Des écoles qui font rêver
« Comment une société soi-disant avancée et riche comme la nôtre peut-elle montrer si peu d’intérêt pour ses écoles ? »
Cette question, c’est Jean-René Dufort qui la pose dans la préface du livre de Marc-André Carignan, Les écoles qu’il nous faut, tout juste sorti en librairie. « C’est une énigme pour moi, dit-il. Cherchez tant que vous voulez, vous ne trouverez aucune étude concluant que les enfants réussissent mieux dans une école affreuse qui date de la Deuxième Guerre mondiale. En revanche, des brouettes pleines d’études affirment le contraire. »
Selon l’animateur d’Infoman, Les écoles qu’il nous faut devrait être placé dans le rayon « Bibles » au département de la construction du ministère de l’Éducation du Québec.
De quoi est-il question dans cet essai de 200 pages ?
Essentiellement, de bonnes idées pour moderniser les écoles du Québec, décrépites et figées dans les années 60.
L’auteur et chroniqueur Marc-André Carignan, architecte de formation, a consacré près de 18 mois à la recherche et à l’écriture de cet ouvrage, dans lequel il dresse un portrait pas toujours réjouissant des écoles québécoises et propose des solutions pour en faire des lieux de vie stimulants, modernes, en phase avec le XXIe siècle.
« La classe que j’ai connue il y a 25 ans n’a pas vraiment changé, déplore-t-il. Je me suis dit, ce n’est pas vrai que mes enfants vont aller dans des écoles comme ça ! »
Il a écrit Les écoles qu’il nous faut dans la foulée de la création du Lab-École de Pierre Thibault, Ricardo Larrivée et Pierre Lavoie, avec la collaboration de nombreux acteurs du milieu : enseignants, politiciens, syndicalistes, directions scolaires, commissaires, architectes, designers, chroniqueurs…
Il y a eu beaucoup de réflexions sur l’éducation au Québec, mais l’environnement physique dans lequel évoluent les enfants et les professeurs n’a pas fait l’objet de discussions. On commence à s’y intéresser. Je pense qu’il y a un réveil collectif. Tant mieux.
À tout le monde qui est concerné par l’enfance et l’éducation. C’est un livre qui a été écrit pour les parents, les enseignants et les politiciens.
Au Québec, on est dans une culture de banalité architecturale, du plus bas soumissionnaire. L’architecture commence à faire partie de nos priorités, mais c’est nouveau. Il y a aussi le fait que ce sont toujours les mêmes architectes qui font les écoles. C’est fou ! Dans les commissions scolaires, si tu n’as pas fait cinq écoles dans les cinq dernières années, tu ne peux pas proposer tes services. Donc, le bassin d’architectes ne se renouvelle pas.
Il y en a tellement ! Je dirais Louis-Joseph-Papineau (dans le quartier Saint-Michel). Un véritable bunker de béton avec des meurtrières comme fenêtres. C’est triste comme école.
L’école Médéric-Gravel, au Saguenay, où on a sorti les pupitres. À la place, on a fait des îlots de travail collaboratif. Les enfants peuvent s’isoler, s’asseoir en groupe ou en sous-groupe. Il y a une flexibilité de l’espace. Et plein de locaux complémentaires dans l’école, entre autres la fameuse cuisine où les enfants peuvent apprendre les fractions, les langues et s’initier à l’entrepreneuriat. Bref, c’est un modèle pédagogique fascinant. J’ai demandé à la directrice si elle avait demandé une dérogation au Ministère ! Elle m’a dit : « Ben non, on a créé une cellule de réflexion, on s’est mis à regarder ce qui se faisait ailleurs dans le monde, et avec nos services pédagogiques et nos professeurs, on s’est dit ce qu’on pourrait faire en fonction des objectifs du Ministère. » Et ç’a été fait avec les budgets de la commission scolaire.
Au Québec, présentement, c’est l’école Médéric-Gravel. Mais l’école de mes rêves, c’est sans doute une école construite dans un boisé dans un pays scandinave à cause du côté architectural qu’on ne retrouve pas ici.
Il y a de super beaux modèles au Japon et en Scandinavie, mais j’ai essayé de voir ce qui se fait de bien au Québec. À la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, on a commencé à intégrer des laboratoires de création numérique. Côté architecture, par contre, je n’ai pas trouvé grand-chose. Ricardo, à Tout le monde en parle, avait dit que l’école parfaite existe en morceaux au Québec. Je suis parfaitement d’accord avec lui.
Si j’étais ministre, j’arrêterais de patcher. Je ferais une analyse de chaque école quand vient le temps d’investir pour savoir c’est quoi, la valeur ajoutée qu’on peut apporter, au-delà de la toiture à réparer ou du gymnase à construire, pour en faire une école du XXIe siècle. Il faut arrêter de saupoudrer dans les écoles.