Opinion  Charge de travail des médecins

Pas des paresseux !

Les médecins ont tout simplement la possibilité de faire des choix que la plupart d’entre nous ne peuvent pas faire

Les médecins de famille ne sont pas paresseux et lorsque le président de leur syndicat, M. Godin fait dévier le débat sur ce terrain, son seul objectif est d’éviter de parler des vraies affaires.

Le ministre de la Santé, lui, aime parler des vraies affaires, surtout en médecine de famille. Malheureusement, il n’a pas encore déposé publiquement toutes les vraies études. Celles-ci confirmeraient, s’il faut en croire ses propos, une offre de travail insuffisante chez des milliers de médecins de famille et permettraient que la discussion porte non pas sur le diagnostic, mais sur le traitement de la maladie dont les effets se font cruellement sentir chez des millions de Québécois. Au passage, tous auront noté que le ministre est beaucoup moins loquace sur les enjeux en spécialité…

Que les médecins travaillent fort lorsqu’ils sont au travail, tous en conviennent. Que les médecins travaillent fort et à plein temps, tous s’attendent à cela. Qu’un médecin de famille sur deux choisisse de travailler à temps partiel, tous en souffrent.

Les médecins sont des acteurs économiques dont le comportement est assez semblable à celui de la population en général lorsque vient le temps de partager son temps entre celui consacré au travail et celui consacré à d’autres activités. Que feriez-vous s’il vous était possible de travailler en moyenne 2 ou 3 jours par semaine et de gagner entre 150 000 $ et 200 000 $ par année?

Soyez honnêtes! Probablement que la majorité d’entre vous choisirait de travailler à temps partiel et c’est sans surprise le choix que font des milliers de médecins famille. Les médecins ne sont pas paresseux, ils ont tout simplement la possibilité de faire des choix que la plupart d’entre nous ne peuvent pas faire, car ils exercent leur profession dans un environnement de travail exceptionnel dont ils sont les seuls à bénéficier au Québec.

En effet, les médecins sont les seuls travailleurs autonomes à ne récolter que les avantages de ce statut et à bénéficier au surcroît de formidables conditions de travail et de rémunération négociées avec l’État par quelques initiés à l’abri des regards indiscrets.

Les médecins choisissent le type de pratique professionnelle qui répond le mieux à leurs intérêts, de même que le temps qu’ils y consacreront dans le but légitime de maximiser leur satisfaction. De plus, ils ont la possibilité de s’incorporer, ce qui est fiscalement très avantageux pour plusieurs. Toutefois, les médecins n’assument aucun des risques associés au statut de travailleurs autonomes. En effet, les vrais travailleurs autonomes sont en compétition avec leurs concurrents pour trouver des clients et les fidéliser. Ils font affaire avec des clients qui ne sont pas toujours solvables et ils peuvent, en période de récession, subir des baisses significatives de revenus.

Les médecins ne sont pas paresseux, mais leur profession s’exerce dans un cadre législatif et règlementaire qui favorise la satisfaction individuelle de leurs intérêts professionnels au détriment de la satisfaction des besoins de la société qui finance un système de santé couteux et qui s’attend à ce que chaque personne dont l’état de santé le requiert reçoive dans des délais raisonnables des services médicaux pertinents et de qualité.

L’objectif ne doit pas être d’augmenter la charge de travail quotidien des médecins, mais plutôt d’augmenter le nombre de jours de travail des médecins, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, qui, sur une base régulière, travaillent annuellement trop peu de jours. Est-ce déraisonnable?

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