »

Ce n’est pas parce que Hartley est en nomination pour le trophée Jack-Adams pour la première fois de sa carrière qu’il estime avoir connu sa meilleure saison derrière un banc. Loin de là.

« J’échangerais volontiers cette nomination contre trois victoires de plus en fin de saison », ajoute-t-il d’ailleurs.

À L’ATTAQUE

À sa troisième saison à la barre de l’équipe, Hartley a mené les Flames à leur meilleur dossier depuis 2008-2009. Giordano et Jiri Hudler ont connu leur meilleure saison en carrière, Sean Monahan n’a pas été ennuyé par la guigne de la deuxième année et Johnny Gaudreau s’est avéré une recrue de premier plan.

Qu’est-ce qu’il y a donc derrière le succès de cette équipe ?

« Notre équipe commence avec [Mark] Giordano, c’est lui le moteur du club. J’ai une excellente relation avec lui. Je lui donne plusieurs responsabilités et il fait très bien ça. »

— Bob Hartley

« À partir de là, mes adjoints et moi, on essaie d’être proches des gars et de bâtir un système de jeu qu’ils vont aimer jouer et dans lequel ils vont pouvoir progresser. »

En effet, Hartley estime qu’il est capital que les joueurs aiment le système mis en application. C’est d’ailleurs abordé dans les rencontres du « comité hockey », un groupe de six ou sept joueurs créé au camp d’entraînement par Hartley et Giordano.

« Le comité hockey discute de la longueur des entraînements, des réunions, du système de jeu... Les joueurs ont leur mot à dire parce qu’en fin de compte, ce sont eux, les participants. Je peux leur dire un paquet de choses, mais ce sont eux qui vont changer les choses. S’ils aiment ce qu’on fait et qu’ils croient à ce qu’on fait, la moitié de la bataille est gagnée. »

L’entente entre le personnel d’entraîneurs et les joueurs a été de mettre en place une identité résolument axée sur l’attaque. Celle-ci implique les défenseurs peut-être plus que dans n’importe quelle autre équipe de la ligue.

« Marquer des buts n’a jamais été aussi difficile, rappelle Hartley. Il y a cinq gars sur la glace ; si tu ne donnes le feu vert qu’à trois d’entre eux, tu en as deux qui seront plus ou moins impliqués. À Calgary, on applique le “no fear”, on joue sans aucune peur. On a une structure et un système à respecter, mais on ne veut jamais rien protéger. On attaque toujours. C’est la culture qu’on a établie, et les gars aiment ça.

« Mais si un défenseur part à l’attaque, c’est sûr que ça prend un attaquant qui retraite, précise-t-il. On doit demeurer conscients du danger et s’assurer que ça ne devienne pas une parade de deux-contre-un pour l’autre club. »

ÉCOUTER… ET DÉCIDER

Au moment d’être nommé à la barre du Canadien, son ami Michel Therrien disait être un homme différent par rapport à ses expériences passées dans la LNH. Mais Hartley, qui a lui aussi patienté quelques années avant que les Flames ne lui tendent la perche, ne croit pas avoir vraiment changé.

« Tu t’ajustes, tu apprends de la vie, tu vieillis... Mais je ne me suis jamais assis pour me demander ce que je devais changer pour retourner dans la Ligue nationale. Je ne suis pas un gars avec un ego, mais j’ai quand même gagné six championnats dans cinq ligues différentes. Je crois à ce que je fais et je cherche continuellement à m’améliorer.

« Je ne me suis jamais remis en question. J’ai une extrême confiance en moi-même. Ce que je veux faire et que je pense bien faire, c’est d’écouter les gens. Je laisse les gens autour de moi s’exprimer. J’ai des décisions à prendre et je suis payé pour les prendre, mais je le fais en ayant en tête ce que les gens autour m’ont dit et en ayant en tête le bien de l’organisation. »

S’il a un comité hockey qu’il consulte trois ou quatre fois par année, Hartley a aussi un comité leadership qui aborde des sujets divers comme le choix des hôtels, la nourriture à l’aréna et dans l’avion, le salon des conjointes, le party de Noël des familles...

« Je veux que les joueurs sentent qu’ils ont une voix », indique Hartley.

À en juger par les succès des Flames cette année, toutes ces voix ont été entendues. Et celle de Hartley aussi, bien évidemment. On aurait pu le croire sur la corde raide après le départ de l’ex-DG Jay Feaster, mais il a signé en décembre une prolongation de contrat de plusieurs saisons, et le voilà plus en selle que jamais.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.