Radio

Une semaine avec les rois du matin

Ils informent et divertissent les Montréalais tous les matins dès 5 h 30. La Presse a partagé, à l’aube, le quotidien des équipes des six émissions de radio matinales les plus écoutées à Montréal.

Puisqu’il faut se lever

98,5 fm Animée par Paul Arcand de 5h30 à 10h

Paul Arcand pilote depuis 14 ans son émission matinale, un créneau qu’il affectionne particulièrement. « Je suis quelqu’un du matin. Ce qui est le plus excitant, c’est de se dire qu’on va être les premiers à informer les gens de ce qui se passe. J’ai lu une étude aux États-Unis qui disait que le premier niveau d’inquiétude des gens qui se réveillent était de savoir ce qui s’était passé pendant qu’ils dormaient », explique l’animateur.

5 h 15. Les recherchistes Lise Lapointe et Jessyka Dumulong sont déjà en studio pour régler les derniers détails de l’émission, qui est sur le point de débuter. « Leur rôle est fondamental », confie Paul Arcand. « On doit régulièrement changer les plans le matin quand il arrive quelque chose. Leur travail est de trouver les bonnes personnes et de les convaincre, tôt le matin, de me parler. Si tu n’as pas le bon invité, ça affecte tout le reste », ajoute l’animateur.

« Il faut réserver les intervenants et ça va très vite ! » La veille du passage de La Presse aux studios du 98,5 fm, une tuerie s’est produite dans une école de Floride. L’après-midi même du drame, les recherchistes s’envoyaient leurs listes de contacts dans la région pour réagir rapidement, explique Lise Lapointe, qui travaille à l’émission de Paul Arcand depuis 14 ans. Sa collègue Jessyka Dumulong est justement en train de contacter par l’entremise de Facebook une mère de famille québécoise à Parkland, où s’est déroulé le drame.

Arrivée à son bureau dès 4 h 30, Monic Néron prépare ses quatre interventions à l’émission. « Je travaille beaucoup la veille, alors, le matin, je dois faire le tour de ce qui a pu se passer la nuit auprès des corps policiers. Tout ce que j’ai pu préparer peut prendre le bord si un meurtre ou un évènement est survenu », explique la chroniqueuse aux affaires judiciaires. Habituée au rythme de vie matinal, Monic Néron convient que le manque de sommeil est « un boulet que tu traînes toute la journée ». « Après l’émission, il m’arrive de devoir couvrir des procès. Pendant celui de Guy Turcotte, tout le monde savait quand j’allais faire ma sieste. J’ai toujours un oreiller et une doudou dans mon auto ! »

Dans le studio de Radio circulation, Marc Brière surveille les dizaines de caméras de la Ville de Montréal et du ministère des Transports. « Mais les meilleures informations viennent du public. J’ai des réguliers », lance le chroniqueur circulation de Puisqu’il faut se lever depuis 2004. « En fonction des informations, je peux faire des demandes pour bouger les caméras auprès du centre de gestion de la mobilité urbaine. » Marc Brière est bien souvent le premier témoin des accidents. « Ça prend un certain détachement. C’est parfois grave. Mais il faut continuer à faire son travail, trouver des options pour les automobilistes à l’écoute. »

Richard Marquis met en ondes et produit l’émission depuis 14 ans. « Ils m’ont appelé pour rejoindre le 98,5 fm à l’époque où Paul est arrivé », se rappelle-t-il. « Richard et moi avons une complicité naturelle. On est l’un en face de l’autre pendant quatre heures trente. Il est souvent capable de lire dans mes pensées. Parfois, pendant une pause, je vais lui écrire quelque chose sur un bout de papier et il réagit toujours très vite ! », confie Paul Arcand à propos de son complice, qui fait également les montages des parodies diffusées à Puisqu’il faut se lever.

Chroniqueuse Arts et spectacles depuis six saisons, Émilie Perreault doit, comme tous ses collègues, gérer un horaire atypique. Avec une petite difficulté supplémentaire : elle couvre des spectacles qui ont bien souvent lieu tard le soir. « Ce n’est pas un sprint, mais un marathon ! Je dois me garder de l’énergie pour passer à travers toute l’année. J’essaie de m’imposer une sortie par semaine, mais, selon les saisons, ça peut être deux. Je suis un peu la ninja du culturel : la dernière entrée dans la salle, mais la première sortie ! » Sa journée débute à 4 h 45 par la lecture des journaux et le montage des extraits sonores qui se retrouveront dans ses interventions.

9 h 40. Les trois recherchistes de l’émission s’affairent en studio pour répondre aux appels des auditeurs pour la tribune téléphonique sur le sujet du jour.

Maude-Véronique Cholette a rejoint l’équipe en août 2009 en tant que recherchiste et agit depuis un an et demi à titre de productrice. « Je suis le chef d’orchestre. Je reçois tous les sujets des collaborateurs par courriel et je dois m’assurer qu’il n’y a pas de dédoublement. Dans les réunions de production quotidiennes avec Paul, on évalue ce qui correspond le mieux aux préoccupations de nos auditeurs et on voit comment on peut amener certains sujets un peu plus loin pour se démarquer des autres. » L’équipe sélectionne la veille la plupart des sujets traités dans l’émission tout en gardant la porte ouverte à l’actualité.

