Québec favorise une politique sur le télétravail

Le ministre du Travail, Jean Boulet, recommande aux employeurs de se doter d’une politique sur le télétravail, afin d’en baliser les modalités et de clarifier certains aspects pour tous. Québec donne suite au rapport intitulé Avis sur le télétravail remis au ministre par le Comité consultatif du travail et de la main-d’œuvre. Le comité conclut que le cadre juridique actuel s’applique en cas de télétravail, notamment la Loi sur les normes du travail (qui précise les congés, absences, heures supplémentaires), ainsi que la Loi sur la santé et la sécurité du travail et la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles. — La Presse Canadienne

Sondage dans les PME du Québec

Moral et productivité à la baisse, coûts en hausse

Le télétravail, vers lequel s’est tournée une PME québécoise sur cinq depuis la mi-mars, n’a pas la cote auprès des chefs d’entreprise, selon un sondage de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), qui sera dévoilé lundi et que La Presse a obtenu. Ces entrepreneurs estiment que le moral et la productivité de leurs employés sont à la baisse, tandis que les coûts pour le matériel de bureau sont en hausse. À cela s’ajoutent les difficultés de rencontrer des clients en personne et de superviser leurs employés. Explications.

Pas pertinent

Mené auprès de 1203 chefs de petites et moyennes entreprises au Québec entre le 24 septembre et le 9 octobre, le sondage de la FCEI indique d’entrée de jeu qu’une nette majorité, soit 64 %, ne se sentent pas concernés par le télétravail, qui « ne convient pas à [leur] modèle d’entreprise ».

Les PME dans l’hébergement et la restauration, notamment, ont été 91 % à donner cette réponse. Le commerce de détail (77 %), les services sociaux (77 %) et les services personnels (77 %) figurent également dans les secteurs peu concernés par cette nouvelle réalité.

« Le télétravail, on en parle beaucoup, mais ce n’est pas une solution magique, ce n’est pas applicable partout, dit François Vincent, vice-président Québec à la FCEI. De toute évidence, on peut ouvrir une fenêtre Zoom dans son ordinateur, mais on ne peut pas fabriquer de portes et fenêtres par Zoom ! »

Depuis l’arrivée de la COVID-19, les PME ont été 13 % à permettre à leurs employés d’assumer « certaines de leurs responsabilités à domicile », 7 % à le permettre pour « la plupart » de leurs tâches. Pour 5 %, par ailleurs, le télétravail était déjà implanté avant la mi-mars.

Les secteurs où le télétravail est le plus apparu : les services professionnels (47 %) et le commerce de gros (37 %). On y retrouve même les secteurs de la construction et de la fabrication, avec des taux d’adoption respectifs du télétravail de 34 % et 26 %. Dans ces deux derniers cas, toutefois, ce sont évidemment surtout des responsabilités administratives qui ont été transférées.

Pas bon pour le moral

On a ensuite demandé à ces chefs d’entreprise d’évaluer les changements dans cinq domaines qu’avait engendrés le télétravail. Le bilan est plutôt sombre. Pour la productivité des employés, à peine 9 % l’estiment en augmentation, 34 % ayant plutôt constaté une baisse.

Pour la cohésion du personnel et le moral de l’équipe, même constat négatif : à peine 5 % ont constaté une hausse, 53 % notant plutôt une baisse ; 36 % trouvent par ailleurs qu’il est plus difficile de communiquer avec le personnel, et 39 % ont constaté que les coûts de matériel de bureau étaient en augmentation.

« C’est intéressant dans la mesure où une PME en temps normal est reconnue pour son agilité, sa capacité à créer une cohésion d’équipe parce que celle-ci est petite, rappelle M. Vincent. Et comme je suis petit, je n’ai pas nécessairement de département des ressources humaines ; ça devient plus complexe de maintenir une cohésion à distance. »

Préoccupations

Dans un autre angle d’attaque, on a également demandé aux entrepreneurs quelles étaient leurs principales préoccupations à l’égard du télétravail. Plus d’une réponse était possible. Les deux principales : le fait qu’il y a maintenant moins d’occasions de rencontrer des clients en personne (49 % des répondants) ; la difficulté de superviser les employés, par exemple si ceux-ci utilisent l’ordinateur de l’entreprise à des fins personnelles (47 %).

La difficulté de rencontrer des clients, François Vincent en a eu un bon exemple le mois dernier. « J’ai rencontré une entrepreneure à Québec. Elle fait des créations artistiques intégrées à différents produits, notamment scolaires, qu’elle envoie à des détaillants. Pour percer ce marché, il faut les rencontrer, aller dans des événements organisés, que le client puisse toucher à son matériel, le voir, lui parler. Les entreprises établies renouvelleront leurs contrats, mais force est de constater que le télétravail limite les interactions avec de nouveaux clients. »

On note par ailleurs que les deux préoccupations suivantes, partagées par 31 % des chefs de PME, sont liées aux infrastructures informatiques. On s’inquiète du coût de ces infrastructures et de la protection des données, ainsi que de l’accès des employés à un internet fiable et à haute vitesse.

Cette préoccupation concerne surtout les PME en régions, dont certains secteurs sont mal servis en ce qui concerne l’internet haute vitesse. « C’est très handicapant pour des entreprises. C’est comme demander d’aller jouer au hockey sans bâton. »

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