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De Bologne à Montréal, la longue route de Dzemaili

L’échange se déroule au terme d’une victoire du Bologne FC, au mois de janvier, contre Torino. Joey Saputo s’avance vers Blerim Dzemaili, auteur d’une autre prestation de haut vol, avant de lui lancer : 

— Blerim, tu es en train de me tuer.

— Désolé, président, répond le joueur.

— C’est OK, je ne fais que plaisanter, désamorce l’homme d’affaires, conscient que le départ du joueur vers Montréal ne sera pas facile à accepter à Bologne.

Quelques mois plus tard et malgré une ascension fulgurante dans le cœur des partisans italiens, Dzemaili fera ses débuts avec l’Impact, aujourd’hui, contre le Crew de Columbus (17 h). Cette première tant attendue est le dernier acte de longues négociations entre deux clubs unis par un même propriétaire.

Le premier contact entre l’Impact et Dzemaili se fait par l’intermédiaire de Nick De Santis, vice-président, relations internationales du club montréalais. Les deux hommes maintiennent depuis plusieurs années un échange régulier. Alors, quand De Santis comprend que Dzemaili souhaite vivre une aventure en MLS, après des débuts en Suisse, des crochets par l’Angleterre et la Turquie, mais surtout plusieurs bonnes saisons en Italie, il prend son téléphone.

« Nick m’a appelé au début du dernier Euro [en juin 2016] et m’a demandé si j’étais intéressé par son profil, raconte le directeur technique Adam Braz, quelques heures après la présentation officielle du joueur. J’ai dit oui, puis j’ai parlé avec Mauro [Biello] par rapport au milieu de terrain et au profil box-to-box de Blerim. Je peux dire que la discussion a été brève. »

« On regardait l’Euro en sachant que, peut-être, il y avait une possibilité de le voir ici. »

— Adam Braz, directeur technique de l’Impact

« On n’a jamais douté »

Il était trop compliqué d’imaginer une arrivée à Montréal au cours de l’été 2016. D’ailleurs, à ce moment-là, Dzemaili sent qu’il a encore quelque chose à accomplir en Europe. Après l’Euro, vécu en tant que pilier de la sélection suisse, il souhaite montrer qu’il peut encore apporter une contribution importante au sein de l’un des meilleurs championnats européens. 

Écrire qu’il y parvient serait un euphémisme tant il est l’auteur de la majorité des bons coups de Bologne, son nouveau club depuis la mi-août. Au total, il inscrit huit buts et délivre trois passes décisives. Cette bonne performance complexifie involontairement la situation. Son contrat est pourtant clair, malgré les doutes semés ici et là par l’entraîneur Roberto Donadoni : après une seule saison, il doit prendre le chemin de la MLS. En dépit des déclarations d’amour, il ne change pas d’idée et enfile l’uniforme montréalais quelques mois avant la date encerclée initialement.

« On n’a jamais douté, mais c’était fantastique de voir ce qu’il a fait là-bas et son importance dans l’équipe avec son jeu, ses buts marqués, dit Braz. J’ai pu voir deux matchs lors d’un séjour en Italie, en février. Après avoir marqué son but contre la Sampdoria (Gênes), on lui a dit d’en garder un peu pour l’été. Les gens l’adoraient parce qu’il a tout donné à l’équipe et qu’il a joué un rôle important dans le maintien en première division. J’ai aussi très vite constaté qu’il était bon, dans le vestiaire, pour pousser les jeunes joueurs. »

Un autre lien

Dans les derniers mois, les contacts entre l’Impact et Dzemaili s’espacent. Braz et les autres dirigeants montréalais ne souhaitent surtout pas déconcentrer le joueur particulièrement influent dans le système bolognais. Et si le jeune trentenaire a des questions sur sa future destination, il n’a pas besoin d’aller bien loin pour trouver de l’information pertinente. L’arrimage entre Montréal et Bologne peut aussi se faire à travers Marco Di Vaio, désormais dirigeant avec les Rossoblù. 

« Nous, on peut lui expliquer comment sont la ville ou le club, mais c’est vraiment bon de parler à un autre Européen qui est passé par là, reconnaît Braz. Il sait que Montréal est une bonne ville pour lui et sa famille. »

« À propos de l’équipe, il savait qu’on avait un centre d’entraînement et un stade fantastiques. Et puis, il suivait déjà l’équipe lors des dernières séries. Il voulait voir comment on jouait et le type de joueurs qu’il y avait. »

— Adam Braz

À ce niveau, le milieu de terrain qu’il va former en compagnie de Nacho Piatti et de Ballou Jean-Yves Tabla a de quoi instiller une certaine crainte chez les futurs adversaires. À travers la vérité du terrain, il reste également à convaincre une partie du grand public montréalais – qui ne connaît pas forcément Dzemaili – qu’il a tout d’un véritable meneur.

« Les gens vont rapidement apprendre à le connaître et à apprécier ses qualités, soutient Braz. C’est un milieu central complet qui joue bien dans toutes les phases de jeu. Il peut marquer avec des tirs lointains ou avec ses courses dans la boîte. Il est bon en possession, intelligent dans ses décisions et excellent dans les transitions offensives. Il lit bien le jeu pour se retrouver au bon endroit sur le terrain. »

Loin des yeux...

Un joueur efficace est, bien souvent, un homme heureux en dehors du terrain. Arrivé seul mardi, il ne sera rejoint par sa famille qu’après la prochaine pause internationale, en juin. Les prochaines semaines seront consacrées à la recherche d’un appartement et à la constitution d’un petit chez-soi, à des milliers de kilomètres de son ancienne vie. Il a lui-même avoué que les premiers jours s’étaient mieux déroulés que prévu. Pas de quoi surprendre Braz, qui a appris à le connaître au fil des rencontres. 

« Il est une personne facile d’approche et c’est agréable de parler avec lui. C’est également un véritable homme de famille. Quand on regarde les critères que doit remplir un joueur désigné, on regarde aussi la personne. Lui, il a cette personnalité et ce caractère. »

Prudence pour Camara

Le retour au jeu d’Hassoun Camara n’est pas pour tout de suite. Le défenseur agit avec prudence après avoir ressenti des symptômes de commotion cérébrale à deux reprises au cours du mois d’avril. « Ce sont des choses qui sont prises sérieusement par la ligue. J’aurais préféré reprendre beaucoup plus tôt, mais je me suis confronté à l’avis des médecins. J’apprends aussi sur ces cas-là, je dois faire attention et je dois prendre soin de moi. J’espère maintenant que ce sera bon pour la semaine prochaine. » Camara n’a plus joué depuis le 22 avril, à Philadelphie. En toute fin de match, un choc avec Evan Bush l’a contraint à céder sa place au jeune Kyle Fisher. Sans Camara, l’Impact tentera de décrocher une deuxième victoire de suite contre un adversaire classé quatrième de l’Association de l’Est. Ses joueurs offensifs, avec notamment un retour en grande forme de Federico Higuain, connaissent un excellent début de saison.

— Pascal Milano, La Presse

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