« Après l’émission, on fait une réunion et je sais sur quoi travaillent mes collaborateurs. Mais ça évolue pendant la journée », explique Paul Arcand. L’équipe de recherchistes reste en effet sur le qui-vive jusqu’en fin d’après midi et se relaie le soir pour « booker » les invités du lendemain au gré de l’actualité.

Gravel le matin

ICI Première
Animée par Alain Gravel de 5 h 30 à 9 h

Animateur de Gravel le matin depuis trois ans, Alain Gravel commence à peine à épouser pleinement son nouveau mode de vie. « J’ai toujours été matinal, mais pas à ce point-là ! Je suis debout à 3 h 15. Cette année, je commence enfin à sentir un peu moins le décalage. Ce qui me dérange le plus, c’est de devoir me coucher si tôt, précise-t-il. Pour moi, la radio, ça se passe le matin ! Le plaisir que j’ai est d’arriver à 4 h 30 en studio et de découvrir le premier ce qui se passe. La veille au soir, l’émission est à 70 % déjà bien assise. Mais parfois il faut recommencer à zéro, car l’actualité l’impose. Et j’adore ça ! »

5 h 15. C’est l’heure de la réunion de production avant l’émission. Toute l’équipe repasse un à un les sujets du jour. Lors de notre visite lundi dernier, l’actualité était plutôt tranquille, mais la réalisatrice de l’émission, Stéphanie Leclerc, a décidé de devancer certains sujets avec son équipe de recherchistes. « Les recherchistes sont le nerf de la guerre. C’est notre capacité de nous distinguer », lance Alain Gravel. « La qualité des dossiers qu’on me donne, la rapidité des réflexes, les carnets d’adresses, c’est ce qui va distinguer l’émission des autres, et d’un jour à l’autre », précise-t-il.

6 h 20. Chef recherchiste de l’émission depuis l’automne dernier, Marie-Ève Thibodeau appelle la grand-mère du patineur Samuel Girard, médaillé d’or au 1000 m à PyeongChang, pour une entrevue qui s’est ajoutée le matin même. Un changement de dernière minute qui impose d’annuler la présence d’un autre intervenant. « On est sans cesse à la recherche des sujets qui vont interpeller nos auditeurs, mais aussi des meilleurs intervenants. Il reste à les joindre ! », explique Marie-Ève Thibodeau qui peut compter sur le soutien de deux autres recherchistes (un en studio et un autre au bureau pendant la journée).

Ludovick Bourdages, habituellement recherchiste à l’émission, remplace Yves Desautels à la circulation ce matin-là. Il va sillonner la ville pour rendre compte de l’état des routes tout en répondant aux appels des auditeurs coincés dans la congestion.

6 h 50. La recherchiste Fannie Bussières McNicoll (en remplacement de Catherine Bordeleau) apporte à Alain Gravel le dossier de recherche mis à jour pour son entrevue avec Daniel Bergeron, directeur général de l’Autorité régionale de transport métropolitain. Elle y a inscrit les grandes lignes d’une étude sur l’évolution des transports en commun depuis 2001, des pistes de questions et des articles pertinents.

Pierre Rainville est assis devant la console du studio 17 depuis 2001. « J’ai commencé avec René Homier-Roy ! », lance le metteur en ondes qui a vu se succéder depuis les animateurs des émissions matinales du 95,1 FM. « Disons que je suis rodé. Mais je n’ai pas de contrôle sur une ligne de téléphone qui lâche. Ce sont les inconvénients du direct. Je suis un pilote d’avion, toujours aux commandes ! », précise-t-il.

Katerine Verebely est chroniqueuse culturelle à Gravel le matin depuis janvier 2016. « Yves Desautels est mon voisin et passe me chercher chaque matin à 5 h. Il sort beaucoup au théâtre, alors on jase pas mal ensemble », explique-t-elle. « Tu dois être en forme en studio, alors il faut parfois accepter de ne pas tout couvrir. Si tu sors quatre fois par semaine, tu vas en payer le prix ! C’est sûr qu’il faut que tu aimes ça pour te lever tous les matins », note-t-elle.

Les occasions de sortir du studio se font assez rares pour Alain Gravel au cours de l’émission.

Karima Brikh a rejoint l’équipe il y a deux ans après un remplacement estival. Elle fait la revue de presse et parcourt tous les journaux du monde pour en rapporter l’essentiel en ondes. « La veille, avant de dormir, je prépare quelques sujets au cas où. Dès le matin, à 2 h 45, je commence la lecture de tous les journaux. Je reçois le programme de l’émission très tôt pour m’assurer qu’on parle de tout sans se répéter », précise la chroniqueuse dont le bureau est rempli de magazines et d’articles qui lui serviront pour ses huit interventions.

