OPINION CHANGEMENTS CLIMATIQUES

La transition vers les énergies sobres en carbone est inéluctable

La semaine dernière, Dialogues pour un Canada vert, réseau de 72 universitaires de partout au Canada, a publié un rapport intitulé Rebâtir le système énergétique canadien : vers un avenir sobre en carbone.

Celui-ci examine comment le système énergétique canadien pourrait être « décarbonisé » dans les décennies à venir, et semble indiquer qu’à l’échelle planétaire, une transition des combustibles fossiles vers des sources d’énergie renouvelable est d’ores et déjà en cours. Ce rapport souligne l’importance, pour le Canada, d’appuyer et même d’accélérer cette transition.

Donald Trump ayant annoncé le retrait des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat, une excellente occasion s’offre au Canada de prendre les rênes de la lutte contre le réchauffement climatique en Amérique du Nord.

En vertu de cet accord, la communauté internationale s’est engagée à faire en sorte que le réchauffement de la planète reste « bien en deçà de 2 °C ». Malheureusement, plusieurs analyses récentes donnent à penser que les objectifs actuels du Canada en matière d’émissions ne permettront pas d’atteindre ce but.

Pourtant, il est clair que notre pays a les moyens de devenir un fer de lance mondial de la lutte contre le changement climatique. Nous possédons de vastes ressources énergétiques renouvelables ainsi que la capacité de les exploiter pour notre consommation et à des fins d’exportation.

Ces dernières années, le Canada a certes pris des mesures pour encourager l’utilisation d’énergies sobres en carbone, dont l’établissement proposé d’un prix pour le carbone à l’échelle nationale, et des projets régionaux visant à favoriser l’abandon progressif de la production d’électricité au charbon ainsi que l’électrification des transports. Ces projets vont dans le bon sens, mais beaucoup reste à faire.

La lutte contre le changement climatique est un enjeu qui se répercute sur presque toutes les décisions prises par les divers ordres de gouvernement. Dans chaque cas, nous devons nous demander si telle décision ou telle politique favorise ou entrave la transition vers une économie sans carbone.

La communauté internationale est à la veille d’assister à une transformation rapide de sa manière de produire et de consommer l’énergie, et nous, Canadiens, devons participer activement à cette mutation pour ne pas rester à la traîne.

Le rapport a toutefois mis en lumière l’existence d’une contradiction majeure entre l’ambition actuellement affichée par le Canada de lutter contre le changement climatique en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre, et son intention d’intensifier l’extraction ainsi que l’exportation des combustibles fossiles riches en carbone, comme le pétrole et le gaz naturel. Ces objectifs sont manifestement antinomiques, et il est difficile de concevoir comment parvenir à les atteindre simultanément.

En outre, il devient chaque jour plus évident qu’à mesure que les mesures de décarbonisation se généralisent à l’échelle internationale, le marché mondial du gaz et du pétrole est appelé à disparaître. Par conséquent, en plus d’être inconciliable avec la lutte contre le changement climatique, continuer à investir massivement dans de nouvelles infrastructures relatives aux combustibles fossiles est devenu un pari risqué.

Ici, au Canada, nous avons peu de raisons de ne pas agir : nous disposons de multiples sources potentielles d’énergie renouvelable ainsi que d’une main-d’œuvre hautement qualifiée que nous pourrions recycler dans les secteurs des nouvelles énergies. Les technologies de production d’énergie propre comportent d’énormes avantages dont pourrait bénéficier la collectivité sur les plans social et environnemental. L’occasion de bâtir un pays plus fort, plus rassembleur et plus écologique nous est offerte : nous devons la saisir.

Les entraves ne sont pas techniques, mais politiques et sociales.

La transition vers une économie reposant sur les énergies sans carbone n’est pas un choix ou une chose que nous pouvons prendre à la légère tout en continuant d’intensifier le recours aux énergies riches en carbone. C’est un impératif pour tous, mais un impératif qui pourrait nous permettre d’assurer notre avenir et celui de nos enfants. Le moment est venu de saisir cette chance.

* Damon Matthews fait partie des principaux auteurs du rapport, tout comme Catherine Potvin, qui a dirigé sa rédaction. Professeure et titulaire d’une chaire de recherche à l’Université McGill, elle coordonne les activités du réseau Dialogues pour un Canada vert.

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