OPINION AUTOMOBILES

LOI ZÉRO ÉMISSION
Légiférer ou pas ?

La loi vient équilibrer le rapport de force et accélérer le mouvement vers le consommateur

Encore une fois, l’industrie automobile tente de ralentir le transfert technologique de l’essence vers l’électricité, transfert nécessaire et déjà amorcé dans la plupart des pays démocratiques, et cela sous différentes formes. Le Québec a choisi de légiférer en instaurant une loi zéro émission.

L’industrie automobile et sa filière ont eu amplement l’occasion de présenter leurs arguments contre la loi zéro émission en commission parlementaire et par l’entremise des médias. Les partis politiques québécois ont appuyé l’adoption de la loi zéro émission en octobre 2016… à l’unanimité !

Il se vend plus de 450 000 voitures neuves au Québec chaque année. La voiture électrique n’a pas à satisfaire les mêmes critères commerciaux que la voiture à essence.

À partir du moment où la voiture à essence a un substitut, ce qui est le cas maintenant, il faut se faire à l’idée et aller de l’avant, et ceci est particulièrement vrai au Québec, paradis de l’hydroélectricité.

Depuis l’apparition des voitures électriques sur le marché, il y a quelques années, on nous a répété sans cesse que ces véhicules sont trop chers et qu’ils n’ont pas assez d’autonomie. Pourtant, l’autonomie a pratiquement triplé (Chevrolet Bolt) et il n’est plus nécessaire de payer plus de 100 000 $ (Tesla) pour s’en procurer un. Ces jours-ci, l’Institut économique de Montréal (IEDM) nous informe que la technologie n’est pas encore prête. Que faut-il maintenant pour satisfaire l’IEDM ? 1000 km d’autonomie ? Une voiture solaire ? La fusion nucléaire ?

rompre le statu quo

L’instauration de la loi a pour but d’accélérer un mouvement trop lent vers l’électricité à cause d’une industrie qui prône le statu quo. L’industrie peut faire mieux et plus rapidement. Si elle avait fait preuve de bonne foi envers la filière électrique, il n’y aurait pas de loi zéro émission.

Renversons donc plutôt le fardeau de la preuve. Écoutons les arguments de l’industrie automobile pour trouver des solutions concrètes et immédiates. Les manufacturiers automobiles sont pleins de ressources pour développer les innovations technologiques requises pour nous sortir de l’ère du pétrole.

S’il n’y a pas d’alternative, le gouvernement se voit alors obligé de légiférer. L’industrie n’a qu’à s’en prendre à elle-même pour son manque de vision et sa résistance au changement durant les dernières décennies.

Les manufacturiers ne veulent pas de loi, mais sont bien heureux que les gouvernements subventionnent la voiture électrique. Cela leur permet de maintenir des prix plus élevés. La loi zéro émission vient équilibrer le rapport de force et accélérer le mouvement vers le consommateur. Les subventions, temporaires durant l’introduction de la technologie, sont compensées par l’imposition de quotas, bien minimes, variant entre 1 et 3 % des ventes. La France et le Royaume-Uni ont décidé de bannir complètement les voitures à essence en 2040. Cela équivaut à 4,5 % par année de ventes de voitures électriques, à la condition de commencer maintenant.

L’opération est à coût nul pour l’État. La perte de taxes sur les carburants est compensée par la vente d’électricité, provenant des surplus d’Hydro-Québec, et par l’activité économique provenant de la diminution des importations de pétrole, qui siphonnent l’économie québécoise de 14 milliards par année.

Quant aux subventions, une simple taxe sur l’essence de 2 cents le litre suffirait pour les financer. Une forme de bonus-malus, qui existe dans de nombreux pays, à des niveaux beaucoup plus élevés. Deux cents ne représentent que 35 $ par année pour l’automobiliste moyen.

L’IEDM avance que le coût du programme fera augmenter le prix des voitures à essence de 175 $. Bien que cela n’ait été observé nulle part ailleurs où de telles législations sont déjà en place, pour les manufacturiers qui ne voudront pas offrir de voitures électriques, le coût des crédits augmentera inévitablement leurs dépenses. Ceux qui en vendront n’auront pas à payer ces crédits. On peut compter sur le système capitaliste pour équilibrer les prix, cela s’appelle la compétition.

La voiture électrique est une bonne chose pour le citoyen, pour l’État et pour l’environnement. Elle est fiable et agréable à conduire.

Les économies de carburant et de frais d’entretien ainsi que la subvention à l’achat font qu’elle se compare en termes de prix à une voiture de 20 000 $. Le prix moyen payé au Canada pour une voiture neuve est de 26 000 $. Il est faux de dire qu’elle est chère, ce n’est plus vrai.

Pour terminer, nous encourageons vivement les manufacturiers automobiles à soumettre des propositions plus efficaces que la voiture électrique afin de réduire les gaz à effet de serre. En attendant, le gouvernement doit continuer à légiférer afin de les aider à réfléchir.

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