« On est comme un petit club fermé », lance Alain Gravel à propos de son équipe. « On a une tradition d’apporter des bagels à tour de rôle le matin. Quand je ne viens pas à vélo, c’est moi qui m’en charge », précise-t-il tout en préparant son petit-déjeuner.

L’édimestre Stéphanie Mac Farlane semble mener une course folle pendant toute la durée de l’émission. Responsable du site internet et des réseaux sociaux, elle écrit également les textes à partir des entrevues réalisées en ondes par Alain Gravel. « J’ai des écouteurs qui bloquent le son ambiant pour pouvoir me concentrer, dit-elle. J’ai aussi accès aux caméras en studio pour pouvoir segmenter les entrevues et les relayer sur les réseaux sociaux. »

9 h 15. En réunion juste après l’émission avec la rédactrice en chef de Gravel le matin, Stéphanie Gendron, l’équipe aborde les premiers sujets qui vont être traités le lendemain et discute des possibles intervenants. Vers 15 h, une seconde réunion de production aura lieu par téléphone et une multitude de courriels seront envoyés au cours de la journée.

Debout les comiques !

CKOI
Animée par Martin Cloutier, Patrice Bélanger, Tammy Verge et Billy Tellier de 5 h 30 à 9 h

5 h. Tammy Verge, Sébastien Hurteau et Martin Cloutier se préparent en studio, discutant autour de la table de ce qui fait les manchettes des journaux ce matin-là. « Sébastien est notre carte cachée. On est comme des jumeaux d’intérêts et de valeurs humaines », confie Martin Cloutier au sujet de son producteur au contenu.

Patrice Bélanger se prépare seul dans un bureau avant l’émission. Il lit les journaux et s’informe des plus récents résultats sportifs. « Une des cartes qui nous permettent de nous démarquer des autres stations musicales, c’est la stabilité de notre équipe. C’est très riche pour nos auditeurs, mais surtout pour nous. Je fais de loin la radio que j’écouterais le plus en tant qu’auditeur. Plus que jamais depuis trois ans, je n’ai aucune honte à “rivaliser” avec des pointures [comme Paul Arcand ou Alain Gravel] en disant qu’on a parlé de tel ou tel sujet d’actualité. On est loin du “une pub, une niaiserie, une toune” », lance-t-il.

Patrice Bélanger (à droite) et Tammy Verge participent à tour de rôle à un segment humoristique de l’émission où ils incarnent des personnages, le plus souvent autour de sujets d’actualité. « Au fil du temps, le mandat comique s’est allégé. Mais on a gardé une portion d’humour écrite par Hugo Pellicelli. Il nous envoie nos textes très tard la veille et je lis ça bien souvent dans le taxi », explique Tammy Verge.

Chaque jour, l’humoriste Billy Tellier fait « Le petit monde de Billy », une chronique humoristique de quelques minutes. « J’ai appris à développer des trucs. J’écris ma chronique à 75 % la veille et je me laisse un 25 % pour le jour même, après avoir lu mes journaux pour m’assurer que les gens dont je ris ne sont pas morts », lance-t-il à la blague.

« Je suis producteur au contenu, recherchiste et toute autre tâche connexe ! », s’amuse Sébastien Hurteau, qui est parfois obligé de se cacher sous la table pour répondre aux appels des auditeurs et des collaborateurs sur le point d’entrer en ondes. La configuration du studio oblige en effet l’équipe à faire preuve de discrétion pour communiquer pendant l’émission.

Le metteur en ondes Mario Soucy s’occupe également de piloter des caméras en studio et de mettre certains segments en ligne sur les réseaux sociaux.

Pendant une pause, Patrice Bélanger pique une course au café du coin après avoir pris la commande de tous les membres de l’équipe… alors qu’il ne boit pas de café !

Mardi dernier, l’équipe de Debout les comiques ! recevait deux collaborateurs habituels : le docteur Michael Bensoussan (accompagné ce matin-là de sa fille Sacha), mais aussi notre collègue Stéphanie Grammond, débarquée en studio au pied levé pour parler de son dossier du jour dans La Presse. « Le doc Bensoussan est éminemment pertinent dans son domaine. Lui aussi fait œuvre utile », note Martin Cloutier.

« C’est mon plus long mandat sans interruption à la radio et c’est le créneau horaire que je préfère. Le plus dur pour moi est de me lever le lundi matin quand je suis en show la veille », précise l’animateur et humoriste Martin Cloutier. « On a une soif de comprendre l’actualité et de la préciser tout en étant le plus divertissant possible », précise Martin Cloutier, qui se réjouit du virage pris par la station depuis trois ans. « J’ai étudié en science politique à l’université. C’est vraiment la radio que je rêvais de faire. Il y a dans mon ADN l’humour qui m’a fait connaître du public, mais les gens découvrent aussi mon côté plus social et engagé. Je tripe comme un enfant avec cette émission ! », dit-il.

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