Monde

Populisme et méfiance envers les vaccins vont de pair, selon une étude

Une nouvelle étude britannique indique que la montée des partis populistes dans les pays européens va de pair avec la croissance du scepticisme envers la vaccination.

La recherche diffusée dans l’European Journal of Public Health note que les deux phénomènes sont liés, car ils reposent sur une « profonde méfiance envers les élites et les experts ».

L’auteur de l’étude, Jonathan Kennedy, de la Queen Mary University de Londres, a indiqué hier en entrevue que l’idée d’étudier cette association lui était venue notamment de l’observation de la situation en Italie et aux États-Unis.

Le Mouvement 5 étoiles (M5S), qui forme un gouvernement de coalition avec la Ligue du Nord en Italie, a remis en question à plusieurs reprises la sécurité des vaccins en se basant notamment sur une étude désavouée liant l’autisme au vaccin RRO contre la rougeole, la rubéole et les oreillons.

Selon M. Kennedy, leurs interventions à ce sujet ont contribué à une baisse du taux de vaccination pour ces maladies, qui est passé de 90 % à 85 % de 2013 à 2016 dans le pays. Le nombre de cas de rougeole est passé de 840 en 2016 à 5000 en 2017.

Le chercheur a aussi observé que le président américain Donald Trump était intervenu à plusieurs reprises pour mettre en doute l’efficacité de la vaccination.

Des préoccupations similaires ont été exprimées, relève-t-il, en France par le parti d’extrême droite de Marine Le Pen ainsi qu’en Grèce par Syriza, une formation populiste de gauche.

Afin d’étudier la relation entre le sentiment antivaccination et le populisme politique, le chercheur a utilisé les résultats des formations populistes lors des élections européennes de 2014 ainsi qu’une étude internationale dans laquelle la méfiance des participants envers les vaccins était considérée.

L’exercice a permis de démontrer qu’il existe une forte corrélation entre les deux phénomènes, relève M. Kennedy.

« Plus le pourcentage de votes populistes dans un pays est élevé, plus est grande la proportion de gens qui croient que les vaccins sont inefficaces. »

— Jonathan Kennedy, auteur de l’étude

Le chercheur entend, dans une prochaine étape, interviewer directement des sympathisants de partis populistes et procéder à un sondage afin d’étudier plus en profondeur le sujet.

D’emblée, dit-il, les résultats obtenus suggèrent que la lutte contre le sentiment de méfiance envers les vaccins doit aussi passer par la lutte contre la défiance envers les institutions, incluant sur le plan sanitaire.

Trop de scepticisme

« Une certaine dose de scepticisme est une bonne chose. Mais quand le scepticisme devient extrême et mal informé, il peut y avoir de graves conséquences », relève M. Kennedy.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a prévenu il y a deux semaines que le nombre de cas de rougeole signalés dans le monde avait bondi de 2017 à 2018, passant de 170 000 à 229 000.

Une porte-parole de l’organisation a indiqué que des hausses substantielles étaient signalées dans « toutes les régions » et que des épidémies de plus en plus longues et de plus en plus importantes étaient observées.

En Europe, plus de 80 000 cas ont été signalés, incluant plus de 50 000 en Ukraine.

Plusieurs réseaux sociaux, dont Facebook et YouTube, se sont fait reprocher au cours des dernières semaines de favoriser la diffusion en ligne d’informations émanant du camp antivaccin. Les deux organisations ont promis d’apporter des correctifs pour améliorer la situation.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.