Montréal

Un « anti-Royalmount » sur les ruines de l’hippodrome

Sur les ruines de l’hippodrome, Montréal voit grand. Dans un secteur de la ville bordé par les autoroutes et les chemins de fer, on espère pouvoir développer un nouveau quartier carboneutre, vert et abordable. Projet Montréal veut un « anti-Royalmount », parsemé d’écoles et de commerces, où les citoyens se déplaceraient à pied plutôt qu’en voiture. Des consultations publiques sont déjà prévues cet automne. Voici un survol de la vision de Montréal pour le quartier Namur-Hippodrome, dévoilée hier à l’hôtel de ville.

Un quartier écologique et « avant-gardiste »

Valérie Plante voit le nouveau quartier comme « une occasion en or pour redéfinir l’aménagement des quartiers en fonction des principes de transition écologique ». Diverses initiatives en ce sens sont prévues. D’abord, la Ville désire voir des bâtiments avec certifications environnementales, écoénergétiques et à faibles émissions. On veut réduire la consommation d’eau en mettant sur pied un système de réutilisation de l’eau de pluie et de filtration des eaux grises. De plus, Montréal prévoit un verdissement « massif » pour améliorer la qualité de l’air et pour éviter les îlots de chaleur. On veut développer un réseau d’espaces verts et publics intégrés, dans tout le quartier. Montréal entend installer une bande verte qui longerait les autoroutes et les voies ferrées qui enclavent le secteur. C’est l’occasion, souligne-t-on, de créer un « corridor vert » dans l’axe est-ouest. À terme, Projet Montréal espère voir ces idées se propager un peu partout dans l’île. Pour l’instant, ce sont notamment les projets de Malmö, en Suède, de l’écoquartier des Fabriques à Marseille, en France, et du Funenpark d’Amsterdam, aux Pays-Bas, qui ont servi d’inspiration à la Ville.

Accent sur la mobilité durable

« Le secteur Namur-Hippodrome est centré sur l’automobile depuis un demi-siècle, c’est comme ça qu’il a été prévu, a affirmé la mairesse. Il est grand temps de changer les choses. » Il ne s’agit plus de faire des saillies de trottoir. Montréal veut aller plus loin en proposant un quartier où l’utilisation de la voiture sera secondaire et où les autres modes de transport seront privilégiés. Le déplacement actif et les transports collectifs seront au premier plan. Les gens se déplaceront à pied « le plus possible », a souligné Valérie Plante. De fait, le document explicatif du projet fait comprendre que la vie dans Namur-Hippodrome sera axée sur les besoins des piétons avant tout. Le quartier Namur-Hippodrome comprend la station de métro Namur, sur la ligne orange. À cause de la vétusté de ses alentours, la station Namur est la moins fréquentée du réseau. La Ville entend donc redynamiser le secteur et « maximiser » l’utilisation de cette station en lui accordant une attention spéciale dans l’urbanisme du projet.

Miser sur la mixité

Lors de la campagne municipale de 2017, Valérie Plante misait sur un minimum de 60 % de logements de trois chambres et plus pour Namur-Hippodrome, afin de freiner l’exode des familles vers la couronne. La future mairesse parlait alors de 8000 logements. Le nombre total de logements ayant été révisé à 2000, on ne sait pas encore combien d’entre eux exactement seront voués au logement social. La mairesse insiste toutefois sur la mixité, en concordance avec le règlement « 20/20/20 ». Ce règlement, cher à l’administration actuelle et adopté plus tôt cette année, devrait entrer en vigueur en 2021. Il précise que tout nouveau projet immobilier devra prévoir au minimum 20 % de logements sociaux, 20 % de logements abordables et 20 % de logements familiaux.

Les prochaines étapes du projet

Appels de projets, appels de propositions, concours : pour l’instant, Montréal laisse la porte ouverte à un développement organique du projet. Les urbanistes, architectes et designers pourraient avoir le champ libre afin d’expérimenter avec des idées novatrices, et déposer leurs plans en temps et lieu. Mais avant d’aller plus loin, Montréal préfère attendre les résultats de consultations publiques qui se tiendront cet automne. Après ces consultations qui seront dirigées par l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM), un rapport sera déposé au printemps. Recommandations en main, la Ville préparera un plan d’ensemble, dont le dépôt est prévu pour 2021. Si besoin est, des modifications réglementaires seront apportées au plus tard en 2023, dit-on. Il n’y a aucune estimation du prix d’ensemble pour ce projet colossal.

Ce qu’ils en disent

« La Ville envoie un signal positif, plus de 5000 logements pourraient voir le jour », a affirmé André Boisclair, PDG de l’Institut du développement urbain du Québec. « Nous allons nous entendre vite sur la vision. C’est dans l’exécution du projet que le défi réside, a-t-il ajouté. L’enjeu du financement des infrastructures demeure entier. Nous avons donc hâte d’en apprendre davantage sur les budgets et les échéanciers. » Le doyen des élus municipaux, Marvin Rotrand, a vertement critiqué le projet, avançant qu’il était « aussi réaliste que [l’]ancien projet de ligne rose » de Mme Plante. Selon M. Rotrand, des investissements en infrastructures à hauteur de 100 millions et plus seront nécessaires pour mener le projet à terme, et il faudra aller chercher ce financement ailleurs que dans les coffres de la Ville.

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