Opinions  Laïcité

Courrier

Le chameau et le trou de l’aiguille

Le gouvernement Couillard donne encore une fois l’impression d’agir alors qu’on constate en tassant le nuage de fumée qu’il n’en est rien. C’est comme en santé. Je suppose que c’est ça, les politiciens, maintenant : ils pensent d’abord et avant tout aux amis et/ou aux partisans. Pour les autres, on fait « l’effort » de créer une illusion de changement. Et on tente par tous les moyens de manipuler l’information pour faire passer le chameau dans le trou d’aiguille. La question qu’on doit se poser de plus en plus est : c’est qui les imbéciles ? Ceux qui nous prennent pour des imbéciles ou nous ?

— Pierre Lemelin

Les religieuses et le tchador

Ce vêtement ressemble étrangement à ce que portaient nos religieuses qui ont tant apporté à la société québécoise. Est-ce si différent du tchador ?

— C. Pinard

C’est louche

Pourquoi avoir retiré le crucifix des écoles, avoir montré la porte aux bonnes sœurs et aux frères au nom de la laïcité afin de placer d’autres signes religieux ? Je doute de la parole des gens qui prônent cette laïcité. Pourquoi tant de changements pour 2 % de la population ? Vous allez me répondre « pour le mieux vivre ensemble ». Je n’ai jamais entendu parler autant d’immigration depuis les cinq dernières années, avec les fameux accommodements déraisonnables.

— Alain Lebel

Et les hommes ?

Après avoir tant tergiversé sur le couvre-chef des musulmanes et d’avoir accouché d’une souris, que fera-t-on de ces mâles, artisans de leur domination, qui tiennent le couperet suspendu sur leur vie ? Comment feront Philippe Couillard et sa ministre pour couper encore une fois la poire en deux ?

— Sylvia Pelletier-Gravel

Illogique

Seriez-vous d’accord que les enseignants du primaire ou du secondaire affichent leurs opinions politiques ou philosophiques en classe ? Approuveriez-vous un prof arborant un macaron de la ligue athée ? Alors, pourquoi permettre à un prof d’afficher, devant un auditoire d’âge encore influençable, ses croyances religieuses ? Des parents d’autres religions n’auraient-ils pas lieu de se plaindre ? Ne voyez-vous pas que si un parent critique, ou même ridiculise le professeur, il fera perdre à celui-ci son autorité dans les autres matières aussi ? La position de M. Journet (« Honneur abject », 11 juin), comme celle du gouvernement Couillard, sont illogiques.

— Bernard Terreault

Opinion  Laïcité

Un rapport qui n’est pas une recette

Lorsque le Parti québécois évoquait le rapport Bouchard-Taylor, il n’évoquait qu’un consensus apparent

Dans les débats sur une future législation concernant la neutralité de l’État, depuis quelques années, on évoque toujours la « position du rapport Bouchard-Taylor ». Il faut pourtant rappeler que cette supposée position fut le résultat d’un consensus temporaire entre les deux coprésidents et qui fut clairement rompu par la suite sur certains points précis.

La commission Bouchard-Taylor réunissait une quinzaine d’experts, mais le rapport, fut au terme de l’exercice, signé uniquement par les deux coprésidents.

Le hic, c’est que nous avons compris plus tard que les avis de Bouchard et Taylor différaient sur certains points du rapport, en particulier les points les plus débattus depuis lors. L’un et l’autre ont sans doute consenti à des compromis dans le rapport, ce qui est habituel pour un tel exercice. Mais en lisant et écoutant leurs publications et propos subséquents, il apparaît très clairement que les deux coprésidents ne s’entendaient pas, ou plus, sur des points majeurs.

L’un des points qui se trouvent toujours au centre de nos débats concerne le port de symboles religieux par les représentants de l’État. Certes, le rapport proposait d’en interdire le port au sein des professions qui exercent une fonction d’autorité, soit les policiers, les juges et le président de l’Assemblée nationale. Or, il est bien connu à présent que Charles Taylor n’endossait pas (ou n’endosse plus) cette restriction, comme l’a montré le livre qu’il a signé avec Jocelyn Maclure, en 2010.1

Bouchard, plus proche des groupes nationalistes laïques, a sans doute gagné cette concession. En limitant ainsi le port des symboles religieux, il espérait sans doute récolter quelques appuis de la part de ceux qui étaient les plus opposés au port de symboles. Toutefois, les coprésidents s’accordaient quant à la nécessité de garder le visage découvert dans le cas de situations exigeant notamment une communication publique.

Bref, lorsque le Parti québécois, dans le cadre des débats sur une charte de la laïcité, évoquait le rapport Bouchard-Taylor, il n’évoquait qu’un consensus apparent, ignorant les clarifications qui sont venues par la suite. Lorsque les commentateurs de l’actuel projet de loi pour la neutralité évoquent le rapport Bouchard-Taylor pour expliquer que l’étendue du projet de loi est plus limitée que celle proposée dans celui-ci, ils font aussi fi de l’importante différence entre les deux présidents. L’option retenue par le gouvernement actuel est finalement plus en phase avec celle élaborée depuis par Charles Taylor (et Jocelyn Maclure).

Cette confusion permet néanmoins de révéler un problème que représente parfois le type d’exercice qu’est une commission publique.

À travers le monde, on trouve depuis les années 2000 plusieurs commissions et rapports similaires sur les problèmes posés par la diversité culturelle et religieuse. La plupart d’entre eux présentent les mêmes problèmes. Les rapports sont rédigés comme s’il existait, parmi les membres de la commission, un consensus quant au cadre de réflexion et aux recommandations. Certains introduisent des notes faisant état de dissidences, mais sans en intégrer les perspectives dans le corps du rapport. L’ennui est que cette apparence de consensus contraint les dirigeants, par la suite, à se positionner pour ou contre le rapport.

Mes études de plusieurs commissions similaires dans le monde, au cours des dernières années, m’ont amenée à découvrir une formule pertinente parmi ces exercices publics ardus et conduisant souvent aux impasses du pour et du contre. Cette formule fut empruntée par la Norvège. Le rapport final propose plusieurs pistes théoriques et pratiques possibles dans le détail, mais divergentes. Au sein de la commission, les différents membres se sont ralliés à l’une ou l’autre piste ; on en trouve au moins cinq très distinctes. L’effet pratique est indéniable. Plutôt que d’avoir à endosser ou non une voie proposée dans un rapport tentant de trancher les problèmes par une seule solution, les décideurs s’en servent comme d’une boîte à outils, et peuvent situer leurs choix en regard de plusieurs options disponibles.

Ne devrait-on pas être mieux informés et plus prudents quand on se réclame des conclusions de Bouchard-Taylor ?

1 C. Taylor et J. Maclure, Laïcité et liberté de conscience, Boréal, Montréal, 2010, pp. 58-59.

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