Identité sexuelle

« Les profs me soutenaient et savaient comment réagir »

Née garçon, Olie Pullen avait 8 ans quand elle a commencé à avoir des comportements plus féminins. Sa transition a été lente, laissant le temps à ses parents et à son école primaire de s’adapter. Aujourd’hui âgée de 13 ans, Olie a migré vers l’école secondaire et semble vivre une adolescence sans embûches. Un état de bien-être qu’elle doit à la compréhension de sa famille, mais aussi à des écoles au personnel ouvert d’esprit, qui l’ont acceptée telle qu’elle était : comme une fille.

« Je n’ai jamais été stressée… Peut-être la première fois que j’ai porté une jupe. Ou encore ma première brassière. »

Quand on demande à Olie comment elle a géré le stress relié à l’affirmation de son identité alors qu’elle n’était qu’une enfant, la question tombe à plat. La jeune doit creuser dans sa mémoire pour retrouver un moment angoissant lié à son changement d’identité, qu’elle a vécu sous les yeux de ses petits camarades de classe.

« C’était facile pour moi, c’était une bonne école pour que je puisse être moi-même, estime-t-elle. Je n’ai jamais eu d’intimidation, les profs me soutenaient et savaient comment réagir en cas de situation extrême. »

Et la fameuse question des salles de bains ? Quand elle s’est sentie à l’aise, Olie s’est mise à utiliser les toilettes des filles. Tout simplement.

« MAMAN, JE SUIS UNE FILLE »

Cette fameuse journée où Oliver a décidé de devenir Olie, sa mère avoue avoir été un peu secouée… Mais le choc a été bref. La famille est allée consulter un professionnel et la situation a vite été acceptée chez les Pullen-Sansfaçon.

« Après, j’ai rencontré l’école primaire. Je les ai avisés que mon enfant porterait des vêtements plus féminins et je leur ai demandé de sensibiliser la classe, se souvient Annie Pullen-Sansfaçon, la mère d’Olie. Tout le monde s’est mis à utiliser son [nouveau] nom et les pronoms féminins. »

« C’est bon quand les profs te soutiennent , ajoute Olie à ce sujet. Ça aide vraiment beaucoup l’enfant à devenir ce qu’il ou elle veut être. »

Mme Pullen-Sansfaçon estime à une cinquantaine le nombre de familles montréalaises membres de l’organisme Enfants transgenres Canada, dont elle est la vice-présidente. Les témoignages qu’elle entend lui ont rapidement fait réaliser que tous les établissements ne faisaient pas preuve d’autant d’ouverture que celle d’Olie.

« Il y a des écoles qui ne veulent pas reconnaître les identités trans, d’autres qui refusent d’honorer le nom ou le pronom parce que les changements n’ont pas été apportés à l’état civil, ou encore, il y a des écoles qui ne permettent pas au jeune de porter l’uniforme du genre qu’il veut », déplore Mme Pullen-Sansfaçon.

ATTENTION ! CONFUSION

« Une fois, il y a eu une grosse erreur avec un remplaçant. Il prenait les présences et cherchait quelqu’un de l’autre sexe, se souvient la mère d’Olie. Il a répété le mauvais nom jusqu’à temps que des enfants de la classe lui expliquent. Olie était figée, humiliée. »

Cette anecdote résume le principal problème auquel les élèves trans s’exposent. C’est que même s’ils changent de nom, la réattribution sexuelle ne peut se faire légalement qu’à partir de 18 ans. Ainsi, la mention du genre apparaît un peu partout, comme sur les listes de présence, les horaires, le code permanent, la carte étudiante, etc.

« C’est extrêmement problématique, parce que certains jeunes ne s’identifient pas ouvertement », déplore Mme Pullen-Sansfaçon, qui se souvient d’avoir réimprimé l’horaire d’Olie, d’avoir mis du liquide correcteur sur le « M » pour « masculin » qui figurait dans le coin et d’avoir fait une photocopie pour que tout passe inaperçu. Le but n’étant pas de se cacher, dans le cas d’Olie, mais simplement d’éviter de revoir jour après jour, en consultant son horaire, quel était son sexe à la naissance.

Par ailleurs, le passage de l’école primaire à l’école secondaire – un moment stressant pour l’ensemble des jeunes – s’est bien déroulé pour la jeune fille. En fait, ses parents s’étaient d’abord assurés de trouver une école où elle serait acceptée en tant que fille, une chance que toutes les familles n’ont pas.

« Si tu as juste une école de quartier et que l’école ne coopère pas, tu n’as pas beaucoup de choix. Il y a beaucoup de fardeaux laissés sur le dos des jeunes et de leurs parents. Mais on avance dans la bonne direction. »

— Annie Pullen-Sansfaçon

La mère de famille souhaite que toutes les écoles se dotent d’une politique d’inclusion des personnes trans. Elle a d’ailleurs collaboré à l’élaboration des lignes directrices adoptées par la CSDM.

« C’est la multitude de barrières auxquelles ils sont confrontés dans la société qui les rendent pas bien. Alors je me suis dit que j’allais travailler à changer les barrières, plutôt que de changer mon enfant. »

Pendant que sa mère milite pour les droits des enfants trans, Olie grandit et continue de se découvrir, de rire, de s’amuser avec ses amies à qui elle n’a rien caché de son passé. Elle « exprime sa joie de vivre » dans sa troupe de théâtre, se passionne pour l’astronomie et joue les mannequins pour une agence de casting. Une vie d’adolescente, quoi !

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