Chronique 

Marie Kondo dans vos finances perso

Je m’en confesse. Le ménage n’est pas ma plus grande force. Ranger le tiroir à épices ne me procure aucune joie particulière. Pas plus que plier la montagne de bas qui traîne au-dessus de ma sécheuse.

Alors, ne me demandez pas comment je me suis retrouvée à devoir écrire sur Marie Kondo à l’issue d’une curieuse séance de remue-méninges avec mes collègues de la section Affaires, un genre de paquet voleur pour des sujets d’articles. Hein, moi ? Une chronique sur la reine du rangement ? Erreur de casting !

Mais à bien y penser, les préceptes de la Japonaise qui prône la joie par le ménage s’appliquent plutôt bien aux finances personnelles. Alors, pourquoi ne pas saisir l’occasion pour mettre de l’ordre dans ma paperasse ? Voilà ma résolution de la nouvelle année toute trouvée.

J’ai donc lu le livre La magie du rangement. J’ai visionné quelques épisodes de la série Tidying Up with Marie Kondo, dont la diffusion sur Netflix a fait bondir les dons aux organismes de charité l’an dernier. Et je me suis procuré des chemises de toutes les couleurs pour mon classeur.

Et voilà ! Prête pour l’opération Marie Kondo version finances perso. Vous me suivez ?

D’un coup sec

Avec la méthode KonMari, il faut faire de la séance de rangement un événement spécial. Il faut se livrer à cet exercice une bonne fois pour toutes et d’un seul coup.

« Si vous rangez un peu chaque jour, vous perdez votre enthousiasme et vous n’en finirez jamais de ranger. »

— Marie Kondo

D’accord pour l’approche radicale. Je vide mon classeur au grand complet et j’étale tous les papiers sur le plancher. Maintenant, impossible de reculer.

Un seul endroit

Marie Kondo suggère ensuite de ranger tous les éléments d’une même catégorie au même endroit. Pour les papiers, le bureau semble l’endroit tout désigné pour éviter l’éparpillement.

Or, les gens commettent souvent l’erreur de ranger les choses aux endroits où il est le plus facile de les utiliser. Dans mon cas, le tiroir de la cuisine devient un fourre-tout bordélique où s’empilent les enveloppes qui tardent à être ouvertes. Et il y a de la paperasse sur le guéridon de l’entrée, sur le buffet de la salle à manger, dans ma table de nuit, mon sac à main, mon portefeuille…

« Le principe selon lequel il est plus pratique de tout avoir à portée de main est erroné », tranche Marie Kondo. Quand tout est au même endroit, il est plus facile de trouver rapidement ce qu’on cherche.

Mon nouveau mot d’ordre : centraliser.

Jetez d’abord, rangez ensuite

Par où commencer ? Par jeter tous les papiers qui ne sont pas absolument essentiels, répond Marie Kondo. Ce sera plus facile de ranger ensuite, car il restera moins de paperasse. Il faut éviter à tout prix de devenir un expert en stockage.

Exit les relevés de compte, les carnets de chèques. Bien sûr, il faut conserver les garanties, mais Marie Kondo suggère de se débarrasser des manuels d’instruction qui les accompagnent. « Jetez-y un œil. Les avez-vous déjà utilisés ? », demande-t-elle. Heu… moi oui. Mais il est vrai qu’on trouve tout sur le web.

Avant de tout flanquer à la poubelle, passez vos précieuses archives à la déchiqueteuse. On trouve de petits appareils à moins de 100 $. Sinon, des entreprises comme Docu-Dépôt viennent à domicile déchiqueter vos papiers sous vos yeux et fournissent même un certificat de destruction.

Quoi conserver ?

Pour déterminer ce qu’il faut conserver, Marie Kondo suggère de prendre les objets dans ses mains et de voir s’ils nous procurent de la joie. Mais cette approche s’applique mal aux finances perso.

Ici, il faut y aller de manière plus rationnelle. Certains documents doivent être conservés éternellement : certificat de naissance, diplômes, etc.

