Surplus d’électricité

Les exportations ne suffiront pas

Les exportations d’électricité ont rapporté beaucoup d’argent à Hydro-Québec durant la première moitié des années 2000. Toutefois, les prix ont à ce point chuté que les profits des exportations ne seront probablement pas suffisants pour compenser la facture des éoliennes au cours de la prochaine décennie.

Entre 2003 et 2008, Hydro-Québec Production a réussi à obtenir 8,37 cents le kilowattheure (kWh), en moyenne, sur le marché de court terme, qui accapare plus de 85 % de ses exportations. Or, depuis ce temps, le prix a fondu, pour une moyenne de 5,03 ¢/kWh entre 2009 et 2013.

Ce fort recul des prix s’explique par le ralentissement de l’économie, mais surtout par le boom de la production du gaz de schiste, qui livre une forte concurrence à l’hydroélectricité.

TROIS SCÉNARIOS

Pour estimer les profits que réalisera Hydro avec les exportations de court terme d’ici 2021, j’ai fait trois scénarios de prix. D’abord, j’ai présumé que les prix à l’exportation d’ici 2021 seront semblables à ceux obtenus durant le dernier cycle économique, soit de 2003 à 2013. En moyenne, Hydro a vendu son électricité 6,86 ¢/kWh durant cette période.

Dans le premier scénario, j’ai indexé ce prix de 2 % par année d’ici 2021 (7,72 ¢/kWh en 2021). Dans le deuxième scénario, ce même prix n’est aucunement indexé (6,86 ¢/kWh en 2021). Dans le troisième, le prix projeté est une moyenne des 5 dernières années, indexé de 2 % par année par la suite (5,66 ¢/kWh en 2021).

En vertu de ces trois scénarios, Hydro-Québec réaliserait des profits totaux oscillant de 4,2 à 8,8 milliards entre 2014 et 2021, soit entre 525 millions et 1,1 milliard par année.

Il s’agit d’une somme appréciable. Cependant, ces profits seraient à peine suffisants pour combler la facture des éoliennes et autres surplus d’Hydro-Québec refilée aux Québécois (7,9 milliards), selon mes calculs. En fait, sur les trois scénarios de prix d’exportation, un seul permettrait de combler le trou causé par la facture des surplus d’énergie (le scénario 1, voir graphique).

C’est donc dire que le gouvernement du Québec devra pratiquement s’en remettre à la faible croissance économique du Québec et aux compressions pour voir les dividendes d’Hydro augmenter.

COÛTS DE PRODUCTION ET DE TRANSPORTS

Pour nos calculs, il a fallu faire, pour l’électricité exportée, des estimations de coûts de production et de transport de l’énergie. D’après le professeur Pierre-Olivier Pineau, de HEC Montréal, l’énergie produite par La Romaine (les 4 phases) coûtera entre 6,2 et 7,1 ¢/kWh, selon les hypothèses.

Ce coût de production est probablement trop élevé pour rentabiliser La Romaine, compte tenu des prix à l’exportation (6,86 ¢/kWh depuis 10 ans) et des frais de transport que doit assumer Hydro.

Bien sûr, la rentabilité des exportations ne repose pas seulement sur La Romaine, puisque la quantité d’énergie produite par cette rivière (8 TWh) sera insuffisante pour combler le niveau des exportations (34,5 TWh) en 2021.

Pour le reste, nous avons donc utilisé une moyenne pondérée des coûts de production des projets La Sarcelle et des précédentes centrales traditionnelles, entre autres. Ainsi, entre 2013 et 2021, le coût de production global utilisé pour mesurer les profits d’Hydro varie de 2,39 à 3,36 ¢/kWh.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.