Énergie

Hydrocarbures Anticosti pourrait cesser ses activités dès vendredi

Paralysée et sans le sou, Hydrocarbures Anticosti devra cesser ses activités vendredi et mettre à pied ses employés si le gouvernement du Québec continue de refuser de financer sa part des activités d’exploration dans l’île d’Anticosti.

C’est la raison pour laquelle Pétrolia a réclamé hier une injonction contre Ressources Québec, le mandataire du gouvernement et Saint-Aubin, son partenaire dans la société en commandite Hydrocarbures Anticosti, pour qu’ils paient leur part des travaux comme ils se sont engagés à le faire. La requête sera entendue ce matin.

Rien ne va plus dans la coentreprise dont le gouvernement du Québec est le principal actionnaire, et ce, depuis que le premier ministre Couillard s’est publiquement prononcé contre le projet pétrolier à la Conférence de Paris sur l’environnement en décembre 2015, affirme Pétrolia dans sa requête en injonction.

« Une seule conclusion s’impose : suite aux déclarations malheureuses et préjudiciables de l’honorable Couillard, Ressources Québec est devenu l’outil de neutralisation du projet. »

— La direction de Pétrolia

12,7 MILLIONS

Hydrocarbures Anticosti devait recevoir de ses partenaires 12,7 millions pour poursuivre ses travaux d’exploration à Anticosti cet été. Trois forages étaient prévus, pour lesquels l’entreprise a reçu toutes les autorisations nécessaires du ministère de l’Environnement du Québec.

Cet argent, soit 7,2 millions de Ressources Québec et 5,5 millions de Saint-Aubin, n’est jamais venu, malgré les demandes répétées depuis le mois de janvier de l’opérateur du projet, Pétrolia.

Selon les documents déposés en cour, les réunions du conseil d’administration d’Hydrocarbures Anticosti se sont déroulées depuis janvier 2016 dans un climat toxique, alors que le représentant du gouvernement, Iya Touré, qui est aussi président du conseil, et celui de Saint-Aubin, Paul-André Canuel, « ont tout fait pour alimenter la dissension » autour de la table et ont refusé de donner suite à l’appel de capitaux.

DÉMISSION

La situation s’est envenimée au point que l’administrateur indépendant et spécialiste de l’industrie pétrolière recruté en Norvège, Kjell Pedersen, a démissionné le 27 juin dernier.

La paralysie d’Hydrocarbures Anticosti n’a pas empêché le premier ministre Philippe Couillard, hier encore à Hambourg en Allemagne où il se trouve en mission économique, d’affirmer que son gouvernement est contre le projet d’Anticosti, mais qu’il est lié par un contrat signé par le précédent gouvernement.

« Mais non, je ne suis pas à l’aise […]. Mais moi je suis pris avec le contrat que le PQ a signé en campagne électorale, c’est exactement ça la situation ».

— Propos de Philippe Couillard rapportés par La Presse Canadienne

Dans sa requête en injonction, Pétrolia rappelle que les premières discussions sur un éventuel projet d’exploration pétrolière à Anticosti ont été entamées avec le gouvernement libéral de Jean Charest en 2012 et se sont poursuivies avec celui de la première ministre Pauline Marois, qui a conclu l’entente avec Pétrolia et les autres partenaires en 2014.

En vertu de cette entente, le gouvernement du Québec est le principal actionnaire d’Hydrocarbures Anticosti avec 35 % des actions. Les trois autres partenaires, Pétrolia, Corridor Ressources et Saint-Aubin, filiale de l’entreprise française Maurel et Prom, ont 21,7 % des actions chacun.

Pétrolia et Corridor ont mis leurs permis d’exploration dans la nouvelle entreprise, une contribution dont la valeur a été estimée à 100 millions, tandis que Québec et Saint-Aubin se sont engagés à mettre 100 millions pour financer les travaux d’exploration (56,6 millions pour Québec et 43,3 millions pour Saint-Aubin).

23 MILLIONS DÉPENSÉS

Jusqu’à maintenant, 23 millions été dépensés par Hydrocarbures Anticosti, dont 13 millions versés par Québec et 10 millions par Saint-Aubin.

Les forages prévus cet été et les autres travaux prévus dans le programme d’exploration ont pour but de vérifier la présence de pétrole et de gaz dans l’île et d’en estimer la rentabilité.

L’Étude environnementale stratégique (EES), commandée par le gouvernement québécois, a estimé qu’Anticosti pourrait fournir 113 % de la consommation annuelle de gaz naturel du Québec et 9 % de la consommation annuelle de pétrole.

Hydrocarbures Anticosti pourrait encaisser des revenus de 169 milliards et des profits de 75 milliards sur une période de 75 ans, selon les estimations du ministère des Finances incluses dans l’EES.

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