Pour les déclarations de revenus, l’Agence du revenu du Canada conseille de les garder durant six ans. Mais dix ans, ce n’est pas trop.

Si vous avez des maisons ou des placements hors REER, il est crucial de conserver tous les documents (preuves d’achat, factures des travaux, etc.) pour être en mesure d’établir le gain en capital à la revente, parfois 20 ans plus tard.

Et ne négligez pas les documents remis par vos anciens employeurs. Autrement, vous pourriez laisser filer une vieille rente de retraite à laquelle vous avez droit.

Dans quel ordre ?

Marie Kondo préconise une formule ultrasimple de rangement des papiers qui comporte seulement deux classeurs : un pour les documents à conserver et un pour ceux en traitement… qui devrait idéalement être vide.

J’adhère à l’idée de rassembler au même endroit toute la paperasse à traiter. Mais pour les papiers à conserver, je crois qu’il est préférable d’avoir un système plus sophistiqué.

« On peut s’en sortir avec 10 ou 15 dossiers étiquetés », m’a assuré Jean Dupriez, ancien planificateur financier et auteur du guide Le classement des documents personnels.

Sa méthode divise les documents en quatre grandes catégories (identité, finances, biens et possessions, événements) qui peuvent ensuite être subdivisées selon les besoins de chacun.

« Il faut faire un effort pour se discipliner. Mais quand on l’a fait, ça devient incroyablement simple », jure M. Dupriez.

Comment classer vos papiers

Identité

État civil (naissance, baptême, mariage)

Santé (carnet de santé, dossier médical)

Formation et carrière (diplômes, contrats d’embauche, distinctions)

Finances

Opérations (relevés bancaires, abonnements, emprunts, factures, impôts)

Assurances (vie, invalidité, auto, habitation)

Capital et retraite (plan financier, placements)

Biens et possessions

Résidences (baux, titres de propriété, hypothèque, évaluations municipales, documents liés au condo, rénovations)

Biens et équipements (inventaire des biens, documents liés à l’auto, garanties)

Événements et divers

Événements (vacances, anniversaires, procès)

Divers (sports, photo, musique, généalogie)

Source : Le classement des documents personnels, de Jean Dupriez

L’ordi à profit

Sans contredit, l’ordinateur permet de réduire la quantité de papier. Mais il ne faut pas se fier les yeux fermés à vos comptes en ligne (comptes bancaires, investissements, télécoms, etc.). Il serait sage d’imprimer un relevé chaque année pour le conserver dans vos archives personnelles, suggère M. Dupriez.

Gare aussi aux factures électroniques et au paiement automatique. Cet outil est bien pratique pour éviter de passer tout droit, ce qui coûte cher en intérêts.

Mais il faut surveiller vos relevés régulièrement afin de déceler les erreurs potentielles.

De plus, il faut être vigilant avec les abonnements qui se multiplient (Netflix, Spotify…). Beaucoup d’entreprises offrent leurs services gratuitement pour quelques mois. Ensuite, l’abonnement passe sur la carte de crédit éternellement… même si on n’utilise pas le service. À la longue, ça finit par coûter une petite fortune.

Simplifier pour économiser

Ultimement, le grand ménage de la paperasse devrait être un élément déclencheur pour vous aider à prendre des décisions financières payantes.

Si vous avez une collection de cartes de crédit, éliminez celles qui ne sont pas essentielles. Centralisez vos comptes de banque, regroupez vos investissements.

Vous y verrez plus clair et votre conseiller pourrait réduire ses frais de gestion grâce à l’économie d’échelle.

Avez-vous encore besoin d’assurance vie ? Peut-être pas si vos enfants ont grandi et que vous approchez de la retraite. En annulant votre police, vous économiserez les primes d’assurance.

Et si vous n’avez pas magasiné vos assurances auto et habitation depuis quelques années, c’est le temps de prendre le téléphone. Les écarts de prix vont du simple au triple. Alors un simple coup de fil peut vous faire économiser des centaines de dollars.

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