OPINION

Les vertus du nationalisme

Que ce soit Donald Trump, qui se déclare nationaliste, ou Emmanuel Macron, qui compare le nationalisme à la « lèpre », inutile de dire que le nationalisme n’est pas à la mode. Il a pourtant des vertus qu’on aurait tort d’ignorer.

Il existe un nationalisme qui ne repose ni sur la race, ni sur la religion, ni sur la force, mais sur le désir de vivre ensemble, en un mot de faire nation.

Ce nationalisme a deux vertus.

D’abord, il alimente notre désir de partager des références communes, telles une histoire, une langue et des institutions. Il cultive ce que le penseur français Ernest Renan appelait le « plébiscite de tous les jours », soit l’affirmation perpétuelle d’appartenir à une nation.

C’est le cas au Québec où nous cultivons une histoire, qui remonte à la découverte d’un Nouveau Monde et qui se poursuit jusqu’à la construction d’une société moderne et ouverte, une langue, qui n’est pas seulement un outil de communication, mais une façon d’exister, et des institutions démocratiques, dont le cœur est l’Assemblée nationale.

Ensuite, il alimente la participation à la vie démocratique. Si nous désirons vivre ensemble, nous sommes forcément concernés par la façon dont nous nous gouvernons. En ce sens, le nationalisme alimente le patriotisme.

Dès lors que nous exprimons notre solidarité envers nos concitoyens, en aidant les plus démunis, que nous nous tenons informés de l’actualité politique, en consultant les médias, que nous participons aux processus démocratiques, en allant voter, nous faisons preuve de patriotisme.

Si le nationalisme cultive des références communes et le patriotisme, alors pourquoi certaines personnes y sont-elles réticentes ?

Il y a trois explications possibles.

La première est historique. Nous avons encore à l’esprit les barbaries que furent les deux guerres mondiales, surtout l’Holocauste, et les conflits dans les Balkans. Or, et pour ne prendre que cet exemple, il n’y a aucune commune mesure entre le nationalisme québécois et les nationalismes précédents. De sorte que de telles comparaisons sont boiteuses.

La deuxième est l’emprise qu’exerce sur nous la distinction entre nationalisme civique et nationalisme ethnique. Or il n’est pas de nationalisme qui ne contient pas ces deux éléments. Il ne faut pas confondre toutefois ethnicité et ethnicisme. L’ethnicité désigne des traits propres à un groupe, telle une langue ; l’ethnicisme est l’exclusion d’autrui, car il n’appartient pas à la même ethnie. Celui-ci ne doit pas être toléré.

Le nationalisme québécois, par exemple, repose sur des valeurs universelles qui sont enchâssées dans la Charte des droits et libertés, et la langue française qui, elle, est un trait commun à une majorité de Québécois et, éventuellement, tous les Québécois.

La troisième, dont on parle peu, est que nous confondons parfois nationalisme et exclusion démocratique. Une des procédures clés de nos démocraties est la formation d’une majorité : c’est en gagnant une majorité de sièges au Parlement qu’un parti politique peut gouverner.

Exclusion, nationalisme et démocratie

Mais qui dit majorité dit aussi minorité. Il y a des citoyens qui n’ont pas voté pour le parti au pouvoir. Même si leurs droits fondamentaux sont respectés, il se peut qu’ils se sentent exclus par leur gouvernement et par les institutions publiques.

C’est à ce moment-là que certains accusent le nationalisme de cultiver un tel sentiment d’exclusion, alors que c’est plutôt la démocratie qui en est responsable. Autrement dit : c’est parce nos démocraties cherchent à obtenir une majorité et qu’elles n’y arrivent jamais totalement qu’elles peuvent susciter un sentiment d’exclusion chez certains citoyens.

Ceci ne veut pas dire qu’il n’existe pas de nationalismes débridés. Au contraire, il existe des nationalismes qui affirment la supériorité d’un groupe et qui prônent l’exclusion des autres groupes. Ces nationalismes doivent être combattus avec la plus grande fermeté.

Mais ceci n’a rien à voir avec le nationalisme qui est défendu ici. Le nationalisme défendu ici essaie de surmonter l’exclusion démocratique en cultivant des références communes, la participation à la vie démocratique et, surtout, l’inclusion de tous les citoyens à la nation.

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