Industrie forestière

Ils sont jeunes et ils y croient

Dolbeau-Mistassini — Les temps sont durs pour les travailleurs forestiers du Québec, en particulier pour les plus jeunes, qui sont les premiers à perdre leur emploi en cas de coup dur contre l’industrie. Certains y croient toutefois, et malgré l’adversité, ils défendent leur travail et leur région. Condensé de deux témoignages.

« C’est pas Montréal, mais on est bien »

David Boivin, 36 ans, responsable santé-sécurité et environnement à la scierie Petit Paris, Saint-Ludger-de-Milot

« J’ai commencé ici comme mesureur [des billots], mais j’ai perdu mon poste. Après, je me suis retrouvé journalier sur appel dans l’usine à faire toutes sortes de tâches. J’ai décidé de retourner faire un certificat à l’Université du Québec à Chicoutimi pour me recycler. On venait d’avoir notre troisième enfant et ça n’a pas été facile, mais je me suis replacé et on a eu notre quatrième enfant. Faut juste avoir de la volonté. On vit ici et on est très heureux. Ça me dérange quand je lis que notre région se vide et qu’elle est en train de mourir. Non, c’est pas Montréal ici, mais on est bien. »

« On est des batailleurs »

Jessy Bouliane, 26 ans, opérateur de machinerie à la scierie de La Doré et éleveur de bovins

« Avant, je travaillais comme opérateur de machinerie lourde en forêt, mais mon beau-père m’a convaincu de venir travailler à la scierie. Je vais voir si j’aime ça. En plus, j’ai un élevage de 70 bœufs, chez nous, à Normandin. Je travaille 40 heures par semaine à la scierie et 40 heures par semaine avec le bétail. On vient d’avoir notre premier bébé avec ma blonde. Notre petite a 9 mois. On vient tous les deux d’une famille nombreuse et on veut quatre ou cinq enfants. Pour l’avenir de l’industrie, j’ai quand même un peu confiance parce qu’on est des batailleurs. Le peuple québécois en a mis de l’huile de coude pour défricher ! »

Les Français à la rescousse ?

L’industrie forestière vit un grand paradoxe : elle est en déclin depuis plusieurs années, mais elle manque gravement de main-d’œuvre. Constat généralisé sur le terrain : les jeunes fuient la forêt. « La dernière crise a laissé des traces : ça a fait peur aux jeunes qui ne veulent pas se lancer dans cette industrie », explique Alain Paradis, de la coopérative Petit Paris. » Les jeunes d’aujourd’hui sont de leur temps, constate Gilles Lapointe, directeur général du cégep de Saint-Félicien où on offre des programmes en foresterie. « Les valeurs dominantes d’aujourd’hui sont celles de l’écologie et de la protection de l’environnement et les jeunes ne sont pas attirés par la forêt », dit M. Lapointe. Dans le programme d’aménagement de la forêt, le cégep forme seulement six ou sept personnes par année, bien en deçà des besoins de l’industrie. Récemment, la compagnie Résolu a annoncé qu’elle aurait plus de 800 postes à pourvoir dans les prochaines années, un objectif qui sera difficile à atteindre. La relève de l’industrie forestière passe peut-être par… la France. « Nous avons lancé des discussions avec des lycées français pour attirer de jeunes Français chez nous, dans le domaine de la forêt », indique Gilles Lapointe, dont le cégep accueille déjà une centaine d’élèves de l’Hexagone.

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