ÉDITORIAL ACCÈS AUX SOINS DE SANTÉ

Toujours aussi malade !

Le plus récent coup de sonde de Statistique Canada le confirme : l’accès aux soins de santé est particulièrement difficile au Québec. Dans tout le pays, seul le Yukon fait pire que nous, montre l’enquête sur les besoins de santé non comblés publiée hier. La tendance, malheureusement, se maintient.

Statistique Canada a demandé aux participants s’ils avaient éprouvé des besoins de santé pour lesquels ils n’avaient pu obtenir de soins dans la dernière année. Plus de 14 % des Québécois ont répondu par l’affirmative. À part le Yukon, où presque 17 % de la population déclare des besoins non comblés, il n’y a pas pire endroit au pays pour être mal en point. À l’inverse, moins de 8 % des résidants de la Saskatchewan et de Terre-Neuve-et-Labrador disent ne pas avoir réussi à se faire soigner, ce qui est nettement mieux que la moyenne canadienne (11,2 %).

Ces résultats tirés de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes 2014 sont tristement conformes à ceux de plusieurs études publiées au cours des dernières années. La dernière en date, dont nous vous avions parlé il y a quelques semaines, montrait que l’accès aux soins était beaucoup moins bon au Québec que dans les 10 pays évalués dans le cadre de l’enquête du Fonds du Commonwealth. Et ce n’était pas des patients, mais des médecins qui avaient été interrogés !

Seul aspect positif des chiffres publiés hier : les besoins non comblés sont moins fréquents chez les Québécois de 65 ans ou plus (8,4 %). Le système, dans son incapacité à répondre à la demande, semble au moins prioriser la population la plus susceptible de souffrir de maladies chroniques, donc d’avoir besoin de suivi.

Les réponses sont similaires chez les jeunes de 12 à 19 ans (8,8 %), mais cela pourrait s’expliquer par d’autres facteurs. Ils ont peut-être moins besoin de soins, et seraient donc moins à risque de ne pas en recevoir. Il se pourrait aussi que les problèmes de santé les plus fréquents dans ce groupe d’âge (accidents, maladies, etc.) soient d’une urgence ou d’une gravité plus susceptible de leur assurer un traitement.

Le revers de cette médaille, c’est que les problèmes d’accès frappent de plein fouet la population active.

Chez les 20 à 64 ans, jusqu’à un Québécois sur cinq n’a pas eu les soins dont il a eu besoin dans la dernière année. On parle de la population qui étudie, travaille, s’occupe de ses enfants ou d’un parent âgé… et qui paie le gros des impôts servant à financer ce système de santé public. Faute de pouvoir se faire soigner, certains vont endurer leur mal, mais d’autres vont s’automédicamenter ou se retrouver en congé forcé. Peut-on imaginer plus contreproductif ?

Et si ces patients n’ont pas réussi à être vus, ce n’est certainement pas parce qu’ils sont allés encombrer les urgences inutilement :  moins de 15 % des Québécois qui ont voulu consulter sans y parvenir ont frappé à cette porte. La majorité (47,3 %) s’est plutôt cognée le nez sur un bureau de médecin ou une clinique sans rendez-vous. La faiblesse de la première ligne, comme on le voit, demeure la clé du problème.

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