Enfant insignifiant !

Leur premier Tremblay

Parmi les sept interprètes d’Enfant insignifiant ! chez Duceppe, deux en sont à leur toute première pièce de Michel Tremblay : le vétéran Sylvain Marcel et la recrue Gwendoline Côté. Ça s’appelle vivre un trac plus ultra !

Tout le monde souhaite jouer du Michel Tremblay. Parler sa langue, côtoyer ses personnages archétypaux, vivre leurs petits et grands drames. Certains le font très tôt, d’autres jamais. En raison de son parcours atypique, Sylvain Marcel y arrive à 53 ans. Gwendoline Côté, 25 ans, réalise déjà son rêve à sa toute première présence sur une grande scène montréalaise.

« Ça commence fort, c’est immense pour moi, avoue-t-elle. Jouer du Michel Tremblay mis en scène par Michel Poirier chez Duceppe, c’était un de mes rêves. Michel Tremblay, il m’a tellement fait de bien. Ce n’est pas parce que tu viens de la classe moyenne ou basse que tu n’as pas le droit d’exister. Son théâtre me parle. J’y reconnais des traits de caractère des gens de ma famille. Nana, c’est la mère universelle. Louise Tétrault, dans Demain matin, ce n’est pas facile, sa vie. Je peux m’identifier à ça. »

La jeune femme a vu deux fois Encore une fois, si vous permettez, présentée au printemps 2016 chez Duceppe. Avant d’entrer au Conservatoire de Montréal en 2013, elle avait terminé un DEC en éducation à la petite enfance dans son Trois-Rivières natal. Un peu de théâtre de rue et quelques rôles à la télé plus tard, la voici dans le rôle de Ginette, amie d’enfance du jeune Michel.

« Je n’ai fait pas du Tremblay au Conservatoire, seulement au secondaire dans des collages de textes. J’étais dans le chœur des waitress : deux clubs sandwichs… »

« Michel Tremblay, c’est notre Shakespeare, notre Molière. Avec la langue d’ici. Pour moi qui viens de Trois-Rivières, c’était difficile au Conservatoire au départ, la diction. J’arrivais vraiment de Trouâ-Riviêêêêre. »

— Gwendoline Côté

« un bel honneur », selon Sylvain Marcel

Sylvain Marcel, lui, ne perd pas espoir de jouer un jour Léopold dans À toi, pour toujours, ta Marie-Lou.

« C’est toujours tardif, mes affaires. J’ai commencé à temps plein dans le métier à 37 ans. C’est dans ma routine depuis le début. Michel Poirier connaît Michel Tremblay plus que moi. Je connais ses pièces majeures, mais je n’ai jamais lu ses romans. Je vais m’y mettre. »

Le comédien débarque chez le célèbre dramaturge québécois en étant blanc comme neige. Il se dit privilégié d’avoir été choisi pour Enfant insignifiant !

« C’est une belle histoire, comme l’a raconté Michel Poirier. À un spectacle de Céline Dion, il était assis derrière Michel Tremblay qui venait de lui remettre le texte. Les deux avaient pensé à moi pour faire le père de Michel Gabriel ! C’est un bel honneur, tout un début de jouer son père. Je suis très content. »

« C’est un beau personnage, quelqu’un qui était bon, pas autoritaire du tout, une bonne pâte. Il ressemble à Nana, il a pris ses plis. C’est Nana en masculin. »

— Sylvain Marcel

Pour Gwendoline Côté, le bonheur, c’est de travailler avec lui et les autres comédiens plus expérimentés de la distribution, dont, évidemment, Henri Chassé (Michel) et Guylaine Tremblay (Nana, la mère de Michel).

« C’est vraiment chouette, je travaille avec des gens de cœur, dit-elle. Ils sont passionnés, travaillants. Je peux discuter avec eux. Eux aussi ont leurs doutes parce que c’est une création, quand même. Je me dis que tous ceux avec qui je travaille ont vécu ces moments-là et sont passés au travers. Si j’ai du plaisir à jouer avec mon partenaire Henri et que je suis dans la peau de Ginette, je sais que ça va bien aller. »

« Faudrait pas que j’aie un blanc d’une minute, ce serait plate, confesse de son côté Sylvain Marcel. C’est du Tremblay, j’ai le trac, mais, en même temps, j’ai très hâte de jouer la pièce et de voir la réaction des gens. On a fait une italienne et tout le monde était en larmes à la fin. Michel Tremblay a une écriture tellement particulière. »

Une écriture qui a changé avec le temps, mais une constante demeure, le vrai monde dont il parle. Ce qui en fait le classique des classiques québécois.

« Éventuellement, j’aimerais jouer d’autres rôles de Tremblay, il y a beaucoup de matériel pour les femmes, dit Gwendoline Côté. C’est lui qui a amené la tragédie dans le théâtre québécois. Germaine Lauzon [Les belles-sœurs], c’est tragique. Et c’est le premier auteur qui a présenté monsieur et madame Tout-le-Monde sur scène. »

« Je fais de belles découvertes, ajoute Sylvain Marcel. Avec Guylaine Tremblay et Danielle Proulx, on a du fun en maudit. Ça va être bien bon. Vous allez adorer ça. C’est drôle et très touchant en même temps. Ce sont des personnages proches de Michel Tremblay. »

Chez Duceppe, du 13 décembre au 3 février 2018

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