Ces fous qui font du kayak en hiver

Le soleil brille. Le vent est pratiquement inexistant, il n’y a donc pas de grosses vagues sur le fleuve. D’accord, il fait - 7 °C et il faut naviguer entre des plaques de glace, mais c’est quand même une journée idéale pour une petite sortie en kayak de mer.

Les kayakistes d’hiver ne sont pas nombreux, mais ils sont passionnés.

« En ce qui me concerne, c’est là d’où ça vient, le kayak. Ce n’est pas un sport d’été, explique Marco Weber, photographe indépendant et instructeur de kayak de mer. C’était le moyen de transport utilisé par les Inuits pour, entre autres, aller à la chasse. »

Marco Weber fait des sorties sur le fleuve dans la région de Montréal, mais on trouve aussi des kayakistes d’hiver ailleurs au Québec, même sur la Côte-Nord, comme Paul Lavoie, à Sept-Îles.

« Tant que la glace n’est pas complètement prise, ça se fait super bien, affirme M. Lavoie. C’est presque plus le fun que l’été. En hiver, tu es pas mal tout seul sur l’eau. »

Il explique que ce qui gâche souvent l’expérience du kayak de mer, ce sont « les plaisanciers, qui ne sont pas toujours respectueux ».

La lumière

Il ajoute que la lumière est différente en hiver et que l’expérience est particulièrement dépaysante en raison de la présence de glace. En outre, les phoques s’activent davantage autour des kayaks.

« Peut-être parce qu’il y a moins de navigation, ils se montrent plus curieux et viennent voir. »

Marco Weber indique que le kayak d’hiver présente des défis supplémentaires. « La marge de manœuvre est plus mince, affirme-t-il. On est à deux ou trois secondes de la catastrophe. »

Il faut donc prendre des précautions particulières. Marco Weber appelle notamment la garde côtière avant chaque sortie, essentiellement pour éviter le déclenchement d’opérations de sauvetage non justifiées.

« Les gens ne sont pas habitués à voir des gens sur le fleuve l’hiver. S’ils voient des gens assis sur une plaque de glace, ils pensent que c’est un pêcheur à la dérive et ils appellent le 9-1-1. »

— Marco Weber

Il peut s’agir en fait de kayakistes qui prennent une pause-café, confortablement assis sur un matelas isolant, entre deux séances de pagayage.

En hiver, il est encore plus important qu’en été de vérifier la météo et l’état des vagues avant de partir. Il faut aussi surveiller l’état des glaces.

« Les glaces peuvent se refermer soudainement, raconte Marco Weber. On peut partir d’un endroit libre de glace et découvrir plus tard que les glaces ont dérivé et qu’elles empêchent de revenir au point de départ. Il faut avoir un plan B, une sortie alternative. Ça ne sert à rien de s’acharner contre la nature parce qu’on ne gagnera pas. »

Combattre le froid

Paul Lavoie, lui, transporte toujours un bivouac d’urgence dans son kayak, au cas où les glaces l’obligeraient à passer la nuit dans une petite île.

L’important, le « nerf de la guerre », selon lui, c’est l’équipement, l’habillement. Une bonne combinaison étanche est essentielle.

« En dessous, je suis habillé comme pour aller dehors l’hiver, précise-t-il. Avant d’embarquer, je m’immerge dans l’eau. Il faut que je sois capable de tougher deux minutes sans avoir froid. Si je ne suis pas capable de faire ça, je vais mettre une couche de vêtements supplémentaire. »

« Et oui, il y a des gens qui me prennent en photo en me demandant ce que je fais là », ajoute M. Lavoie, conseiller en développement économique et conférencier.

De son côté, Marco Weber s’asperge le visage avec l’eau glacée à quelques reprises pour que le choc soit moins grand s’il y a dessalage (si le kayak chavire).

Il recommande le port de bons souliers de kayak avec une semelle isolante. Il suggère d’ailleurs de glisser un petit matelas isolant sous les pieds dans le kayak pour les protéger du froid.

Pour les mains, il conseille des gants ou des mitaines de néoprène. Il porte également une cagoule et un casque pour protéger la tête.

« On marche sur la glace, on peut glisser et se cogner la tête, explique-t-il. Et si on dessale, on peut également se frapper la tête sur une plaque de glace. »

Il recommande aussi d’apporter des vêtements secs dans un sac étanche, ainsi qu’une grosse doudoune pour mettre par-dessus la combinaison étanche pendant les pauses.

Il suggère un ou deux thermos de liquide chaud. Ça peut d’ailleurs aider à faire fondre la glace qui peut s’être formée sur les boutons de la radio VHF ou les fermetures éclair de la veste de flottaison.

Une activité pour sportifs expérimentés

Pour faire du kayak de mer en hiver, il faut être expérimenté et connaître les manœuvres de sauvetage. Ou encore, partir avec une personne expérimentée et formée. « En hiver, tout devient très vite très compliqué », explique Marco Weber.

Ainsi, la ligne de vie, cette corde qui fait le tour du kayak et qui facilite le retour à bord en cas de dessalage, peut très bien être entièrement gelée et collée au kayak. « Il faut anticiper, se débrouiller avec ça. »

L’activité a toutefois ses charmes bien particuliers. Paul Lavoie doit notamment porter des raquettes pour tirer son kayak jusqu’au fleuve.

« Je marie mes deux activités préférées. »

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le Chiffre de la semaine

134,37

C’est le record de vitesse en km/h pour un traîneau à neige, établi par Guy Martin en 2014. Avec son équipe Snowspeed, il espère fracasser ce record plus tard cet hiver.

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