Télévision

Dernier arrêt pour La petite séduction

Le 23 août, au terme de 235 émissions, La petite séduction rangera pour de bon ses valises. ICI Radio-Canada Télé a choisi de mettre fin au voyage après 12 saisons, considérant que « le concept avait porté tous ses fruits ». Une décision qui a pris l’équipe par surprise, mais avec laquelle l’animateur Dany Turcotte est en paix.

« La première année, j’avais prédit qu’on ne ferait pas plus de deux ans ! Mais l’émission s’est nourrie du chauvinisme des gens qui voulaient y participer, de sorte que ça a pris de l’expansion sans arrêt », m’a-t-il confié, fier du travail accompli.

« En télévision, il y a toujours un risque de faire l’année de trop. Je pense qu’on ne s’est pas rendus là. »

— Dany Turcotte

Après 12 ans, l’animateur admet tout de même qu’il devenait plus difficile de trouver des lieux à visiter. « On a commencé à approcher nous-mêmes des villages pour qu’ils nous reçoivent, ce qu’on ne faisait pas au début. Mais la banque d’artistes se renouvelait quand même assez bien. »

Rappelant l’idée du film La grande séduction, l’émission née le 1er mai 2006 a permis aux habitants des plus petits patelins du Québec et du Canada francophone de sortir le grand jeu pour charmer une vedette invitée. On a d’abord comparé l’émission à Soirée canadienne, qu’animait jadis Louis Bilodeau à Télé-7. « Lui, ce sont les villages qui allaient à lui, dans son studio de Sherbrooke. Alors que moi, j’allais dans les villages. On a dû faire deux ou trois fois le tour de la Terre en kilométrage. »

Dany Turcotte se souvient de l’émission pilote, tournée avec le comédien Louis-Georges Girard. « On est partis avec une caméra dans un village, on ne savait pas trop où on s’en allait. Notre concept était très mince. Mon ami Dominique Lévesque a vraiment travaillé fort les premières années pour mettre de la chair autour de l’os. »

L’émission a fait de ses moments d’émotion, où l’artiste invité se met à pleurer, sa marque de commerce.

« Les invités me demandaient souvent s’ils étaient obligés de pleurer ! Mais non, ce n’était pas un critère. Plusieurs n’ont pas pleuré. Moi, je me suis toujours retenu, parce que j’aurais fini parodié dans le Bye bye ! »

— Dany Turcotte

L’animateur reconnaît qu’on était dans les bons sentiments et que les prestations des hôtes pouvaient parfois être malhabiles.

« C’étaient des gens qui n’étaient pas habitués d’apparaître à la télévision. Tu aimais ça ou tu n’aimais pas ça. Mais ce n’était pas une émission à controverse. Ce n’est pas comme Tout le monde en parle, que certaines personnes regardent seulement pour la haïr. C’était juste du bonbon et du plaisir. »

Sortir des métropoles

Secret de tournage : les prestations des gens de l’endroit étaient souvent préenregistrées, au cas où ils seraient trop nerveux, une fois l’invité arrivé. L’équipe s’assurait ainsi d’avoir au moins une bonne prise pour le montage.

Maintenant que l’aventure prend fin, Dany Turcotte espère seulement que d’autres émissions lui emboîteront le pas pour sortir de Montréal et de Québec.

« Quand on voit des images des régions, c’est souvent lorsqu’il y a des tragédies. Nous, on montrait comment vivaient les gens. »

Il se soucie aussi des communautés francophones hors Québec, souvent négligées, et qui regardent notre télévision. Toutes les provinces canadiennes ont été visitées. « On est même allés hors du pays, à Saint-Pierre-et-Miquelon avec Marie Tifo. On a dû kidnapper du public parce qu’il n’y avait personne pour nous accueillir. Tous des Français qui nous applaudissaient sans savoir qui on était ! »

Ses plus beaux souvenirs

Parmi les émissions les plus émouvantes, Dany se souvient de celle à Lac-Mégantic, alors qu’il a dû s’adresser à la population réunie au nouveau centre-ville.

« Je pense aussi à Nicole Leblanc, qu’on avait amenée dans une usine de cannes de soupe, et qui avait vu sa face sur les cannes. Son rire était tellement magnifique que c’est le plus beau souvenir que j’ai gardé d’elle. »

Il se souvient du jour où la montgolfière qui emportait Rita Lafontaine et lui a été soufflée par le vent 2 km plus loin. « On accrochait la cime des sapins avec la montgolfière. Tout le monde nous a finalement accueillis en plein champ. »

Le téléphone de Dany Turcotte s’est déjà mis à sonner depuis l’annonce de la fin de l’émission. On lui offre entre autres de refaire de la scène. Mais plus encore, Dany aimerait passer des auditions pour jouer dans une série. Déjà cette semaine, il tournera pour un épisode des Pêcheurs avec Marie-Lise Pilote, dédié à leur ami Dominique Lévesque, mort en décembre dernier. « Au salon funéraire, Martin [Petit] est venu nous voir pour nous proposer l’idée. J’ai tout de suite embarqué », dit-il.

Dans cet épisode, alors qu’il cherche un cadre pour la photo de Dominique, le trio vivra toutes sortes d’événements, qu’il croira influencés par le défunt. « C’est très drôle et je pense que Dominique aurait beaucoup aimé », confie Dany.

L’aventure de La petite séduction se conclura le mercredi 23 août à 20 h à Saint-Martin-de-Beauce, avec la romancière Kim Thúy, qui a dégusté un hot chicken, son mets préféré de la cuisine québécoise. « La première fois qu’elle a commandé ça sur un menu, elle pensait qu’on lui servirait un poulet chaud ! Finalement, elle s’est amourachée de ce plat-là. » 

D’ici là, Pierre Hébert visitera Portneuf-sur-Mer le 16 août, et Katherine Levac, Carleton, en Gaspésie, le 9 août. « Ils lui ont fait un souper Harry Potter, ils avaient décoré sa chambre à l’effigie du personnage, elle était très heureuse », raconte Dany Turcotte, qu’on reverra à l’automne pour une 14e saison à Tout le monde en parle.

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