Économie numérique

Arriver au XXIe siècle

Ce n’est pas encore la fameuse stratégie numérique québécoise promise et attendue depuis des lustres, mais les quelque 300 millions de dollars annoncés vendredi dernier pour soutenir les entreprises et étendre l’internet à haute vitesse constituent un développement appréciable. Reste à s’assurer que ces leviers soient bien utilisés, et contribuent réellement à relever le niveau.

Les 188 millions du Plan d’action en économie numérique ayant déjà été annoncés dans le budget, la surprise est venue des 100 millions supplémentaires destinés à élargir l’accès à l’internet à haute vitesse à toute la province. L’objectif est ambitieux (au moins 30 mégabits par seconde partout d’ici 2021) et les moyens, encore imprécis. Les critères utilisés pour évaluer les projets restent à définir, et l’argent puisé dans le Plan québécois des infrastructures ne sera « pas nécessairement conditionnel » à une participation financière du fédéral et des municipalités, nous dit-on au cabinet de la ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation Dominique Anglade. Il faudra voir, mais au moins, on sent une prise de conscience. Heureusement : comment prétendre au virage numérique si on laisse tant de régions, souvent pas très éloignées, sur la gravelle ?

Le Plan d’action en économie numérique présenté vendredi se veut également très pragmatique. Les 188 millions étalés sur cinq ans visent essentiellement à inciter et à aider les entreprises à profiter du virage numérique. Et dans plusieurs cas, on a choisi d’élargir des mesures déjà rodées, ce qui devrait faciliter les interventions. Une bonne idée dans ce domaine où la rapidité est déterminante. Pensons aux incitatifs financiers visant à convaincre les entreprises d’investir dans le commerce en ligne : il faut que ça se fasse maintenant, pendant que la faiblesse de notre devise donne un certain avantage face aux sites américains.

Pour une fois, Québec ne s’engage pas seulement à dépenser, mais à mesurer les retombées, notamment en matière d’emplois créés, de ventes en ligne et de sommes investies par les entreprises dans les technologies de l’information et des communications.

Il faudra toutefois veiller à ce que ces indices ne servent pas seulement à attribuer une note au gouvernement, mais à rajuster le tir.

La ministre Anglade a beaucoup insisté sur le caractère « évolutif » de ce plan économique ; son financement devra l’être aussi. Plus du quart de l’enveloppe (49,9 millions) est réservé à des projets qui créeront au moins 500 emplois. C’est la recette classique, qui consiste à offrir de généreuses subventions dans l’espoir d’appâter de gros employeurs. Optimiste, le Plan d’action vise jusqu’à six annonces du genre (3000 emplois). Les initiatives de cette envergure ne courent cependant pas les rues. Si l’argent dort sur la table, il ne faudra pas hésiter à le réallouer à d’autres volets plus fructueux.

Et la stratégie numérique proprement dite ? Une plateforme sera mise en ligne le mois prochain, tous les citoyens et les organisations pourront y créer un profil pour s’exprimer, a indiqué la ministre. Espérons que Québec s’en servira pour intégrer de bonnes idées, et non pas seulement pour avoir l’air de consulter.

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