École des petits musiciens

À l’école des petits musiciens

Les pieds bien plantés dans ses baskets, Philippe Gonzalez, 11 ans, s’échine sur son violon. « On apprend le vibrato », explique Cristina Mondiru, sa professeure de musique, en faisant trembler le bras de son élève.

Il y a deux ans, Philippe ne connaissait rien au violon. Il est alors entré à l’École des petits musiciens, un nouveau projet réservé aux enfants de 6 à 11 ans, affilié à l’école secondaire Joseph-François-Perrault, réputée pour son programme de musique. Les progrès du garçon ont été fulgurants.

Chaque semaine, après leur journée de classe, les « petits musiciens » suivent un cours particulier donné à Joseph-François-Perrault (JFP), dans le quartier Saint-Michel à Montréal. Les samedis matin, ils pratiquent au sein d’un orchestre à cordes. L’objectif ? Former une relève hautement qualifiée en violon, alto, violoncelle et contrebasse, pour alimenter le programme arts-études de JFP. Pas besoin d’avoir une base en musique : l’école, qui offre des niveaux débutant, junior et avancé, est ouverte à tous les enfants.

« ÇA CAUSAIT BEAUCOUP DE DÉCEPTION »

« Avant, parmi les élèves qui se présentaient en audition au secondaire et qui n’avaient pas fait leur primaire à l’école Le Plateau [note : spécialisée en musique], 80 % sinon plus étaient refusés, se souvient Richard Charron, directeur musical retraité de JFP et initiateur de l’École des petits musiciens. Ça causait beaucoup de déception. On a décidé de régler le problème en ayant notre propre petite école. On assure maintenant aux parents qu’on donne à leurs enfants la préparation et le suivi nécessaires pour qu’ils soient acceptés. »

Avis aux intéressés : les enfants doivent idéalement entrer à l’École des petits musiciens au plus tard en 3e année du primaire, afin de s’assurer d’atteindre le niveau requis pour être admis en arts-études au secondaire. « Nos élèves n’ont pas de passe-droit, souligne Kristin Molnar, l’énergique directrice musicale de l’École des petits musiciens. Mais ceux qui sont bons et qui ont envie de continuer sont recrutés au secondaire. »

BIENFAITS DE LA MUSIQUE

Philippe, qui habite le quartier Hochelaga-Maisonneuve, trouve les cours particuliers de violon parfois difficiles. « Mais jouer dans l’ensemble les samedis matin, c’est enivrant, ça le motive », témoigne Téo Gonzalez, son père. 

L’apprentissage du violon a-t-il eu un impact sur le garçon ? « Bien sûr : la musique adoucit les mœurs, répond M. Gonzalez. Philippe est moins colérique, plus ouvert. À l’École des petits musiciens, je remarque que tous les enfants sont gentils. Je ne sais pas si c’est la musique qui les calme… »

« La musique, ça complète la vie des enfants, estime Mme Mondiru, professeure à l’École des petits musiciens et violoniste professionnelle, notamment à l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières. En jouant d’un instrument, ils sont plus riches intérieurement. Alors quand j’entends parler de coupes dans l’enseignement des arts, ça m’attriste. »

« Faire de la musique, ça aide les élèves à se concentrer, se structurer, en plus de les stimuler, poursuit M. Charron, trompettiste de formation. C’est vraiment fantastique. Nous avons quelques enfants grouillants, un peu hyperactifs. Quand ils sont au cours de musique, c’est vraiment extraordinaire : ils sont attentifs. C’est pourtant exigeant, il faut lire, jouer et entendre, tout ça en même temps. Mais ce sont des éponges, c’est simple pour eux. »

FRAIS DE SCOLARITÉ ÉLEVÉS

La formation de qualité offerte à l’École des petits musiciens a un prix, élevé pour un quartier défavorisé comme Saint-Michel. L’an prochain, les frais de scolarité varieront entre 1120 $ et 1705 $ annuellement, selon la durée des leçons privées hebdomadaires. « On n’a pas le choix, malheureusement, les parents doivent financer 100 % des coûts », dit M. Charron. Bon à savoir : la Fondation de JFP aide quelques familles moins nanties à payer les cours des musiciens en herbe.

« QUAND JE JOUE DU VIOLON, JE ME SENS SUPER BIEN »

« J’aime l’École des petits musiciens, parce qu’ici on apprend des choses et on s’amuse en même temps », témoigne Maia Dagher, 10 ans. Très articulée, la blondinette aux yeux bleus maniait l’archet avant même d’entrer en maternelle. « Quand je joue du violon, je me sens super bien », dit-elle.

« Apprendre la musique, ça donne aux enfants un sens de l’engagement, une discipline, en plus de développer leur sensibilité artistique et esthétique, indique Chantal Bergeron, la professeure de violon de Maia. Ça leur permet de se présenter devant un public, de contrôler leurs nerfs. Ce sont tous des outils qui leur seront utiles dans la vie. »

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