« Une grosse décision dans ma carrière »

En deuxième période mercredi, le Canadien mène par un but. Avec 78 secondes à écouler avant l’entracte, la mise en jeu a lieu en territoire montréalais. Le trio de Torrey Mitchell est déployé.

Après quelques secondes, Brian Flynn s’empare de la rondelle et amorce la relance. Il fait la passe à Phillip Danault, qui se charge de l’entrée de zone. Le Québécois déborde Daniel Sedin sans aucun mal, avant de refiler la rondelle à Mitchell, qui marque.

« [Danault] patine très bien à l’aile et il est fort en protection de la rondelle, a constaté Flynn, rencontré hier après l’entraînement à Brossard. [Mercredi], c’était l’exemple parfait, il a débordé Sedin et a coupé à l’intérieur pour faire un jeu. Presque à chaque match, il déborde un défenseur et réussit un jeu au filet. »

Depuis Québec, Raymond Veillette n’a pas pu s’empêcher de sourire en regardant la séquence. L’été dernier, ce préparateur physique a ajouté Danault au groupe de joueurs dont il assure l’entraînement estival. Le numéro 24 du Canadien s’est donc joint à Patrice Bergeron, David Desharnais, Antoine Vermette et Marc-Édouard Vlasic parmi les patineurs de la LNH qu’il supervise.

« Sur ce jeu, on a pu constater l’amélioration qu’il a apportée à son explosion, explique Veillette en entrevue avec La Presse. Il a fait plusieurs exercices d’haltérophilie, qui influencent beaucoup l’explosion et l’accélération. Autant sur le plan technique que physique, on a pu observer une progression au cours de l’été, c’était évident. Et il l’apprécie, car il en ressent les bienfaits. »

Partir à temps

Après 10 matchs, Danault totalise cinq points et affiche un différentiel de + 4. Son temps d’utilisation s’élève à 12 min 32 s, et il forme un quatrième trio drôlement efficace avec Mitchell et Flynn. Tout baigne.

Mais son bon départ trouve son origine à l’été 2015, quand il a décidé de faire un pas en arrière pour en faire deux en avant. La décision : subir une opération à la hanche, une blessure liée « à l’usure », dit-il.

« Dans la Ligue américaine [en 2014-2015], je jouais 20 minutes par match. Il y avait la fatigue aussi. Il y avait plein de facteurs. Tu peux même naître avec une défaillance dans la hanche.

« J’étais vraiment fatigué mentalement à cause de ma hanche. J’ai décidé de me faire opérer pour me “reseter”. Je suis arrivé prêt pour la saison en novembre. J’ai joué quelques matchs dans la Ligue américaine et j’ai été rappelé [par les Blackhawks]. C’était une grosse décision dans ma carrière. »

Là où il a fait un pas en arrière, c’est que son opération l’a privé d’entraînement à l’été 2015 et l’a fait amorcer la saison deux mois en retard sur ses pairs. On ne voyait peut-être pas le vrai Phillip Danault la saison dernière, même plusieurs mois après l’opération.

« Ça peut suivre un joueur pendant presque toute la saison. C’est tellement difficile, avec les calendriers chargés, de t’investir dans une préparation physique qui va te permettre de rattraper le temps perdu. Tu dois gérer ça, tout en gardant le niveau d’énergie optimal pour les matchs. »

— Raymond Veillette, préparateur physique de Phillip Danault

Cet été, au contraire, l’exclusion des séries du Canadien a permis à l’athlète de Victoriaville d’amorcer sa préparation dès la mi-mai.

« On a pu bénéficier d’une longue période pour optimiser ses qualités physiques, rappelle Veillette. On a pu le préparer pour le hockey d’aujourd’hui, qui est rapide, et rapide à répétition. Il fallait augmenter sa puissance, sa capacité à fournir plusieurs efforts à haute intensité, avec une récupération rapide. Ça nous a permis d’aller chercher une coche dans son explosion. »

« On a beaucoup travaillé en puissance. Ça se voit dans mon accélération sur la glace. Chapeau à Raymond », a dit Danault.

Une transaction profitable

Après 10 matchs, Danault, Flynn et Mitchell totalisent déjà sept buts. Ce chiffre est évidemment insoutenable à long terme, puisqu’il signifie que le Canadien obtiendrait plus de 50 buts de la part de son quatrième trio sur une saison complète.

En fait, la seule statistique défavorable pour cette unité est son taux de possession de la rondelle. Par contre, Danault, Flynn et Mitchell sont aussi les trois joueurs du Tricolore le plus souvent déployés sur des mises en jeu en zone défensive.

« Quand on commence dans notre zone contre les meilleurs trios adverses, on veut sortir le plus rapidement possible de notre territoire et passer du temps dans le leur, explique Flynn. On est tous assez bons en échec avant pour créer des revirements.

« Les joueurs offensifs n’aiment pas jouer dans leur territoire. À mesure que les matchs progressent, ces joueurs-là peuvent devenir frustrés et commencer à tricher. C’est là qu’on peut générer de l’attaque. »

Marc Bergevin, rappelons-le, avait cédé Dale Weise et Tomas Fleischmann pour acquérir Danault l’hiver dernier. Fleischmann n’est plus dans la LNH, tandis que Weise se cherche à Philadelphie, à presque trois fois le salaire de Danault. À classer dans la catégorie des bons coups du DG.

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