Mr. Money Mustache

Battant, économe et… retraité à 30 ans

Le Canadien Peter Adeney, connu sous le pseudonyme de Mr. Money Mustache, est devenu une vedette du web grâce à son blogue suivi par plus de 700 000 personnes par mois. Il y explique comment sa femme et lui ont travaillé raisonnablement, dépensé judicieusement… et pris leur retraite à 30 ans. La Presse s’est entretenue avec M. Adeney, qui habite au Colorado.

Vous êtes devenus indépendants financièrement à l’âge de 30 ans, en 2005, sans gagner à la loterie ou recevoir d’héritage. Comment vous y êtes-vous pris ?

Notre stratégie était plutôt simple : nous avons dépensé bien moins de 50 % de nos revenus durant nos neuf années de travail, et nous avons investi nos économies de façon efficace.

J’ai pris soin de ne pas m’endetter durant mes études et j’ai choisi un domaine, l’ingénierie, qui était à la fois intéressant et payant. Une fois diplômé, j’ai pris chaque décision de manière à maximiser les retombées positives tout en minimisant les dépenses et les impacts environnementaux.

Par exemple, j’ai toujours habité à distance de vélo du travail, et donc minimisé mes déplacements en voiture. J’ai partagé mes premiers logements avec des amis plutôt que d’habiter seul. Nous cuisinions souvent nos repas et allions peu au restaurant. Plus tard, j’ai acheté ma première maison – une véritable épave – et j’ai passé mes fins de semaine à la rénover. La recette est simple : travailler fort, dépenser avec modération et investir les surplus chaque mois dans de simples fonds négociés en bourse (FNB).

Ce que la plupart des gens ne réalisent pas, c’est la vitesse à laquelle les dépenses « banales » siphonnent votre chèque de paye. Je vois encore des gens avec des revenus de 30 000 $ par année acheter des consommations à 7 $ dans un bar, ou emprunter 20 000 $ pour une voiture neuve. 

C’est très facile de dépenser tout ce que vous gagnez, peu importe votre revenu. La seule façon d’améliorer votre situation est de trouver des façons intelligentes de diminuer vos dépenses.

Quand vous parlez de « frugalité », bien des gens entendent « privation ». Vous aimez répondre que nous vivons dans un monde d’abondance qui aurait été impossible à imaginer pour les générations précédentes…

Absolument. J’irais même plus loin : la plupart d’entre nous n’ont aucune idée de ce qu’est la privation. La privation, c’est voir votre corps s’affaiblir et devenir frêle parce que vous n’avez pas suffisamment à manger. Mais rouler 10 km sur votre vélo de montagne dans une piste cyclable enneigée de Montréal par une journée d’hiver, pendant que votre corps bien nourri est protégé du froid par des vêtements modernes spécialisés, ce n’est pas de la privation. C’est tout simplement relever un léger défi, qui va vous rendre plus fort et plus en santé.

Un des effets secondaires de l’application de cette attitude à toutes les décisions de la vie est de vous permettre d’accumuler d’importantes sommes d’argent extrêmement rapidement.

Votre maison est, de votre propre avis, luxueuse, et les gens sont surpris lorsqu’ils la visitent…

Oui. J’aime dire que mon style de vie n’est pas particulièrement frugal, il est tout simplement un peu moins ridicule que la moyenne.

Tout le monde peut mettre en application pratiquement tout ce que je suggère. La clé, c’est de décider ou non si c’est important pour vous. Tout le monde a la capacité de changer la façon dont il ou elle mange, changer de quartier, changer d’emploi, de ville ou même de pays. D’acquérir de nouvelles aptitudes et d’avoir un mode de vie plus actif qui vous rend en meilleure santé.

La seule règle, c’est que vous devez tout remettre en question. Toujours. Réalisez qu’il y a toujours place à l’amélioration, que chaque dépense est un choix – votre choix. Et qu’il n’y a aucune raison de se plaindre – prenez l’énergie que vous auriez dépensée à vous plaindre, et utilisez-la pour changer ce que vous n’aimez pas dans votre vie.

Beaucoup de lecteurs de votre blogue communiquent leurs expériences. Quelles sont celles qui vous ont le plus frappé ?

