Montréal

300 $ pour une gorgée de bière au parc Laurier

La bière a coûté cher, et elle est passée de travers, samedi soir au parc Sir-Wilfrid-Laurier de Montréal, quand des policiers ont décidé de mettre en application un règlement municipal qui interdit la consommation d’alcool ailleurs qu’autour d’un repas mangé à une table de pique-nique.

Envie d’une collation ? Assurez-vous qu’elle soit accompagnée d’autre chose que d’une boisson alcoolisée. Même chose pour les repas pris sur une couverture : mieux vaut les consommer dans la sobriété.

La directive est désormais claire : elle a été appliquée par une vingtaine de policiers à vélo, vers 22 h samedi, selon ce qu’ont rapporté des témoins.

« Deux joueurs de pétanque qui étaient à côté de nous se partageaient une bière. Ils se sont pris une amende de 148 $ chacun », a raconté Félix Gravel, soudainement bien heureux d’avoir choisi de boire de l’eau minérale au parc, ce soir-là. « Ils venaient d’ouvrir leur bière. Leur gorgée leur a coûté 300 $. »

« On a vu les policiers passer, et ensuite, un citoyen nous a avertis : la police donnait des contraventions. On est partis. »

— Soraya Elbekkali

UN RÈGLEMENT DÉSORMAIS APPLIQUÉ

Depuis la séance du conseil d’arrondissement qu’il a tenue le 4 mai, Le Plateau-Mont-Royal a décidé d’appliquer l’article 3 du règlement municipal P-1. Celui-ci encadre la consommation de boissons alcoolisées dans les parcs, la permettant notamment « à l’occasion d’un repas pris en plein air dans la partie d’un parc où la ville a installé des tables de pique-nique ».

En renforçant l’application du règlement, l’arrondissement espère améliorer la quiétude dans le secteur du parc, qu’il admet être victime de sa popularité. Or dans le même élan, Le Plateau-Mont-Royal bouleverse les habitudes dans l’espace vert, où l’on tolère la consommation d’alcool depuis des années.

Dans la journée de samedi, des membres d’une patrouille de médiateurs ont averti le groupe de Soraya Elbekkali, qui fréquente souvent le parc Laurier. « Ils nous ont dit que la police allait être plus sévère. On avait de la nourriture, mais ils nous ont dit qu’on devait être en train de manger [pour éviter un constat]. On ne les a pas vraiment pris au sérieux », a admis celle qui dit ne jamais avoir été dérangée pour cette raison auparavant. « Le parc était vraiment plein, et je me disais qu’ils n’allaient quand même pas arrêter 800 personnes… »

« RÉDUIRE LES NUISANCES »

La patrouille en question est formée de membres des YMCA du Québec, mandatés par l’arrondissement pour « améliorer la quiétude dans le secteur du parc », où « augmentent les nuisances liées à l’achalandage ». La surveillance vise dans un premier temps le parc Laurier, mais la patrouille pourrait aussi intervenir au square Saint-Louis, dans les parcs Jeanne-Mance et La Fontaine et dans « d’autres endroits névralgiques de l’arrondissement », prévient Le Plateau-Mont-Royal.

Le coût des nouvelles équipes de médiation, qui seront sur le terrain tous les jours de juin, juillet et août, s’élève à 24 894 $.

Or leur présence seule n’est pas suffisante pour assurer la quiétude dans le parc, estime le conseiller municipal pour le district du Mile End, Richard Ryan. Sur la page Facebook de Félix Gravel, le conseiller a dénoncé hier le bruit, la pollution causée par les barbecues et des événements impliquant des personnes qui auraient uriné sur des terrains privés.

« Solutions recherchées… On a mis une équipe de jeunes médiateurs, pour convaincre la police d’y aller mollo… Mais si les nuisances restent plus fortes que l’animation et la convivialité recherchées, c’est évident que nos solutions alternatives de prévention devront continuer d’être couplées par de la répression policière », a écrit M. Ryan.

Au Service de police de la Ville de Montréal, le porte-parole Raphaël Bergeron n’a pas été en mesure de confirmer la tenue d’une opération policière samedi soir au parc Laurier. « On est là pour mettre en application les règlements municipaux qui sont en vigueur dans les différents arrondissements », a-t-il cependant déclaré, pour rappeler que les règlements ne sont pas les mêmes d’un arrondissement à l’autre.

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