ÉDITORIAL

« Du charbon, beaucoup de charbon ! »

Les mensonges peuvent changer le résultat d’une élection, mais ils ne peuvent pas changer la réalité.

La preuve en est cette promesse faite par Donald Trump de ressusciter une industrie moribonde, celle du charbon.

Rien de plus simple aux yeux du président désigné, qui a en main un plan en deux points « faciles » : 

1) Abolir les subventions aux énergies renouvelables « très très chères et peu efficaces » ;

2) Éliminer la réglementation « stupide » qui « force des centaines de centrales à charbon à fermer ».

Et tadam ! Du jour au lendemain, les États-Unis pourront se remettre à produire « du charbon propre, beaucoup de charbon propre ! »

« Nous allons ainsi remettre au travail nos mineurs de charbon », a-t-il scandé à répétition dans les cinq plus grands États producteurs de houille, dont quatre ont fini par lui fournir une claire majorité.

Par où commencer ? Par l’expression qui réunit les mots « charbon » et « propre » ? Par le fait que l’ennemi de la houille n’est ni l’éolien ni le solaire ? Ou par la promesse de faire revivre artificiellement une industrie polluante au moment où les énergies renouvelables créent des emplois à la tonne plutôt que des émissions ?

Il y a tout de même une limite à vouloir revenir à un passé révolu. C’est un peu comme si Donald Trump obligeait Sony à fabriquer des Walkman jaunes !

Le charbon est une industrie qui a fait son temps aux États-Unis. Les statistiques le disent. Les tendances et les prédictions le disent. La presque faillite du géant Peabody le confirme, de même que la baisse constante de l’emploi et de la production de charbon.

Le responsable ? Le gaz de schiste qui, malgré ses inconvénients, a bouleversé le paysage énergétique ces 10 dernières années au point de pousser des centrales et des mines à la fermeture.

Parallèlement, l’industrie des énergies renouvelables a connu un essor fulgurant grâce en bonne partie à l’aide des États et à l’injection de fonds privés.

En seulement trois ans, de 2011 à 2014, le charbon a décliné de 9 % aux États-Unis, tandis que l’éolien a grimpé de 40 % et le solaire… de 577 % !

Résultat : il y a aujourd’hui, selon la firme GTM Research, plus d’Américains qui travaillent dans le solaire… que dans l’ensemble du secteur de l’extraction du gaz et du pétrole !

« Nous voyons clairement des gagnants pour les 25 prochaines années – le gaz naturel, mais surtout l’éolien et le solaire – remplaçant le charbon, champion des 25 dernières années », a indiqué le directeur de l’Agence internationale de l’énergie cette semaine.

Bien sûr que le futur locataire de la Maison-Blanche aura le pouvoir d’aider le charbon. Mais aussi puissant soit-il, il n’est pas tout-puissant.

Il ne pourra empêcher les États d’aider l’éolien, il ne pourra arrêter la baisse drastique des prix du solaire, il ne pourra renverser la baisse des investissements dans les énergies fossiles, il ne pourra à lui seul faire grimper la demande de charbon dans le monde.

Bref, Donald Trump pourra nuire à l’essor des énergies renouvelables en tant que président, mais il n’aura pas le pouvoir de les stopper.

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