Nouvelle vague de licenciements chez Bombardier

Les salariés anxieux, les investisseurs méfiants

Les 7500 licenciements décrétés hier par Bombardier ont plongé les salariés de l’entreprise dans l’anxiété et fait redouter aux investisseurs de nouvelles mauvaises surprises sur le plan financier.

« L’atmosphère est pourrie sur le plancher, tout le monde est dans l’incertitude et se demande : “Est-ce que ça va être moi ?” », a déploré David Chartrand, coordonnateur québécois de l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIMTA).

Le syndicaliste a rappelé qu’en février, la multinationale québécoise avait annoncé l’élimination de 7000 postes, dont 2400 au Québec. 

« Ils n’ont pas encore fini de mettre des gens à la porte qu’ils s’y remettent déjà. »

– David Chartrand, coordonnateur québécois de l’AIMTA

Des 7500 licenciements annoncés hier, environ 2000 seront réalisés au Canada, dont 1500 au Québec. À l’échelle mondiale, les deux tiers des suppressions d’emplois concerneront la division ferroviaire, où des installations pourraient fermer leurs portes, et le tiers touchera les activités aéronautiques. Cette répartition ne sera pas nécessairement suivie au Québec, où Bombardier compte quelque 15 000 employés, a précisé hier un porte-parole de l’entreprise, Olivier Marcil.

Mario Guignard, président du syndicat des employés de Bombardier Transport à La Pocatière, où sont notamment assemblées les nouvelles voitures du métro de Montréal, a prédit que les compressions allaient avoir « peu ou pas d’impact » là-bas. 

« On s’apprête à augmenter notre cadence de production, alors ce sont plutôt des embauches qu’on entrevoit », a-t-il affirmé à La Presse. Bombardier Transport emploie environ 1500 personnes au Québec, dont 950 au siège nord-américain, situé à Saint-Bruno.

En fait, le PDG de Bombardier, Alain Bellemare, a indiqué hier qu’en parallèle aux 7500 licenciements, l’entreprise pourrait embaucher jusqu’à 3750 travailleurs pour ses programmes d’avions C Series (Mirabel) et Global 7000 (Toronto et Montréal) ainsi que ses contrats ferroviaires majeurs, en Ontario et au Royaume-Uni notamment.

Par contre, le dirigeant n’a pas exclu une nouvelle vague de licenciements au cours de la prochaine année. « On va continuer à prendre les décisions qui s’imposent pour accroître notre productivité et réduire notre structure de coûts », a-t-il laissé tomber.

De mauvais augure ?

De façon générale, les analystes financiers ont salué ces nouveaux licenciements, y voyant une preuve de plus que M. Bellemare est déterminé à prendre des « décisions difficiles » pour redresser Bombardier, qui traîne une dette de près de 9 milliards US. Certains d’entre eux y ont toutefois vu un mauvais présage pour les résultats du troisième trimestre, qui seront divulgués le 10 novembre.

« Même si nous croyons que les réductions de main-d’œuvre sont nécessaires, nous croyons aussi que l’ampleur des coupes est possiblement motivée par la faiblesse continue du secteur de l’aviation d’affaires ou des progrès plus lents que prévu dans la mise en œuvre du plan de transformation de l’entreprise à l’horizon 2020 », a ainsi écrit Benoit Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, dans une note.

« Nous croyons que [les licenciements] seront perçus de façon circonspecte par le marché en raison de la préoccupation potentielle qu’il s’agit d’une réponse à un environnement difficile sur le plan des revenus », a renchéri Tim James, de la Banque TD.

D’ici 2020, Bombardier ambitionne de faire passer ses revenus totaux de 18 à 25 milliards US et sa marge d’exploitation de 3 à 7 %.

Rappelons que le mois dernier, Bombardier a réduit de 15 à 7 le nombre d’avions C Series qui seront livrés cette année en raison de problèmes de production chez le motoriste Pratt & Whitney. Par conséquent, l’entreprise utilisera davantage de flux de trésorerie que prévu.

Bombardier s’attend à réaliser des économies annuelles récurrentes de 500 à 600 millions US avec les deux vagues de licenciements instaurées depuis le début de l’année. Les indemnités de départ et autres coûts connexes entraîneront des charges financières de 475 millions US à 575 millions US pour Bombardier d’ici la fin de 2017.

Après avoir reculé de 2,2 % à l’ouverture de la Bourse de Toronto, hier, l’action de Bombardier a clôturé à 1,76 $, en baisse de 1,1 %.

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