Je me souviens d’un gars marié, avec enfants, qui m’a écrit après avoir lu mon blogue durant quelques mois. Il m’a expliqué qu’au lieu de réunir sa famille pour une grande discussion sur l’argent et les dépenses, il s’est tout simplement mis à changer ses propres comportements.

Il m’a écrit : « Ma femme ne lit pas votre blogue et ne s’intéresse pas autant que moi à notre taux d’épargne et à nos investissements. Mais elle aime l’homme que je suis devenu. Elle aime quand je rentre à la maison de bonne humeur parce que je n’ai pas eu à être assis dans ma voiture dans les bouchons. Elle aime quand je vais jouer dehors avec les enfants plutôt que de m’asseoir sur le divan et regarder la télé. Quand je cuisine plus de repas pour ma famille et passe mes fins de semaine à réparer des choses autour de la maison plutôt que d’aller prendre un verre et jouer au golf avec des collègues. C’est plus important pour elle que le fait que nous ayons soudain un important surplus d’argent dans notre compte bancaire à la fin du mois. »

J’ai reçu ce courriel il y a environ trois ans, et j’y pense encore avec autant de joie. J’espère que bien des gens vivent de grandes expériences comme celle-là.

Six conseils de Mr. Money Mustache

Vendez votre voiture

Si vous avez besoin d’une voiture pour aller travailler, c’est que vous habitez trop loin de votre travail. « Déménagez à une distance de marche ou de vélo, quitte à louer un logement plutôt que d’acheter – et vous aurez des centaines de dollars à la fin du mois pour ajouter à vos placements ou rembourser vos dettes. » Si vous n’avez pas le choix, allez vers un modèle d’occasion fiable « comme une Honda Civic ».

Six conseils de Mr. Money Mustache

Pulvérisez vos dettes

« Être endetté n’est pas un état normal. C’est le résultat d’une erreur, et votre mission est de corriger cette erreur. » Si vous avez des milliers de dollars en dettes de consommation (à l’exception de la dette hypothécaire), la réaction logique n’est pas d’aller souper au restaurant ou d’aller au cinéma. « Mangez des patates pour souper s’il le faut, mais pulvérisez cette dette ! Elle disparaît vite quand on y consacre toute son attention. »

Six conseils de Mr. Money Mustache

Calculez sur 10 ans

Un lunch acheté près du travail coûte 15 $ par jour. Au bout de 10 ans, cette habitude vous aura réellement coûté 62 101 $, soit la somme que vous auriez si vous aviez investi cet argent dans un fonds négocié en Bourse (FNB) et obtenu le rendement historique du S&P 500, avec réinvestissement des dividendes. Après 20 ans ? Calculez plutôt 209 117 $. « Peu de gens réalisent que changer de simples réflexes de consommation peut faire la différence entre fauché et millionnaire. »

Six conseils de Mr. Money Mustache

Économisez 25 fois vos dépenses

Comment savoir si vos placements sont suffisants pour que vous puissiez être indépendant financièrement ? Vos placements doivent représenter 25 fois vos dépenses annuelles, et il est prudent de vivre en dépensant 4 % de son portefeuille par an après avoir cessé de travailler. « Plus vos dépenses sont basses, plus vous pouvez arrêter de travailler tôt. Un travailleur qui économiserait 50 % de ses revenus pourrait prendre sa retraite après 17 ans. Économisez 75 % et vous avez fini de travailler après après 7 ans. »

Six conseils de Mr. Money Mustache

Achetez des FNB

Investissez vos économies chaque mois dans des fonds négociés en Bourse (FNB) qui suivent le marché canadien, américain ou mondial, et dans des obligations. Les gens passent trop de temps à comparer les différents véhicules d’investissement, et pas assez à réduire leurs dépenses courantes, écrit Mr. Money Mustache. « Augmenter votre taux d’épargne est votre tâche numéro un, car c’est le seul chiffre que vous contrôlez entièrement. »

Six conseils de Mr. Money Mustache

Travaillez heureux

Vous aimez tellement travailler que l’idée de la retraite à 30, 50 ou même 65 ans vous laisse de glace ? Aucun problème, écrit Mr. Money Mustache. « Devenez indépendant financièrement de toute façon. Vous pourrez alors travailler purement pour le plaisir, et au passage négocier des conditions plus avantageuses – ne pas avoir à assister à des réunions interminables, par exemple – et vous consacrer entièrement à ce que vous aimez dans votre travail. »

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