Opinion

Osons rêver l’enseignement des sciences au primaire !

Dans son article « Tous des cancres en sciences ? » du numéro de septembre de la revue Québec Science, le journaliste Joël Leblanc présente la situation peu enviable de l’enseignement des sciences au primaire et au secondaire au Québec.

Au primaire, on rappelle la formation initiale insuffisante des enseignants, une grille-horaire laissant très peu de place aux sciences, un décalage entre le temps nécessaire à la préparation des cours et l’achat du matériel nécessaire, etc. Pas surprenant que les enseignants du primaire se sentent dépassés et peinent à accorder le temps nécessaire pour éveiller les élèves aux sciences et aux technologies.

Depuis plusieurs années, l’école et les organismes de médiation, notamment le Réseau Technoscience, Éclairs de sciences, la Boîte à science, les Débrouillards, les Scientifines (et bien d’autres), collaborent pour trouver des solutions aux défis de l’enseignement scientifique au primaire. Que ce soit en organisant des concours scientifiques, en proposant des outils pédagogiques ou de l’accompagnement en classe, en produisant des textes de vulgarisation scientifique, en offrant des animations, de la formation, etc., les retombées sont nombreuses pour les enseignants du primaire.

Or, malgré toutes ces initiatives, force est de constater que la situation ne s’améliore pas de manière significative. Et si des solutions innovantes pouvaient également émerger de l’école ?

En admettant en premier lieu qu’un enseignement scientifique de qualité est nécessaire pour préparer nos élèves aux défis croissants qu’impose une société tournée vers les technologies. En reconnaissant également que les exigences inhérentes à l’enseignement de la lecture, de l’écriture et des mathématiques pour un enseignant titulaire ne laissent qu’une place accessoire aux autres disciplines scolaires. Difficile de concilier ces deux réalités lorsque, en plus, l’enseignant ne se sent pas suffisamment outillé pour enseigner les sciences.

Personnes-ressources

Et si on confiait l’enseignement des sciences à un enseignant spécialisé comme c’est le cas en éducation physique, par exemple ? L’idée est attrayante, mais il faudrait pour cela revoir la tâche des titulaires de classe. Qui plus est, plusieurs enseignants intègrent déjà bien les sciences aux autres disciplines en travaillant par exemple l’écriture de textes de vulgarisation (en français) ou en présentant les résultats de leurs expériences lors d’exposés oraux.

Ce qu’il ne faut pas perdre de vue dans ce débat, c’est que notre milieu scolaire s’appuie aussi sur des ressources précieuses en sciences, pensons notamment aux conseillers pédagogiques qui se dévouent corps et âme avec bien souvent des moyens limités pour changer cette réalité. Et que dire de ces enseignants passionnés qui ne comptent pas leurs heures pour construire des bateaux avec leurs élèves, aller avec eux sur le terrain retourner les roches à la recherche d’insectes ou encore solliciter l’aide des équipes-écoles pour organiser des défis scientifiques ?

Pourquoi ne pas miser sur les intervenants de nos écoles pour bâtir un réseau de promotion des sciences de l’intérieur ?

Un tel réseau pourrait faire partager les bons coups des intervenants du milieu parce qu’il y en a de nombreux. Pensons à ces enseignants qui, se sentant moins outillés en sciences, vont enseigner l’univers social (ou une autre discipline) dans une autre classe pendant que leur collègue expérimente avec leurs élèves.

Ou alors, ces techniciens en travaux pratiques du secondaire qui prêtent du matériel scientifique de qualité aux enseignants du primaire de leur commission scolaire. Ou encore, ces directions d’école qui sollicitent l’aide de tous les employés d’une école (pensons notamment aux éducatrices et aux surveillantes) pour appuyer à l’occasion les enseignants en classe lors d’expérimentations, pour aider à aménager des mini-laboratoires temporaires ou approvisionner en matériel tout en reconnaissant les heures investies.

Or, en présentant son Plan d’action numérique en éducation au printemps dernier, le ministre Roberge, lui-même ex-enseignant du primaire, était conscient des défis supplémentaires que cela ajoute d’intégrer les technologies numériques en classe. Si les occasions de miser sur le numérique sont nombreuses en sciences, encore faut-il que le milieu scolaire québécois reçoive les appuis, la reconnaissance et les ressources nécessaires pour mener à bien autant d’ambition.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.