THROMBOSE

« Je ne crois pas que le dopage soit le facteur prédominant »

Chaque cas d’embolie dans la Ligue nationale de hockey suscite des murmures. Des soupçons de dopage émanent de façon plus ou moins subtile.

Il faut pourtant éviter les conclusions faciles, prévient le chirurgien vasculaire et endovasculaire montréalais Pierre Larose.

« D’abord, le cas de Steven Stamkos est totalement différent de celui de Pascal Dupuis, Tomas Vokoun ou Tomas Fleischmann, précise-t-il. Il souffre du syndrome du défilé thoracobrachial : l’une des veines situées entre sa clavicule et sa première côte a été comprimée, et un caillot s’est formé, d’où la thrombose. Les athlètes peuvent développer ce type de problème à force de mouvements répétitifs du bras. »

Pierre Larose a déjà pratiqué le type d’intervention chirurgicale subie lundi par Steven Stamkos.

« Il faut d’abord faire fondre le caillot à l’aide d’une thrombolyse. On insère un cathéter dans la veine, puis on injecte un médicament pour faire fondre le caillot. Puis, on passe à l’intervention chirurgicale.

« Habituellement, on passe par l’aisselle pour enlever un bout de côte afin de décomprimer l’espace, de façon à ce que le caillot ne revienne pas. Si ça avait été un cas de dopage à l’EPO, il y aurait eu simple thrombose et on n’aurait pas eu à l’opérer pour lui enlever une côte. C’est clairement un cas de compression. »

LES CAS SE MULTIPLIENT

Le chirurgien Larose s’est penché sur les autres cas récents survenus dans la LNH.

« Pascal Dupuis avait subi une chirurgie au genou. La phlébite est une complication plus fréquente après les chirurgies orthopédiques. Il avait un facteur prédisposant. D’ailleurs, la vedette du Canadien Howie Morenz était décédée d’une embolie à la suite d’une fracture à une jambe en 1937. »

« Tomas Vokoun avait un problème de coagulation héréditaire. On ne le sait pas jusqu’à ce qu’un événement se produise. Il a voyagé longtemps aussi. L’immobilisation augmente le facteur de risque. Kimmo Timonen avait lui aussi un problème héréditaire, et il a reçu un tir frappé qui a provoqué un traumatisme. »

« On sait que l’EPO et le dopage sanguin augmentent la viscosité du sang, poursuit le Dr Larose. Mais je ne crois pas que le dopage soit le facteur prédominant. »

Il semble pourtant y avoir plus de cas d’embolies que par le passé.

« Dans la population en général, on parle de un à deux cas sur 1000. Est-ce qu’il y en a plus qu’avant au hockey ? Difficile d’en faire la preuve. »

— Le Dr Pierre Larose, chirurgien vasculaire et endovasculaire

« Les symptômes n’étaient pas aussi bien connus à l’époque. Les joueurs d’aujourd’hui sont tellement bien entourés médicalement, dès que l’athlète se plaint de quelque chose, on est à l’affût et on établit le bon diagnostic rapidement, indique le Dr Larose. Avant, les athlètes avaient mal à un mollet et ils pensaient que c’était un claquage. Il y avait peut-être des embolies pulmonaires, mais ils croyaient plutôt être victimes d’un étirement ou d’une pneumonie. »

Par ailleurs, les facteurs de risque sont plus nombreux à notre époque. « Les joueurs voyagent beaucoup plus que par le passé. Avant, le train était privilégié et les joueurs pouvaient marcher à bord. Pas en avion. L’immobilisation est un facteur de risque, de même que la déshydratation. Les orthèses ou les plâtres constituent aussi des facteurs de risque. »

Steven Stamkos ne devrait pas subir d’effets néfastes à long terme à la suite de son intervention chirurgicale, estime le Dr Larose.

« Le fait d’avoir un bout de côte en moins ne nuira pas à sa capacité de jouer. Il y a évidemment certains risques à la chirurgie, mais habituellement, tout se passe très bien. Mais son retour au jeu pourrait être retardé s’il doit prendre des anticoagulants. »

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