Actualité expliquée

« Je ne peux pas demander des garanties pour des emplois qui n’existent pas, a dit Jacques Daoust. On n’invente pas des commandes. Les pertes de commandes, ce sont [dans les] avions d’affaires. Quand le marché de ces avions-là ralentit, il est à peu près normal que les emplois ralentissent. Ils n’ont pas d’ouvrage. »

— Le ministre des Transports Jacques Daoust, qui a indiqué hier qu’il n’avait pas l’intention de demander des garanties à Bombardier quant au nombre d’emplois minimum à conserver.

— Sébastien Templier, La Presse

L’actualité expliquée

Bombardier a-t-elle vraiment besoin d’Ottawa ?

Mercredi, Bombardier en a mis plein la vue en annonçant une importante commande d’avions C Series de la part d’Air Canada et le licenciement de 7000 salariés. Nous tentons de répondre aux questions qui subsistent au terme de cette semaine mouvementée.

Comment a évolué le nombre d’emplois chez Bombardier ces dernières années ?

Compte tenu des suppressions de postes annoncées cette semaine, le nombre total de salariés de Bombardier devrait s’élever à environ 63 900 à la fin de 2017, soit 16 % de moins que le sommet de 76 400 atteint à la fin de 2013. Au sein des activités aéronautiques, le nombre d’employés sera passé de 37 700 à 23 750, soit une chute de 37 %.

Est-ce que Bombardier a vraiment besoin d’une aide de 1 milliard US du gouvernement fédéral ?

Apparemment non. Avec les investissements de 1,5 milliard US de la Caisse de dépôt et placement dans Bombardier Transport et de 1 milliard US de Québec dans la C Series, la multinationale pourra bientôt compter sur une encaisse de 6,5 milliards US. « Bombardier devrait avoir suffisamment de liquidités pour couvrir le lancement et l’accroissement de la production de la C Series », estime l’analyste Walter Spracklin de RBC, reflétant le sentiment général parmi ses collègues. Mais Bombardier a quand même réitéré son appel à Ottawa cette semaine, soutenant qu’un investissement fédéral constituerait un « appui fort » à la nouvelle famille d’avions. « L’intérêt pour la C Series a augmenté avec l’investissement du gouvernement du Québec, nous en voyons l’effet positif dans nos discussions avec les clients », a affirmé mercredi le PDG de Bombardier, Alain Bellemare.

Est-ce que la famille Bombardier-Beaudoin est prête à renoncer au contrôle de l’entreprise pour recevoir un investissement d’Ottawa ?

L’émission d’actions de 1,1 milliard réalisée par Bombardier il y a un an a fait en sorte que les droits de vote détenus par les quatre descendants de Joseph-Armand Bombardier sont passés de 54,4 à 49,7 %. La famille continue néanmoins de contrôler l’entreprise grâce aux actions détenues par les ex-dirigeants Laurent et Pierre Beaudoin. Selon certains médias, dans le cadre des discussions à propos d’un éventuel investissement fédéral dans Bombardier, le gouvernement Trudeau réclame un assouplissement de la structure d’actions à votes multiples qui permet à la famille de contrôler l’entreprise. Cette semaine, M. Bellemare n’a pas voulu dire si Bombardier était prête à faire un geste en ce sens.

Combien totalisent les contributions directes versées par le gouvernement fédéral à Bombardier au fil des ans ?

Depuis 1966, Bombardier a présenté 50 demandes d’aide financière à Ottawa et obtenu 1,3 milliard par le biais de différents programmes, dont 350 millions pour la C Series. Selon Industrie Canada, l’entreprise a remboursé 543 millions jusqu’ici. À cette aide fédérale s’ajoutent les 450 millions reçus par De Havilland, un avionneur acquis par Bombardier en 1992. Plus spécifiquement, dans le cadre du défunt programme Partenariat technologique Canada, Bombardier a reçu 139,6 millions pour ses jets régionaux CRJ et remboursé 186,4 millions (le gouvernement touche des redevances pour chaque avion vendu). Dans ce programme, « Bombardier est l’une des entreprises dont le dossier de remboursement est le plus fort », a indiqué hier Isabelle Rondeau, porte-parole du constructeur.

Combien a coûté à Ottawa le sauvetage des constructeurs automobiles General Motors et Chrysler en 2009 ?

Le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’Ontario ont investi ensemble 2,9 milliards dans Chrysler et 10,9 milliards dans General Motors pour leur permettre d’éviter la faillite. Ottawa a fourni les deux tiers de cette somme totale de 13,7 milliards, soit 9,2 milliards. Par le biais de remboursements de prêts, d’intérêts, de compensations, de dividendes et de ventes d’actions, les deux gouvernements ont récupéré environ 10,2 milliards, de sorte qu’ils ont perdu 3,5 milliards dans l’opération, dont 2,3 milliards pour Ottawa. Notons par ailleurs que depuis 1982, GM a reçu au moins 362 millions d’Ottawa dans le cadre de divers programmes d’aide financière.

Les 45 avions CS300 qu’Air Canada promet d’acheter ne seront ajoutés au carnet de commandes de Bombardier que lorsqu’un contrat officiel aura été signé, au cours des prochaines semaines. Quelles sont les commandes fermes que Bombardier a reçues pour sa C Series jusqu’ici en plus de la lettre d’entente avec Air Canada ?

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.